Intervention de Camille Grand

Réunion du 8 juillet 2015 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Camille Grand, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique :

L'accord de Minsk est, encore une fois, le seul dispositif diplomatique existant sur la crise ukrainienne : je me garde donc de trop le critiquer, d'autant qu'il a permis d'établir un cessez-le-feu à un moment où le conflit prenait de l'ampleur. Depuis février, il n'est pas très bien respecté – il y a eu plus de 300 morts –, mais les violations sont locales et il n'y a pas eu de reprise des combats. Tout cela reste néanmoins fragile, même si certaines forces lourdes ont été reculées de la ligne de front.

S'agissant de la mise en oeuvre de la partie plus politique de l'accord, on est loin du compte, tant du côté ukrainien que des séparatistes et des Russes, ce qui est préoccupant. S'il y avait une reprise des combats, il faudrait que la France et l'Allemagne, qui sont les garants de ce processus, sachent faire part de ses éventuelles violations. J'espère que la période estivale ne sera pas propice à une telle reprise, comme l'an dernier.

Je ne pense pas que la France se soit mise dans la main des Américains. Le processus a été une initiative franco-allemande, à laquelle les Américains se sont ralliés bon an mal an. La France a aussi essayé de porter une voix un peu différente et l'unité des Européens d'un côté et des Occidentaux de l'autre, qui a été une bonne chose, ne s'est pas faite sur la base des positions américaines – les États-Unis n'ont pu ainsi obtenir raison sur la livraison d'armes non létales à l'Ukraine par exemple. Beaucoup d'Européens se plaignent d'ailleurs que Washington ne s'intéresse pas assez à ce dossier.

Sur le nucléaire, si la France et la Russie partagent des points de convergence, leur pratique est bien différente : la politique dite de « sanctuarisation agressive » de celle-ci n'a rien à voir avec notre approche.

Concernant les sanctions, j'ai été surpris par l'unité des Européens dans la durée. Elles semblent relativement efficaces – elles compteraient pour environ un tiers de la chute du PIB russe l'an dernier –, mais elles ne peuvent tenir lieu de politique : elles doivent être intégrées dans une manoeuvre plus générale. Le défaut des Occidentaux et de l'Union européenne est d'avoir adopté des sanctions par défaut, en l'absence d'autres outils à disposition. Il faudrait être clair sur le but qu'on leur assigne, ce qui permettrait de préciser les conditions dans lesquelles elles peuvent être aggravées ou levées.

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