Intervention de Véronique Massonneau

Séance en hémicycle du 18 novembre 2015 à 15h00
Protection de l'enfant — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Massonneau :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, chers collègues, je pense comme vous à celles et ceux qui manquent, à celles et ceux qui souffrent, à celles et ceux qui aident, à celles et ceux qui soignent, à celles et ceux qui enquêtent, à celles et ceux qui protègent et à celles et ceux, si nombreux, qui pleurent mais sont debout. Au lendemain de ces trois jours de deuil national, il est de notre responsabilité de poursuivre tout de même notre action de parlementaires, particulièrement en faveur des plus fragiles. Mais mes premiers mots vont bien sûr au soutien aux victimes des atrocités qui se sont déroulées à Paris et en région parisienne, ainsi qu’à leurs proches. Notre émotion est immense et notre unité précieuse. Je tiens à saluer le courage des nombreuses personnes qui ont contribué aux opérations médicales ou aux opérations de sécurité.

Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi sur la protection de l’enfance. C’est une mission importante de la puissance publique, à l’égard d’enfants déjà malmenés par la vie. L’enjeu est de leur offrir une protection nécessaire et adaptée, des conditions de vie dignes ainsi que la garantie du respect de leurs droits. S’agissant d’enfants, ce sont donc bien plus que les seuls besoins matériels ou les droits à la santé et à la sécurité qui sont en jeu mais, bien plus largement et parfois plus essentiellement, les besoins affectifs, intellectuels ou encore sociaux.

Il est dès lors indispensable de définir un véritable parcours d’accompagnement pour ces enfants dont le début de la vie a été douloureux. En effet, l’enfance est une période déterminante dans la construction d’un être humain. Il est donc nécessaire de pallier les troubles causés par une enfance difficile à l’aide d’un véritable accompagnement qui leur permette d’entrevoir un avenir meilleur.

Les services de protection de l’enfance ont la charge de près de 300 000 enfants et jeunes. Près de 7 milliards d’euros sont investis chaque année par nos départements en faveur de cette mission d’action sociale. Actions de prévention, de présence éducative, soutien aux parents en difficulté, mais aussi, bien sûr, placement de certains enfants : ces missions essentielles ont aujourd’hui besoin d’être renforcées.

En effet, de trop nombreux cas de maltraitances ne sont encore détectés que trop tardivement par ces services. Selon les associations, 100 000 enfants seraient, au moment où nous débattons de ce texte, en danger sur notre territoire, dont 20 000 physiquement maltraités. Il s’agit donc de prendre sans tarder les mesures nécessaires afin de pallier les difficultés rencontrées encore aujourd’hui par les services de protection de l’enfance, à commencer par l’insuffisance de la formation des professionnels concernés, qu’il s’agisse du personnel éducatif ou médical. De plus, certains secteurs d’intervention ont encore du mal à travailler ensemble alors que leur coopération permettrait de mieux identifier les situations à risque. Enfin, il demeure de fortes disparités territoriales.

Plusieurs dispositions contenues dans ce texte constituent autant de réponses adéquates aux enjeux que je viens d’évoquer. Ainsi, grâce à la diversification des modes d’accueil et d’accompagnement des enfants, la particularité de chaque situation aura plus de chances de trouver la réponse la mieux adaptée. La possibilité offerte aux parents de très jeunes enfants ou d’enfants à naître d’être accueillis en centre parental pour favoriser les premiers liens d’attachement et garantir un soutien éducatif me semble également devoir être soulignée. L’accompagnement des parents, parfois démunis face à la tâche éducative, est aussi une très bonne mesure. Les écologistes sont très sensibles à l’aide à la parentalité car la protection de l’enfant commence bien avant les constats alarmants de dysfonctionnements. Il faut encore mentionner le développement de l’accueil par un tiers, à titre bénévole, d’un enfant pris en charge par l’aide sociale à l’enfance lorsque c’est dans l’intérêt de ce dernier : la mention de ces dispositions, introduites par la rapporteure, est d’ailleurs l’occasion de saluer le travail qu’elle a accompli sur ce texte. Le suivi de l’enfant et de sa mère ayant accouché dans le secret avant de se rétracter est une autre disposition de bon sens, protectrice pour l’enfant et rassurante pour la mère. Nous veillerons à ce que les moyens alloués à l’application de cette mesure soient suffisants dans les faits.

Mais la protection de l’enfance recouvre aussi le suivi jusqu’à l’âge adulte. À cet égard, la stabilisation des parcours scolaires et universitaires, ainsi que l’accompagnement des mineurs vers l’autonomie pour favoriser leur insertion sociale, est une mission incontournable vis-à-vis de ces jeunes déjà fragilisés par la vie et une nécessité pour garantir la cohésion sociale.

Enfin, le travail parlementaire a permis d’avancer utilement sur la question controversée des tests osseux sur les mineurs étrangers. Un amendement de notre collègue Jeanine Dubié, sous-amendé par la rapporteure, a permis d’encadrer très fortement le recours à cette pratique et nous nous en félicitons. Ces tests ne seront donc possibles que sur décision de l’autorité judiciaire et après accord de l’intéressé. De plus, les marges d’erreurs devront être précisées et le doute bénéficiera au jeune. Toutefois, au regard des questions éthiques posées par cette technique, par ailleurs coûteuse et peu fiable du point de vue de la capacité à déterminer l’âge réel des personnes concernées, mon collègue Sergio Coronado proposera, par voie d’amendement, d’écarter totalement tout recours à ce test.

Vous l’aurez compris, nous abordons l’examen de cette proposition de loi avec le sérieux requis par un sujet aussi important et délicat.

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