Intervention de Antoine Herth

Séance en hémicycle du 17 novembre 2015 à 15h00
Prévention des risques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Herth :

J’ai souvent eu l’occasion d’intervenir les dispositions relatives aux produits biocides – sujet visé à l’article 15 –, lorsque nous avons débattu de l’autorisation de la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques. Nous avons largement critiqué cet article et avons souhaité sa suppression : il comporte des dispositions qui n’ont pas lieu d’être puisqu’elles ne sont pas prévues par le règlement. Il s’agit donc d’une sur-transposition des textes européens.

En effet ce règlement ne prévoit pas de dispositions contraignantes quant à la désignation de l’autorité nationale compétente pour la délivrance des autorisations de mise sur le marché des biocides, justement parce qu’il s’agit d’une autorisation nationale attribuée aux États membres à côté de l’autorisation de mise sur le marché délivré par l’agence européenne.

La majorité profite de la référence à ce règlement pour imposer une modification à nos yeux majeure dans la pratique politique des institutions de la Ve République, qui est celle de confier une décision politique à un organisme indépendant, en l’occurrence l’ANSES, dont le rôle est de réaliser des études techniques, d’évaluer et d’émettre des avis, alors que la décision politique doit rester au politique. Le texte prévoit en effet de demander à l’ANSES d’apprécier et de gérer à la fois l’équilibre entre les risques et les bénéfices et l’application du principe de précaution, notions éminemment politiques qui relèvent du seul Gouvernement contrôlé par les électeurs et les députés.

Or, comme elle l’a fait pour les produits phytosanitaires dans la loi de modernisation agricole, la majorité veut maintenant confier toute la gestion des produits biocides à l’ANSES.

Enfin, vous ne serez pas étonné de mon intérêt pour l’article 18, qui vise les dispositions relatives à l’encadrement de la mise en culture d’organismes génétiquement modifiés. J’ai en effet été le rapporteur du précédent texte de loi sur les dispositions de mise en culture des OGM.

La modification de la réglementation européenne permet enfin à la France de demander au pétitionnaire d’une demande européenne d’autorisation de mise sur le marché d’un OGM de ne pas inclure le territoire national pour ce qui concerne la culture. En cas de refus du pétitionnaire, la France pourra demander à la Commission d’exclure le territoire national de la portée géographique de l’autorisation ou de restreindre ou interdire la mise en culture de l’OGM sur le territoire national pour des motifs très larges liés notamment à la politique de l’environnement, à l’aménagement du territoire, à l’affectation des sols ou aux incidences socio-économiques, sans avoir à prouver les dangers réels ou supposés des produits interdits.

S’il s’agit là – je le répète – d’un changement majeur dans la législation européenne, l’article 18 va encore plus loin, puisqu’il organise un pouvoir d’interdiction rétroactive.

Il n’est pas question ici de revenir sur l’épineux sujet des OGM et nous ne pouvons que nous réjouir du caractère apaisé des débats sur ce texte. Il convient simplement de constater que l’Union européenne renonce à toute harmonisation dans ce domaine et laisse les États membres libres de décider s’ils veulent ou non cultiver des OGM.

Attention toutefois à respecter les avertissements de la directive elle-même, notamment le considérant 16, qui précise que « les dispositions prévues ne doivent concerner que les cultures et ne pas avoir d’effet sur la libre circulation et la libre importation de semences et de matériel de multiplication végétale génétiquement modifiés », et, surtout le considérant 19, selon lequel « les décisions des États membres visant à restreindre ou interdire la culture des OGM sur tout ou partie de leur territoire ne devraient pas entraver la recherche sur les biotechnologies ». Ces deux points nous posent problème.

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