Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 5 novembre 2015 à 15h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - affaires étrangères - développement durable

Alain Vidalies, secrétaire d'état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Le budget que je vous présente s'inscrit dans la stratégie du Gouvernement, alliant la maîtrise des déficits publics et la poursuite des objectifs que j'avais déjà développés devant vous l'an dernier.

Dans le programme 203, 95 % des crédits sont consacrés aux concours destinés à SNCF-réseau, et représentent l'effort important de l'État pour le soutien des activités ferroviaires de service public comme les TER, les trains Intercités et le fret ferroviaire, mais aussi pour le soutien à l'entretien routier et à la subvention pour charges de service public destinée à VNF. Les crédits du programme 203 baissent de 17,5 millions d'euros, ce qui ne représente que 0,5 % de la loi de finances initiale pour 2015. Cette quasi-stabilité s'explique par le maintien des concours ferroviaires à leur niveau de 2015.

La maintenance du patrimoine routier constitue toujours une priorité pour laquelle la baisse des crédits, hors financement de l'AFITF, n'est que de 1,1 % ; mais elle sera plus que compensée en 2016, tout comme en 2015, par une dotation exceptionnelle provenant de la contribution volontaire exceptionnelle des concessionnaires autoroutiers dans le cadre de l'accord passé le 9 avril dernier ente l'État et les concessionnaires. L'effort d'efficacité sur les effectifs en charge du réseau routier national sera non nul cette année, et pourra se traduire par quelques ajustements au niveau des services.

La subvention à VNF a également fait l'objet d'une baisse modérée de 2,5 % en raison de la part importante de masse salariale dans le budget de l'établissement. Nous poursuivrons en 2016 notre effort de réforme de la ressource parafiscale de VNF.

Pour 2016, la répartition du budget de l'AFITF n'est pas encore arrêtée ; son conseil d'administration s'en chargera prochainement. Mais je souhaite que l'AFITF suive la priorité accordée par le Gouvernement à la maintenance des infrastructures de transport, dont j'ai fait ma priorité en prenant mes responsabilités. Le niveau des d'investissements de l'AFITF sera légèrement supérieur en 2016, les dépenses dites opérationnelles seront de 1,855 milliard d'euros en 2016 contre 1, 844 milliard dans le dernier budget 2015 de l'AFITF : cette augmentation est rendue possible grâce à la contribution volontaire des concessionnaires autoroutiers, suite à l'accord obtenu par le Gouvernement le 9 avril dernier avec le secteur. Les recettes prévisionnelles sont de 1926 millions d'euros, intégrant une affectation de 715 millions d'euros de TICPE et les 100 millions d'euros apportés par les sociétés concessionnaires d'autoroutes.

Concernant la TICPE, suite aux travaux conduits avec les organisations professionnelles du secteur du transport routier de marchandises, le dispositif mis en place en 2015 qui est reconduit et pérennisé : hausse de 2 centimes de la TICPE pour les véhicules légers et non-déductibilité au titre du gazole professionnel des augmentations de la TICPE à hauteur de 4 centimes.

Au-delà de 2016, de nouvelles sources de financement sont recherchées pour permettre à l'Agence de faire face aux engagements liés aux grands projets européens Lyon-Turin et Canal Seine-Nord, dont les dépenses interviendront à partir de 2017 et surtout 2018.

J'ai entendu les chiffres avancés par plusieurs rapporteurs, esquissant des perspectives financières prenant en compte les charges résultant notamment des engagements antérieurs, mais aussi des CPER et des grands projets : les ressources supplémentaires de l'AFITIF devront en effet s'élever à 500 millions d'euros, voire 700 millions d'euros supplémentaires. Le Gouvernement n'entend pas éluder la question et la traitera dès la préparation du projet de loi de finances pour 2017, en proposant des ressources supplémentaires pour l'AFITIF ou en lui affectant la totalité des ressources actuellement dédiées au financement des infrastructures.

Le Gouvernement partage donc le constat de vos rapporteurs. Pour cette année, les crédits correspondent aux engagements pris, puisqu'ils sont maintenus à 1,9 milliards d'euros. Cependant, compte tenu des CPER et des grands projets, il faudra naturellement trouver des ressources supplémentaires. Un budget d'investissement complémentaire sera nécessaire pour l'AFITIF dès 2016.

