Intervention de Jacques Krabal

Séance en hémicycle du 17 novembre 2015 à 15h00
Prévention des risques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

Monsieur le président, le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, madame la rapporteure, chers collègues, le projet de loi qui nous réunit ce soir est relatif à la transposition en droit interne de plusieurs textes européens rassemblés sous une seule thématique de la prévention des risques.

Il nous parvient après l’accord établi en commission mixte paritaire, un accord raisonnable dont les députés du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste se félicitent.

C’est donc la dernière étape du parcours législatif de ce texte, et nous ne ferons pas durer le suspense : nous annonçons dès maintenant que nous le voterons, car il constitue globalement une avancée considérable dans le domaine de la prévention des risques.

Nous le voterons aussi car nous ne devons pas perdre de temps sur ces sujets. La méthode des projets de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, les DDADUE, permet de gagner un temps précieux ; elle est devenue courante depuis plusieurs années ; elle est utile et efficace. Depuis quelques années, les transpositions effectuées sous cette forme nous permettent de bâtir ensemble l’édifice juridique européen commun que les députés du groupe RRDP soutiennent.

Il s’agit du septième « DDADUE » que nous examinons dans cet hémicycle depuis le début de la législature, le deuxième pour la commission du développement durable après la loi du 16 juillet 2013. C’est un exercice auquel nous sommes désormais rompus.

Transposer des directives européennes dans le domaine de la prévention des risques nous paraît d’autant plus fécond que l’Union européenne est clairement l’échelon le plus pertinent. Cela dit, ce n’est jamais anodin. Le texte réforme en effet profondément le code de l’environnement, le code des transports et le code minier, en attendant l’examen du projet de loi spécifique à la réforme du code minier, toujours dans sa phase préparatoire. Un jour, peut-être…

Sur la méthode, je voudrais aussi saluer la création d’un comité de liaison avec le Parlement pour les transpositions. Cela participe du renforcement, au moins formel, de la contribution des parlementaires à l’écriture du projet de loi, notamment pour définir le périmètre le plus cohérent et approfondir des thématiques.

L’intégration de la législation européenne dans l’ordre juridique national dans les délais impartis est une obligation nécessaire et inhérente à l’appartenance de la France à l’Union européenne. Tout manquement à ces obligations nous exposerait d’ailleurs à des sanctions de la Cour de justice de l’Union européenne.

L’adoption du présent texte est un signe d’autant plus appréciable pour la protection de l’environnement que la COP21 va débuter dans quelques jours. C’est un engagement supplémentaire en faveur de la lutte contre le dérèglement climatique.

Une législation efficace pour améliorer la prévention des risques marque la volonté politique européenne de s’engager avec détermination en faveur d’un développement durable.

Pour prévenir les risques, nous disposons de toute une filière, constituée d’acteurs insuffisamment connus ou reconnus. Permettez-moi de citer, en France, dans différents secteurs, des institutions de très haut niveau comme l’Institut national de veille sanitaire – l’INVS –, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – l’IRSN –, l’Autorité de sûreté nucléaire – l’ASN –, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – l’ANSES –, ou encore le remarquable Institut national de l’environnement industriel et des risques – l’INERIS –, grâce auxquels la France est certainement le pays le plus à la pointe dans le monde en matière d’études et d’analyse des risques. L’évaluation la plus fine possible des risques est d’ailleurs essentielle : si le nombre d’accidents et de catastrophes est en augmentation, il ne s’agit pas non plus d’éliminer tous les risques, en paralysant notre économie et notre société. Deux exigences se contredisent : évaluer les niveaux des risques et les minimiser autant se faire se peut pour éviter les accidents et les catastrophes. C’est un calibrage fin, consistant à prévenir au mieux sans normes inutiles et sans contrainte superflue.

Le projet de loi s’articule autour de quatre titres principaux. Le titre Ier concerne la sécurité des opérations pétrolières et gazières. Il a pour origine la catastrophe ayant frappé la plateforme de forage Deepwater Horizon en 2010. Personne n’a oublié cette catastrophe écologique sans précédent : 780 millions de litres de pétrole furent répandus en mer. La France est directement concernée en raison de ses activités offshore en Guyane et sur les pôles. Ces opérations pétrolières et gazières seront plus sécurisées ; les pécheurs seront davantage protégés ; le public sera mieux informé sur les risques ; les indemnisations des dommages éventuels seront plus rapides ; enfin, le régime de responsabilité sans faute sera appliqué pour la réparation. Par ailleurs, l’article 9, supprimé lors de la lecture au Sénat, a été réintroduit en CMP sur proposition de notre rapporteure, ce dont il faut se féliciter.

Le titre II concerne les produits et équipements à risques, plus précisément les équipements marins et les équipements sous pression. Il s’agit de moderniser notre droit pour permettre la certification de nouveaux équipements, l’interdiction de certains produits très dangereux sur notre territoire, la mise en place des procédures de contrôle préalable et le renforcement des sanctions en cas de manquement.

Le titre III est consacré aux gaz à effet de serre fluorés et aux biocides, des produits chimiques nocifs que nous devons, entre autres choses, réguler et réduire, en particulier les gaz à effet de serre fluorés utilisés dans les systèmes de climatisation. L’objectif est de les réduire de 80 % dans les quinze ans à venir en leur substituant des fluides moins nocifs.

Enfin, le titre IV est, si ce n’est le plus polémique, à tout le moins le plus discuté : il est consacré aux OGM. Il confère la possibilité aux États d’interdire ou de restreindre la culture des OGM, ce qui fait débat. Il permet de les interdire tout en laissant une liberté de manoeuvre, ce qui est peut-être préjudiciable, car tous les États n’ont pas les mêmes armes économiques et démocratiques pour faire face aux pressions des industriels qui cherchent à développer les cultures d’OGM. Au Sénat comme à l’Assemblée, les OGM constituent le principal sujet de débat de ce texte. C’est probablement lié au fait que notre marge de manoeuvre, en notre qualité de législateurs, est limitée. Plusieurs corrections rédactionnelles, plusieurs clarifications ont été adoptées lors de l’examen dans les deux chambres. Ces corrections ont nettement amélioré la lisibilité, et donc l’intelligibilité du texte, qui constitue une composante essentielle de la sécurité juridique, comme l’a souligné le Conseil d’État dans son rapport public de 2006. Si les amendements adoptés au Sénat comme à l’Assemblée introduisent principalement des corrections formelles, ils n’en demeurent pas moins importants et permettront de lever des ambiguïtés que la simple traduction des directives laissait en suspens.

À titre personnel, je le répète, je suis opposé aux OGM. Nous sommes nombreux sur ces bancs, du moins je l’espère, à regretter ce recul de l’Union européenne en la matière. Ce sentiment fut partagé en commission, à l’Assemblée. Nous déplorons que l’Union européenne n’ait pas réussi à trouver une position commune sur cette question pour limiter plus fortement, voire interdire les OGM dans l’ensemble des États membres.

Au-delà de la question d’être pour ou contre les OGM, cette législation va – c’est une évidence – être la source de contentieux. Elle va faciliter l’importation d’OGM sur notre territoire. Elle présente donc des risques importants de dissémination et, surtout, elle va de nouveau accentuer les distorsions de concurrence et affaiblir nos agriculteurs.

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