Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du 19 novembre 2015 à 9h30
Prorogation de l'état d'urgence — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, depuis près d’une semaine, les Français sont meurtris par la deuxième série d’attentats que subit notre pays en dix mois. Le choc est si profond, brutal et inquiétant que nos concitoyens sont partagés entre la douleur, la colère et l’exigence. La douleur, nous la partageons tous. La colère est tournée vers les barbares qui nous font la guerre. L’exigence s’adresse à nous, représentants de notre nation dans l’épreuve. Aussi nous incombe-t-il de surmonter au plus vite nos émotions et de garder notre sang-froid afin de réfléchir, débattre et agir avec une froide et totale détermination en mettant tout en oeuvre pour éviter de tels drames à l’avenir.

Les parlementaires, élus locaux et responsables politiques que nous sommes ont tous la responsabilité d’être unis dans l’épreuve que nous traversons. Elle n’efface rien de nos différences ni de nos divergences face aux autres défis que notre pays doit relever. Elle n’abolit en rien le droit de débattre, même avec vigueur, de tout ce qui relève de notre vie publique, au contraire : c’est au nom de ce droit de débattre, d’être différents et en désaccord tout en acceptant de vivre et de décider ensemble, que nous devons mener le combat commun contre ceux qui voudraient briser notre démocratie et les valeurs humanistes qu’elle incarne. Dans ces circonstances, seuls notre raison, l’amour de notre pays et les valeurs que nous partageons doivent nous guider dans notre impérieuse mission.

Si nous nous divisons, nous diviserons les Français. Tel est d’ailleurs le principal objectif de la guerre que nous livre Daech : nous frapper en plein coeur afin d’importer chez nous la peur, la colère et la haine puis faire en sorte que nous les déportions sur nos propres compatriotes en prétextant les cultures, les origines, les religions et les communautés. Face à cette menace, notre réponse doit impérativement être l’unité, le rassemblement, la cohésion et la détermination. Mais, monsieur le Premier ministre, l’unité nationale ne se décrète pas. Elle doit se construire chaque jour en acceptant un débat respectueux qui seul permettra de formuler ensemble des réponses au défi qui nous est lancé. Disons le clairement, le rendez-vous de l’unité nationale, nous l’avons raté en janvier après les premiers attentats. La cause en est le manque d’habitude de nous écouter et de nous comprendre, entretenu par des institutions trop binaires, mais aussi l’insuffisante prise de conscience collective de l’ampleur de la guerre qui nous est livrée.

C’est bien désormais sur ce point que porte l’exigence des Français à notre endroit. Nous faisons face à un ennemi d’une nature exceptionnelle, peu visible et tentaculaire. La capacité d’infiltration du djihadisme est globale et mondialisée. Ce terrorisme ne connaît ni frontières ni limites. Sa menace plane sur l’ensemble de la planète et naturellement sur notre territoire, sur toutes les villes et tous les villages, et peut surgir derrière chaque écran d’ordinateur ou de téléphone. En effet, le numérique est désormais la première arme des terroristes et internet le principal vecteur d’une idéologie totalitaire prenant prétexte d’une religion en la dévoyant au service d’un projet politique nihiliste consistant à asservir notre conception de l’homme et de ses droits les plus fondamentaux.

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