S'agissant du programme 205, qui s'articule autour du volet « Sécurité et affaires maritimes » et du volet « Pêche et aquaculture » qui accompagne la mise en oeuvre de la politique commune de la pêche (PCP), en vue d'une exploitation durable des ressources aquatiques, le projet de budget 2016 du programme est présenté à hauteur de 185,9 millions d'euros d'autorisation d'engagement, et 183,4 millions d'euros de crédits de paiement.

Le programme porte de nombreuses missions régaliennes de sécurité maritime et de mise en oeuvre de la politique commune des pêches. Dans le contexte budgétaire contraint de l'État, le programme conduira, pour ce qui concerne la sécurité et la signalisation maritimes, des actions ciblées pour réaliser des investissements porteurs d'économies pour le futur : la modernisation des systèmes d'information des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) ; le renouvellement d'un baliseur pour l'armement des phares et balises, selon le programme d'efficience « un nouveau navire contre deux anciens », permettant d'ici à deux ans le retrait du service de deux anciens baliseurs dont l'exploitation est devenue difficile ; la modernisation technologique dans le domaine de la surveillance des pêches dans la zone exclusive des Terres australes françaises.

Les dépenses en faveur d'un bon fonctionnement de l'enseignement maritime secondaire et supérieur sont maintenues constantes et illustrent la priorité du gouvernement en la matière.

Les exonérations de charges qui améliorent la compétitivité de la flotte soumise à concurrence internationale continueront à être prises en charge par le programme.

En matière de sauvetage, l'État a pris ses responsabilités en assurant le financement de la Société nationale pour le sauvetage en mer (SNSM), acteur majeur du sauvetage en mer : outre la subvention annuelle de 2,1 millions d'euros qui est maintenue dans le projet de loi de finances 2016, 1,4 million d'euros supplémentaires seront dégagés pour le financement des investissements de la SNSM en 2016. À terme, une partie de la taxe éolienne sera affectée à la SNSM. Je réponds ainsi précisément aux questions des rapporteurs : ce complément sera pérennisé et financé par une ressource particulière dès 2017.

S'agissant de l'accompagnement des secteurs de la pêche et de l'aquaculture dans la mise en oeuvre de la nouvelle politique commune des pêches (PCP), le programme mobilisera les moyens nécessaires pour abonder le nouveau fonds « Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche » (FEAMP), dont la mise en oeuvre effective commencera en 2016.

En effet, le commissaire européen m'a confirmé la semaine dernière, à Brest, que ce programme opérationnel avait été validé par ses services et serait adopté officiellement par le collège des commissaires peut-être dès la fin du mois de novembre. L'engagement que j'avais pris de faire en sorte qu'il connaisse un commencement d'exécution avant la fin de l'année sera donc respecté.

Pour mémoire, l'enveloppe française sur la période de programmation 2014-2020 est de 588 millions d'euros, répartie en plusieurs axes : développement durable de la pêche, à hauteur de 369 millions d'euros, en hausse de 70 % par rapport à la précédente période de programmation ; collecte des données ; contrôle des pêches ; compensation des surcoûts pour nos outremer. La maquette financière stabilisée répartit ces montants entre les mesures nationales, pour un total de 304 millions, et les mesures régionales, dont la gestion est déléguée aux régions pour un montant de 284 millions. Dans les négociations des CPER, certaines régions avaient en effet exprimé la volonté de pouvoir exercer cette gestion déléguée.

Dans l'immédiat, la priorité porte sur la mise en place rapide d'un système de gestion et contrôle du fonds afin que les premiers dossiers présentant des projets structurants puissent être préparés par les demandeurs selon les logiques que je viens d'évoquer.

Ces montants importants sont complétés par des contreparties nationales. L'appel des fonds européens nécessite, pour cette année de mise en oeuvre, la mise en place des dépenses pour lesquelles l'État est maître d'ouvrage, et celle des contreparties nationales. L'enjeu majeur est de permettre un accompagnement de l'amélioration des performances économiques et environnementales des filières pêche et aquacultures équivalent à ce qu'il fut lors de la précédente programmation.

