Intervention de Philippe Goujon

Réunion du 30 septembre 2015 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon, rapporteur :

M. Coronado se fait rarement le porte-parole de la droite sénatoriale ; il se montre là assez audacieux !

Je rappelle tout d'abord la nécessité d'un fondement législatif pour interdire les téléphones portables et, plus généralement, les terminaux. Il s'agit d'ailleurs plus d'interdire les terminaux ou le recours aux SMS que de simples appels téléphoniques, même si 20 % d'entre eux sont considérés par l'administration pénitentiaire comme malveillants – il y a tout de même 80 % d'appels familiaux.

Vous nous reprochez de faire l'amalgame entre le téléphone portable et la radicalisation, mais le juge Trévidic a cité des exemples très caractéristiques devant la commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes. Ainsi, ce détenu, incarcéré pour un crime terroriste, dans la cellule duquel trois téléphones portables ont été successivement retrouvés en l'espace d'un mois. Ou cet autre détenu qui avait, grâce à son téléphone portable, organisé un projet d'attentat devant se dérouler pendant le championnat d'Europe de football.

En France, l'interdiction du téléphone portable en prison repose non pas sur la loi, mais sur des textes de nature réglementaire. Cela nous paraît insuffisant, et c'est d'ailleurs un choix qui, à notre avis, engage la sécurité des établissements et de leur personnel.

La Contrôleure générale des privations de liberté ne voit en aucun cas ses prérogatives réduites. Simplement, nous tenons compte d'une modification apportée par la loi de 2014 à la loi pénitentiaire, en vertu de laquelle « la possibilité de contrôler les communications téléphoniques, les correspondances et tout autre moyen de communication ne s'applique pas aux échanges entre le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et les personnes détenues ». Il nous paraît utile d'apporter une restriction en ne visant que les communications téléphoniques et les correspondances. Il s'agit de clarifier le champ de la protection.

Les correspondances électroniques doivent être aussi interdites aux personnes détenues, car lorsque les détenus utilisent des téléphones portables, c'est moins pour avoir des conversations téléphoniques que pour échanger des SMS.

Enfin, l'article 4, que vous voulez également supprimer, a pour objet d'offrir un nouveau moyen de prévenir les phénomènes de radicalisation : la possibilité de refuser un permis de visite en cas de prosélytisme du visiteur. Nous ne faisons là que reprendre un amendement de nos collègues Marie-Françoise Bechtel, Cécile Untermaier et Dominique Raimbourg, que l'Assemblée nationale avait d'ailleurs adopté en première lecture, avec l'avis favorable de notre commission et du Gouvernement. Cet amendement visait à accroître la marge d'action des autorités pénitentiaires dans les cas où la personne détenue a été approchée en détention et mise en condition par plusieurs visiteurs qui ont contribué largement à sa radicalisation. C'était le cas dans l'affaire Nemmouche, et je n'appelle pas cela un amendement d'émotion ni un amendement pour occuper le terrain.

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