Intervention de Philippe Duron

Séance en hémicycle du 17 novembre 2015 à 15h00
Manutention dans les ports maritimes — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Duron, rapporteur de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, monsieur le rapporteur pour avis, chers collègues, l’Assemblée nationale a examiné en juin dernier une proposition de loi tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes signée par l’ensemble des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen. Le Sénat a examiné le texte au mois d’octobre et la commission mixte paritaire, réunie mardi dernier, a abouti à un texte commun qui concrétise une concertation ayant réuni tous les acteurs de la manutention portuaire. Il trouve son origine, comme vous le savez, dans un conflit qui a éclaté à Port-la-Nouvelle en 2013 au sujet du non-respect des règles relatives à l’emploi des ouvriers dockers par un manutentionnaire local.

Cette affaire a entraîné une prise de conscience des difficultés d’interprétation des textes sur ce sujet et un groupe de travail a été mis en place. Il a rassemblé autour de Mme Martine Bonny, inspectrice générale de l’écologie et du développement durable, l’ensemble des acteurs du secteur de la manutention portuaire : syndicats de dockers, représentants des entreprises de manutention, représentants des entreprises utilisatrices de transport de fret, autorités portuaires, membres de l’administration en charge du transport maritime et personnalités qualifiées. Il faut souligner ici l’esprit constructif et la qualité du travail effectué dans le cadre institué par M. le secrétaire d’État chargé des transports. Le rapport publié à l’issue du processus de concertation peut être considéré comme une véritable étude d’impact de la proposition de loi.

Je ne rappellerai pas ici les spécificités du régime d’emploi des ouvriers dockers défini par la loi du 6 septembre 1947 et modifié en 1992 et 2008 par les lois Le Drian et Bussereau. Ces sujets ont été abondamment évoqués en première lecture. Je me contenterai de rappeler les deux axes qui structurent la proposition de loi. En premier lieu, le texte vise à améliorer la rédaction des articles du code des transports définissant le régime d’emploi des ouvriers dockers. En effet, le conflit de Port-la-Nouvelle a fait craindre aux acteurs portuaires que la disparition du dernier docker intermittent sur un port donné n’y implique la suppression de la priorité d’embauche dont y bénéficient et les dockers professionnels mensualisés créés par la loi du 9 juin 1992 et les dockers occasionnels.

Or la disparition des dockers intermittents est programmée. Il n’en existe plus que 149 dont 83 seulement sont opérationnels. Il fallait donc modifier la réglementation. Tel est le sens des articles 1 à 5 et des articles 7 et 8 de la proposition de loi qui lèvent toute ambiguïté à ce sujet. Il n’est désormais plus possible de considérer qu’il existe une corrélation entre l’existence d’un régime de priorité d’emploi des ouvriers dockers et la présence de dockers intermittents sur une place portuaire.

En second lieu, le texte vise à clarifier le périmètre de la priorité d’emploi des dockers. Tel est l’objet des articles 6 et 9. Cette évolution est d’autant plus nécessaire que la loi du 4 juillet 2008 a entraîné d’importants changements dans le domaine de la construction et de la gestion des outillages en distinguant l’infrastructure de la superstructure, c’est-à-dire les quais, laissés à des opérateurs privés, ce qui a rendu obsolètes les notions employées jusqu’alors pour définir le périmètre d’activité des dockers.

Le texte constitue aussi l’occasion de réaffirmer que l’existence d’une priorité d’embauche des dockers pour certaines tâches est justifiée par l’exigence de sécurité des personnes et des biens. Par ailleurs, un mécanisme novateur a été créé pour traiter du cas des travaux de manutention portuaire effectués pour le compte propre du titulaire d’un titre d’occupation domaniale comportant le bord à quai. La loi prévoit désormais que les conditions dans lesquelles ils sont réalisés sont fixées conformément à une charte nationale, c’est-à-dire un droit souple. Celle-ci doit favoriser le dialogue entre les acteurs portuaires au sujet des projets de nouvelles implantations industrielles.

Lors de son examen à l’Assemblée, la proposition de loi a fait l’objet d’une dizaine d’amendements rédactionnels. Un article 9 a par ailleurs été créé. Il prévoit la remise au Parlement, dans un délai de deux ans, d’un rapport sur la mise en oeuvre de la charte. Il s’agit d’évaluer une nouvelle forme de droit sur laquelle nous manquons peut-être un peu de recul. La proposition de loi a été adoptée à l’unanimité en première lecture. Il en est allé autrement au Sénat. Certains articles y ont été votés conforme. Il s’agit des articles 1 à 4 et de l’article 8. Mais le Sénat, considérant que la proposition de loi doit se limiter à des corrections rédactionnelles, a supprimé les articles 6 et 9 et modifié la rédaction des articles 5 et 7. Nous avons eu l’occasion de débattre en commission mixte paritaire des raisons de ces modifications.

Je tiens ici à rassurer nos collègues de l’autre assemblée : le texte ne doit susciter aucune crainte. Tout d’abord, contrairement à ce que certains pensent, il existe déjà une priorité d’embauche des dockers occasionnels semblable à celle applicable aux dockers professionnels. L’équilibre des textes n’est donc pas bouleversé par les articles 5 et 7. Je me réjouis que la commission mixte paritaire ait voté leur rétablissement dans leur rédaction issue des débats de l’Assemblée nationale. Par ailleurs, la charte est un instrument souple qui s’adaptera à la réalité de chaque port. À ce sujet, je suis heureux de constater que les articles 6 et 9 ont eux aussi été rétablis par la commission mixte paritaire dans leur rédaction résultant des débats de l’Assemblée. Enfin, le texte vise à renforcer la stabilité sociale dans nos ports et à en améliorer la compétitivité, car leurs résultats progressent moins vite que ceux des ports européens concurrents. Ce point a fait l’objet d’un consensus du groupe de travail présidé par Mme Bonny. C’est pourquoi je vous invite, chers collègues, à approuver le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire.

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