Elle s'appuie sur un volet important d'acquisition de connaissances, notamment sur l'état des ressources halieutiques et sur les interactions entre la pêche et les milieux marins, et de contrôle des pêches. L'évolution du budget ne permet d'envisager, par ailleurs, que des actions ciblées de soutien spécifique, telles que le plan chlordécone.

Ce cadre général étant donné, et s'agissant des grands dossiers transports, mer et pêche, je voudrais revenir plus précisément sur les infrastructures et les services de transports, le domaine aérien, la mer et la pêche.

Je commencerai par les infrastructures et les services de transports. Pour ce qui est du transport ferroviaire, suite à la réforme ferroviaire d'août 2014, le nouveau groupe ferroviaire a été mis en place en juillet 2015. L'élaboration des textes réglementaires a débuté. Elle s'est accompagnée d'une large concertation avec les parties. Ainsi, une grande partie des dispositions de la réforme est déjà entrée en vigueur avec, au 1er septembre 2015, quinze décrets d'application et une ordonnance publiés. D'ici la fin de l'année 2015, sept autres décrets devraient être publiés achevant ainsi, à l'exception du volet social de la réforme, les travaux juridiques d'application de la loi. Nous sommes aujourd'hui en cours d'élaboration des contrats de performances entre l'État et les entités de ce groupe public ferroviaire, afin d'établir notamment les trajectoires financières. La conclusion des contrats est envisagée pour le courant 2016.

S'agissant du chantier relatif à la clarification de l'offre TET, à la suite de l'excellent rapport de la commission Duron, j'ai indiqué en juillet dernier au Gouvernement une feuille de route. Elle comprend un renforcement du rôle d'autorité organisatrice de transport de l'État, la conclusion avec SNCF Mobilités d'une nouvelle convention pluriannuelle sur la période 2016-2020, l'organisation d'une concertation, notamment avec les régions, sur les évolutions de l'offre TET à mettre en place – mission que j'ai confié au préfet Philizot –, la création enfin d'un comité consultatif réunissant l'ensemble des présidents de région sous la présidence du ministre.

Par ailleurs, après l'engagement de 510 millions d'euros pour l'acquisition de 34 rames en 2013, le Gouvernement s'est engagé à ce que le parc de matériel roulant des lignes structurantes de l'offre TET soit entièrement renouvelé d'ici à 2025, pour un montant d'investissement d'environ 1,5 milliards d'euros.

Pour ce qui est de la concertation, le préfet Philizot a commencé ses démarches auprès des régions, dans le contexte particulier que constitue la fusion prochaine de certaines d'entre elles. Il les reprendra donc dès le début de l'année 2016 avec les nouveaux exécutifs régionaux. Ses démarches s'avèrent positives quant aux TET aujourd'hui, lignes qui paraissent pouvoir s'inscrire à l'avenir dans l'organigramme des TER.

S'agissant du matériel, le Gouvernement s'est engagé à hauteur de 1,5 milliards d'euros pour contribuer à son renouvellement. Plus facile et plus rapide, un achat sur étagère paraît envisageable lorsqu'un marché préexistait avec une région. Mais le matériel alors fourni était conçu pour rouler à 160 kilomètres à l'heure, et non à 200 kilomètres à l'heure, comme c'est nécessaire sur les lignes qui viennent d'être évoquées. Dès lors, à quelles conditions peut-il être modifié ? Ces modifications sont-elles d'ailleurs compatibles avec le cahier des charges initial ? Une expertise juridique est en cours pour évaluer les deux options ouvertes : soit un achat sur étagère, qui aurait l'avantage de permettre une livraison rapide et efficace, soit un nouvel appel d'offres. Nous connaîtrons les résultats de cette expertise avant la fin de 2015. Le Gouvernement jouera la transparence, en particulier sur ses aspects juridiques.

J'en viens au domaine autoroutier. Le Gouvernement a engagé des discussions avec les sociétés concessionnaires qui a abouti au protocole d'accords que j'ai signé. Ce protocole remplit trois objectifs : rééquilibrer les contrats dans l'intérêt des usagers et de l'État ; dégager des ressources nouvelles pour le financement des infrastructures de transport, les sociétés d'autoroutes versant 1 milliard d'euros au profit de l'amélioration des infrastructures de transport du pays, dont 300 millions d'euros au cours des trois premières années ; contribuer à la relance de l'activité économique et permettre des créations d'emploi.

