Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 16 octobre 2015 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2016 — Après l'article 8

Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics :

Monsieur le président, vous m’autoriserez à prendre quelques minutes de plus dans ce débat, compte tenu du nombre d’amendements en discussion commune sur lesquels je dois me prononcer, et du nombre d’orateurs qui se sont exprimés. Je vous en remercie d’avance.

Il faut d’abord nous mettre d’accord sur plusieurs points. Le débat actuel ne porte pas – me semble-t-il – sur le niveau de l’aide au développement. À ceux qui m’ont demandé si nous allions augmenter le niveau de l’aide au développement par rapport au budget tel qu’il a été présenté, je répondrai oui. À la question : « Le ferez-vous en augmentant la part de la taxe actuelle sur les transactions financières qui lui sera affectée ? », ma réponse est à nouveau oui.

Vous pourrez en débattre : si certains veulent que cette part augmente, ou que la totalité du produit de la taxe sur les transactions financières actuelle soit affectée à l’aide au développement, ils pourront le proposer au moment où l’Assemblée examinera la mission « Aide publique au développement ».

Je tenais à le dire clairement, car beaucoup d’entre vous abordent ce débat en disant que l’extension de la taxe sur les transactions financières permettra d’augmenter le montant que la France met au service du développement. Je comprends cet argument, mais la question n’est pas de savoir à quoi utiliser le produit de cette taxe : c’est de trouver comment faire pour qu’elle soit efficace sans nuire à l’économie.

Ensuite, notre débat ne porte pas sur le règlement dont les instances européennes sont en train de discuter. Je vous propose de vous rapporter à ce qui a été décidé par le Conseil de l’Union européenne. Ce projet de règlement, tel que le Conseil de l’Union européenne l’a proposé, en accord avec la Commission européenne, ne présente pas les inconvénients que vous décrivez. Il y a à présent des débats au Parlement européen, car dans ce domaine il faut des « trilogues » – pour utiliser l’un de ces termes un peu barbares qui sont très utilisés au niveau européen. Quoi qu’il en soit, la position du gouvernement français a été adoptée en Conseil des ministres, et ne présente pas les inconvénients que vous décrivez.

Venons-en à présent à la taxe sur les transactions financières, et à son extension aux transactions intra-journalières – pour parler français – dans le domaine des actions. Il ne s’agit pas, en effet, d’étendre cette taxe à d’autres types de produits, quoique je sois favorable, pour ma part, à une telle extension – et je pense que vous l’êtes aussi.

La position française est celle que je défends au sein du groupe de onze pays qui sont en train de se mettre d’accord pour étendre la taxe sur les transactions financières. Parmi ces pays, on compte l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne. Ces quatre pays représentent à eux seuls de 60 % à 65 % du PIB européen. Les très grandes nations de l’Union européenne, et plus particulièrement de la zone euro, travaillent donc en commun pour aboutir à une taxe sur les transactions financières commune, dans des conditions comparables – pour ne pas dire identiques.

Ce dont nous débattons, c’est bien de l’opportunité d’inclure les transactions intra-day dans le champ de cette taxe. Je précise dès maintenant que je suis favorable à une taxation des transactions intra-journalières. J’ai défendu cette position personnellement, et – je ne crois pas trahir un secret en vous l’annonçant – c’est ce vers quoi nous nous dirigeons, à onze. Quand les onze pays concernés se seront mis d’accord, ces transactions intra-journalières seront taxées : il me paraissait utile de le préciser.

Elles seront taxées, certes, mais à deux conditions. Mme la rapporteure générale a très bien décrit la première condition. Si l’on décidait, pour donner l’exemple, d’élargir notre taxe sur les transactions financières à partir du 1er janvier prochain, ce serait impossible, car nous ne savons pas faire cela à l’heure actuelle. En effet, on ne peut pas comptabiliser ces transactions de la même manière que celles sur les actions, qui sont aujourd’hui enregistrées d’une manière assez simple. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a aucun moyen de taxer les transactions intra-journalières, mais il faut pour cela monter des dispositifs d’échanges d’informations très complexes qui ne peuvent être créés en l’espace de quelques semaines.

De toute façon, il n’est pas possible de taxer ces transactions à partir du 1er janvier prochain. Quand bien même vous adopteriez une telle disposition, elle serait matériellement impossible à mettre en oeuvre. Vous demandiez, monsieur Alauzet, à quel horizon cela sera possible. Au niveau européen, nous visons le 1er janvier 2017. Puisque nous nous mettrons d’accord sur le dispositif d’ici à la fin de cette année, et je pense même d’ici à la fin du mois de novembre, il sera bientôt connu. Dès lors, tous les pays concernés pourront travailler sur les modalités techniques afin que cette nouvelle taxe sur les transactions financières entre en application.

Pardonnez-moi l’expression, mais vous pouvez toujours vous faire plaisir en adoptant aujourd’hui un amendement afin que la nouvelle taxe entre en application dès le 1er janvier prochain, mais cela ne se fera pas. Cela pourra se faire à une date ultérieure, et en coordination avec le niveau européen ; ce sera techniquement possible, mais cela demandera un gros travail.

La seconde condition est la suivante : nous ne devons pas être les seuls à agir.

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