Intervention de Jérôme Bédier

Réunion du 22 juillet 2015 à 21h30
Commission des affaires économiques

Jérôme Bédier, secrétaire général du groupe Carrefour :

Nous sommes face à une crise d'une grande gravité. Nous mesurons parfaitement la situation dans laquelle se trouvent les éleveurs. Nous savons aussi que les actions qui sont menées ne sont pas anodines. Nous sommes d'accord sur la nécessité d'apporter collectivement des réponses adaptées, ce qui suppose de se dire les choses très directement, mais sans verser dans la caricature. Je trouve que nous avons, depuis quelques jours, sur ces sujets des débats constructifs : les positions ne sont pas systématiques et l'on n'essaie pas de faire porter de manière excessive le poids sur tel ou tel acteur.

Nous sommes convaincus que nous sortirons de tout cela par le haut, comme cela s'est toujours passé dans l'agriculture. Les crises survenues dans de nombreux secteurs ont toujours trouvé une issue dans la valeur ajoutée et dans le travail fait sur le produit. Les crises terribles de la viticulture ont été résolues par une segmentation par le haut, de même que la crise du poulet prêt à cuire dans la filière du poulet.

Chez Carrefour, nous aimons vendre des produits de bonne qualité, qui ne sont pas forcément les moins chers, et nos consommateurs aiment les trouver dans nos magasins. Nous n'avons pas que des prix d'entrée de gamme. C'est ainsi que se construit le commerce, et nous devons être capables de continuer à conduire ensemble ce travail. Ainsi que M. Georges Plassat, notre président-directeur général, l'a dit à plusieurs reprises, la course systématique aux prix bas ne conduit qu'à la catastrophe. Ce n'est pas la voie que nous devons suivre. Nous devons avoir, dans nos magasins, des prix compétitifs parce que certains de nos concitoyens les recherchent, mais nous ne sommes pas là pour chercher systématiquement à faire du low cost et à avoir le prix le plus bas possible.

Par ailleurs, j'estime que la transparence s'améliore. Le rapport du médiateur va dans ce sens, ainsi que l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Aujourd'hui, chacun visualise assez bien la situation des uns et des autres dans la filière. Je crois d'ailleurs que les interprofessions doivent continuer à jouer pleinement leur rôle de cadre naturel d'échange, dans lequel nous pouvons anticiper, essayer de construire notamment la segmentation dont je parlais tout à l'heure. J'ai entendu de la bouche de Jean-Pierre Fleury des mots que nous aimons beaucoup, comme la maturation ou la segmentation par les races. Tous ces éléments sont créateurs de valeur et correspondent à ce que nous essayons de faire, notamment par le canal de ce que nous appelons les Filières Qualité Carrefour, qui sont un des moyens de travailler sur ces sujets de segmentation.

Nous devons continuer à travailler sur la transparence, et nous jouons, nous aussi, la préférence. Nous le faisons systématiquement. Nous avons à peu près les mêmes chiffres en matière de porc, de boeuf et de lait. Nous faisons d'ailleurs l'objet d'une enquête de la part de la Commission européenne, qui estime que nous avons trop de légumes français dans nos magasins. On ne peut donc pas nous reprocher de ne pas jouer la préférence nationale ! Nous le faisons parce que nous pensons que c'est notre intérêt, le vôtre et celui de nos clients. C'est un mouvement naturel, et c'est la première solidarité que l'on peut avoir vis-à-vis du monde agricole.

En ce qui concerne nos engagements, nous avons toujours dit que nous serions d'accord avec une hausse de tarif présentée par des industriels si elle est justifiée par une augmentation de la rémunération du producteur. C'est dans cette logique que nous travaillons.

Aujourd'hui, nous devons bâtir ensemble un programme d'action extrêmement rapidement. La distribution n'est pas concernée par tous les sujets, ou alors indirectement. Mais qu'il s'agisse d'assurance, de contractualisation à trois dans le cadre de l'interprofession – notamment dans le lait –, de gestion des surcapacités ou de la mise en place d'outils de maîtrise des marchés, il nous semble important d'utiliser la crise actuelle pour bâtir ce programme d'action et nous projeter tous ensemble dans une logique positive et constructive.

La France est un très grand pays en matière d'alimentation, d'agroalimentaire, de production agricole et de grande distribution. Nous avons, dans ce domaine, des acteurs de référence partout dans le monde. Si nous travaillons collectivement, nous devrions arriver à un bon résultat.

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