Ce plan prévoit la réalisation par les sept principales sociétés concessionnaires d'une vingtaine d'opérations à leur charge exclusive, pour un montant de 3,27 milliards d'euros. Les décrets approuvant les avenants ont été publiés le 23 août 2015. Les premiers travaux démarreront d'ici la fin de l'année et s'échelonneront jusqu'en 2018. Le plan de relance autoroutier permettra la création de près de 10 000 emplois. À la demande du Gouvernement, les sociétés d'autoroutes se sont engagées à ce que 55 % des travaux soient réalisés par des PME et PMI non liées aux groupes autoroutiers.

Pour ce qui est des infrastructures, les projets de renouvellement ou de développement doivent être planifiés dans une logique d'aménagement du territoire : c'est l'objet des CPER déjà cités. L'État y mobilisera 6,7 milliards d'euros au titre des transports, correspondant à un montant, tous cofinanceurs confondus, de plus de 23 milliards d'euros.

En complète cohérence avec les principes de la transition énergétique, les ressources consacrées aux modes alternatifs à la route, tous cofinanceurs confondus, représentent plus de 75 % des crédits transports, dont 7,6 milliards d'euros au titre du ferroviaire, plus de 1,8 milliards d'euros pour les ports, vallée de la Seine comprise, et 7,5 milliards d'euros au titre des transports collectifs en Île-de-France. Pour répondre aux besoins des territoires, les CPER prévoient néanmoins un effort important de l'État en matière routière, avec une enveloppe de contractualisation de 3 milliards d'euros en lien avec la réalisation de l'ordre de 250 chantiers prioritaires.

Deux grands projets de dimension européenne ont bien avancé. S'agissant du Canal Seine-Nord Europe, tout est mis en oeuvre pour que le projet entre dans sa phase opérationnelle dans le courant du premier semestre 2016. Le projet d'ordonnance créant la société de projet est actuellement à la consultation des collectivités territoriales. L'enquête publique déroule du 7 octobre au 20 novembre 2015 ; l'horizon d'obtention de la déclaration d'utilité publique est fixé à début 2017 pour un début des travaux la même année et une mise en service en 2023. Avant la fin de l'année, une convention concrétisant l'engagement financier de l'Europe dans le projet de liaison Seine-Escaut, à hauteur de 980 millions d'euros, sera signée par la France et les partenaires européens du projet.

Quant au projet Lyon-Turin, il est désormais totalement déclaré d'utilité publique à la fois en France et en Italie. Le nouveau promoteur qui sera chargé de conduire les travaux définitifs est mis en place depuis février. Le dossier de demande de crédits européens a obtenu une réponse positive, puisque 814 millions d'euros ont été attribués par l'Europe pour couvrir les investissements à réaliser d'ici à 2019. Par ailleurs, nous avons signé avec l'Italie en février 2015 un nouvel accord pour permettre le lancement des travaux définitifs.

S'agissant enfin des transports urbains, malgré les difficultés rencontrées sur le budget de l'AFITF, le Gouvernement a tenu ses engagements en faveur du développement des projets de mobilité durable. Les subventions du troisième appel à projets sur les transports urbains seront délivrées par l'AFITF après conventionnement des opérations ; pour rappel, il s'agit de 99 à6projets émanant de 65 autorités organisatrices de transport, pour un montant de 110 millions d'euros de subventions.

Concernant l'ouverture du marché du transport par autocar, l'offre de mobilité a connu un développement significatif en un mois seulement. Le décret encadrant l'ouverture du marché a été publié le 14 octobre dernier pour s'assurer que les nouvelles lignes d'autocars ne portent pas atteinte à l'équilibre des services publics. L'enjeu est maintenant d'accompagner la croissance du secteur en développant les arrêts et gares routières pour assurer un bon maillage du territoire.

Enfin, dans le cadre du plan d'actions pour les mobilités actives de 2014, plus de 80 % des vingt-cinq mesures s'appliquent d'ores et déjà.

