Intervention de Laurent Furst

Réunion du 14 octobre 2015 à 13h30
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Furst :

Merci pour vos deux témoignages, particulièrement riches.

Je suis un peu usé par cette commission d'enquête. Je vois bien ce que le groupe majoritaire tente d'y faire : de la prestidigitation ! Nous subissons une baisse des dotations qui dépasse 12 milliards d'euros, mais on parle beaucoup du petit milliard que l'on donne par ailleurs, comme s'il compensait la diminution. Vous ne cessez, monsieur le président, de revenir à la réforme de la taxe professionnelle, qui est maintenant actée depuis longtemps et ne relève pas de cette commission : c'est encore une façon de jeter un voile sur la situation. Enfin, la liberté de parole de notre rapporteur ne doit pas être bridée, pas plus que la mienne ou celle de n'importe quel autre membre de la commission.

Les collectivités connaissent une situation extrêmement difficile qui est le fruit des choix politiques du gouvernement actuel, mais vous ne voulez pas en assumer les conséquences. Un indice : lors de notre première réunion, vous vouliez modifier l'intitulé de la commission d'enquête. Tenons-nous en à la réalité, la seule dont il faut parler ici : la baisse des dotations, ce sont 11 milliards d'euros en moins dans les caisses de nos collectivités ! Je comprends que des députés de la majorité soient solidaires du Gouvernement, je ne leur en ferai pas le reproche ; c'est légitime.

Dans ma commune, qui compte 10 000 habitants, il faudrait, pour compenser les effets de la péréquation horizontale et de la baisse des dotations, que j'augmente la fiscalité de 15 % en 2015, de 25 % en 2017. C'est cela, la réalité ! J'ai apprécié la franchise de vos témoignages : vous l'avez dit, ce qui en résulte, c'est une dégradation des services publics. Les responsables des transports nous ont indiqué avoir déjà réduit de 2,5 % l'offre de transports urbains et interurbains, alors que nous ne sommes qu'au tiers de la période annoncée de baisse des dotations. C'est une réalité objective. De même pour la baisse des investissements : c'est démontré, les collectivités n'auront plus les moyens d'entretenir leur patrimoine ni de porter de nouveaux projets dans de nombreux territoires.

Ce que nous apprenons aujourd'hui, et que je soupçonne depuis longtemps, c'est qu'il n'existe aucune évaluation, ni préalable ni a posteriori. J'ai entendu monsieur Vallini, secrétaire d'État – un homme par ailleurs brillant –, parler des économies que l'on allait réaliser en supprimant des σyndicats à vocation multiple (SIVOM) et des syndicats à vocation unique (SIVU), confondant gaillardement les dépenses de fonctionnement et les dépenses structurelles des présidences ! Bref, on n'évalue rien, on conduit des politiques au doigt mouillé, et cela entraîne des conséquences terribles, notamment pour les collectivités.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, vous devriez demander au ministre, et plus précisément à la Direction générale des collectivités locales (DGCL) qui est placée sous son autorité, de nous soumettre ses évaluations avant et après, pour que nous sachions sur quelle base ils ont travaillé. C'est le seul point intéressant. Je m'interroge d'ailleurs sur la DGCL, qui existait sous le précédent gouvernement et qui survivra à la prochaine alternance : dans quelle mesure cette administration, qui a une doctrine constante, n'impose-t-elle pas aux différents gouvernements la même vision des dotations et de la gestion ? Elle a sans doute très bien réussi cette fois-ci.

En ce qui concerne enfin la mutualisation, elle peut permettre de faire des économies, mais ce n'est pas assuré. Quand une administration grandit, on crée un poste de directeur, un poste de directeur adjoint ; on technocratise. Voyez les dépenses de fonctionnement par strates de communes : plus les communes grandissent, plus on dépense. Dès lors, va-t-on vraiment faire des économies en fusionnant de petites administrations ? Là aussi, j'aimerais connaître l'évaluation sur laquelle repose cette hypothèse. Ma collègue a raison, il faut dépasser les égoïsmes ; mais je doute que, du point de vue macroéconomique, l'on parvienne à économiser beaucoup. Il serait intéressant que, sur ce point-là aussi, la DGCL nous donne quelques éléments de réflexion.

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