Quant au transport aérien, il participe au rayonnement international de la France, avec 2,8 millions de vols contrôlés et 140 millions de passagers. La filière aéronautique, avec des entreprises importantes et nombreuses, est un secteur stratégique, vecteur de recherche et d'innovation pour l'économie nationale et acteur de la souveraineté française. Le poids économique du secteur représente aujourd'hui un peu plus de 3 % du PIB.

Partenaire de l'ensemble des acteurs de l'aérien, la direction générale de l'aviation civile est à la fois une direction régalienne de l'État, un régulateur économique, un pôle de surveillance de la sécurité et un prestataire de services de la navigation aérienne et de formation. Cette structure, unique en Europe, permet une approche globale des enjeux du secteur aérien.

En 2016, la DGAC et ses personnels continueront d'accompagner la transition énergétique et écologique du transport aérien, avec l'objectif de contribuer à lutter contre le réchauffement climatique. Pour ce faire, la DGAC poursuivra son engagement dans la construction du Ciel unique européen au service de la performance économique et environnementale.

L'action de la DGAC s'appuiera sur une stratégie financière responsable, comme l'a souligné le rapporteur. Elle poursuivra ainsi sa politique de réduction des coûts structurels au moyen d'une redéfinition de l'implantation géographique de ses services et d'une optimisation de leurs dépenses de fonctionnement. Elle augmentera légèrement ses redevances tout en restant la moins chère par rapport aux pays limitrophes. Ces efforts lui permettront de dégager des ressources pour financer les investissements qui sont indispensables à la modernisation des outils de gestion du trafic aérien dans le but de relever le défi technologique du Ciel unique. Elle participera également à la réduction du déficit public en accélérant le désendettement du budget annexe de l'aviation civile, qui passe à 107 millions d'euros en 2016 contre 57 millions d'euros en 2015. Ce qui répond aux observations, ou encouragements, de la Cour des comptes.

Vous m'avez posé des questions sur la situation et sur la défense du pavillon français. Il est en concurrence avec les compagnies à bas prix comme avec les compagnies du Golfe. Même si le marché aérien est en croissance, notre pavillon y a reculé de 10 % en dix ans. Le modèle des compagnies à bas prix n'est pas contestable, car il est approuvé par le consommateur et répond à ses besoins de mobilité. Toutefois, il faut respecter les règles sociales. Le Gouvernement est très attentif à la situation dans certaines compagnies, qui se situent parfois à la marge du droit applicable. Une condamnation importante a été prononcée contre la compagnie Ryanair.

Un rapport américain sur les compagnies du Golfe a également été cité, qui soulève de vraies questions. La France, avec le soutien de l'Allemagne puis d'autres pays, a sollicité la Commission européenne pour qu'elle engage avec les pays du Golfe une négociation globale visant à assurer des règles de concurrence loyale. S'appuyant sur cette initiative, la Commission européenne devrait proposer en début d'année prochaine au Conseil des ministres la définition d'un mandat de négociation. Un accord bilatéral entre la France et le Sultanat d'Oman existe déjà, qui pourra peut-être servir d'inspiration.

Cela ne peut être cependant la seule réponse à la situation d'Air France, qui accuse un différentiel de coût de 15 % à 20 % avec les autres compagnies européennes. La solution réside dans un dialogue social constructif ; c'est tout ce que le Gouvernement souhaite. Il a montré la voie, en mettant en oeuvre une partie des recommandations contenues dans le rapport de Bruno Le Roux : la taxe de correspondance a été supprimée pour moitié depuis avril 2014 et le restera pour l'ensemble de cette année. Par ailleurs, Air France bénéficie, comme les autres entreprises françaises, du crédit d'impôt emploi compétitivité (CICE), ce qui représente 66 millions d'euros chaque année. Ceux qui s'interrogeaient sur l'effort de l'État trouveront ici une réponse : 90 millions d'euros sur deux ans grâce à l'allégement de la taxe de correspondance, plus les 66 millions d'euros du CICE, c'est déjà un geste qui permet d'aller dans le bon sens.

En ce qui concerne la mer et la pêche, l'économie maritime occupe, votre rapporteur l'a rappelé, une place essentielle dans l'activité de la France : 310 000 emplois directs et un chiffre d'affaires de 69 milliards d'euros.

Le Gouvernement a pris des engagements importants concernant la politique maritime de notre pays, notamment lors du dernier comité interministériel à la mer réuni le 22 octobre dernier à Boulogne sur mer. Ces mesures ont été prises au bénéfice de l'ensemble des secteurs qui constituent notre économie maritime. Il s'agit d'abord du renforcement de la compétitivité des grands ports maritimes français, en leur donnant de nouvelles perspectives de développement et d'attractivité. Il s'agit ensuite de la mise en place de mesures afin d'assurer le renouvellement de la flotte de commerce pour s'adapter aux conditions du marché mondial.

À ce titre, il est prévu d'aligner les dispositifs d'assurance-crédit sur les conditions offertes par la concurrence étrangère pour le renouvellement des flottes. Ce mécanisme, communément appelé « COFACE inversé », permet à nos entreprises industrielles de bénéficier des mêmes conditions de garantie. Les dispositifs de garantie à la construction navale seront reconduits ; nous avons également prévu d'organiser un exercice pilote avec la Banque européenne d'investissement sur le verdissement et de prolonger l'appel à projet concernant les ferries propres.

D'autres dispositions sont prévues par ailleurs concernant le transport de produit pétrolier sous pavillon français. Un décret sera prochainement publié, pour lequel des consultations sont en cours. Il n'est pas sans poser quelques difficultés : certains partenaires voudraient qu'ils soient un peu plus précis afin de garantir le recours à des marins français. Mais, comme je l'ai dit hier à Marseille aux assises de la mer, le cadre doit respecter les règles européennes. La finalisation des attentes des partenaires relève ensuite des relations contractuelles.

Autre sujet important : l'affirmation d'une ambition aquacole pour la France, afin de réduire notre dépendance aux importations en produits de la mer qui représentent aujourd'hui 80 % de ce que nous consommons. Il faut bien voir que dans le cadre de la politique commune de la pêche, l'application du principe du rendement maximum durable (RMD) empêche de pêcher plus, en vue de conserver la ressource. La seule réponse possible pour gagner des marges de manoeuvre est donc le développement de l'aquaculture. En ce domaine, nous avons encore des efforts à faire, y compris dans le domaine de la réglementation et de la maîtrise spatiale.

Je citerai encore l'adoption d'une feuille de route sur les grands fonds marins, nouvelle frontière de notre espace maritime, et le renforcement de nos capacités de contrôle dans nos aires marines protégées.

D'autres mesures concernent l'adaptation de nos outils de sûreté et de sécurité maritimes aux nouveaux enjeux. Enfin, le CIMER a permis de mettre en avant la nécessité de valoriser le potentiel considérable des espaces maritimes ultramarins, en assurant le renouvellement des moyens maritimes permettant leur surveillance et en soutenant la mise en place d'une stratégie spécifique pour nos ports d'outre-mer.

Par ailleurs, certaines dispositions intéressant également la croissance bleue ont vocation à être mises en place dans le cadre du plan d'action que nous portons avec Ségolène Royal.

Votre rapporteur a souligné le caractère stratégique de la formation maritime ; notre pays dispose en la matière de nombreux atouts. Ces métiers recèlent un fort potentiel d'emplois et offrent de belles perspectives de rémunération, il faut le rappeler.

S'agissant de la gouvernance de la mer, je souhaite préciser que le décret du 27 octobre dernier relatif aux attributions, à la composition et au fonctionnement du Conseil national de la mer et des littoraux nous permettra de disposer d'un cadre de concertation modernisé pour les sujets transversaux intéressant ce secteur. Plus largement, le Premier ministre a souhaité, dans le prolongement du dernier CIMER, qu'une mission soit rapidement engagée afin de réfléchir aux évolutions souhaitables de notre gouvernance dans ce domaine. C'est d'ailleurs pour cette raison que la nomination du délégué à la mer et au littoral a été reportée.

Je souhaite aussi avancer sur la question du dumping social. Nous avons été aussi loin que possible à travers le dispositif de l'État d'accueil mis en oeuvre depuis quelques mois pour le cabotage et les activités de services. Son application doit s'amplifier. Je souhaite initier un mouvement des pays de l'Union européenne pour améliorer le cadre communautaire qui s'applique aujourd'hui au cabotage et qui n'est pas assez protecteur de l'emploi des marins européens.

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