Intervention de Eva Sas

Séance en hémicycle du 8 décembre 2015 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2015 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEva Sas :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, madame la rapporteure générale, chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative avait été annoncé comme celui de la COP21, celui de la transition énergétique, celui de la fiscalité écologique. Malheureusement, comme nous vous l’avions fait remarquer dès la discussion générale, ce collectif est loin d’être à la hauteur des enjeux cruciaux de ce sommet pour le climat.

Les articles 11 et 12, présentés comme ceux devant répondre aux enjeux de la transition énergétique, ne poursuivent en fait que deux objectifs : d’une part, limiter la progression du prix de l’électricité, grâce au financement de la contribution au service public de l’électricité par la contribution climat énergie, et d’autre part, trouver des débouchés à la production agricole au travers d’un encouragement fiscal au carburant E10 contenant des agrocarburants.

À cette déception pour les écologistes, s’est ajoutée la minoration des montants remboursés au titre de l’indemnité kilométrique vélo, une mesure pourtant votée dans le cadre de la loi de transition énergétique, et plus largement, le refus du Gouvernement d’avancer sur le sujet des transports. Je pense notamment aux mesures que nous vous avons proposées et que vous n’avez pas soutenues pour limiter le trafic des poids lourds, de plus en plus nombreux sur nos routes, mais de plus en plus épargnés par la fiscalité, puisqu’étonnamment, la contribution climat énergie appliquée aux ménages ne s’applique pas aux poids lourds.

Les ambitions d’une politique nationale de report modal, prônée à l’époque par le Grenelle de l’environnement, semblent pour l’instant abandonnées, et pourtant notre pays n’a jamais eu autant besoin de développer les modes de transport alternatifs à la route, pour les passagers comme pour les marchandises. Transports collectifs, fret ferroviaire, transport fluvial, circulations douces sont l’avenir des transports et notre fiscalité doit leur donner la priorité.

On notera toutefois les aspects positifs de ce PLFR : la progression de la contribution climat énergie fixée à 30,50 euros en 2017, conformément à la trajectoire définie par la loi de transition énergétique, et la création du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ». Si celui-ci n’est pour l’instant qu’une manière de faire financer la contribution au service public de l’électricité par les autres énergies via la contribution climat énergie, c’est un outil qui peut être utile à l’avenir pour mettre en oeuvre la transition énergétique. Les écologistes ont toujours défendu le principe pollueur-payeur, et l’affectation des taxes sur les comportements polluants au financement des alternatives.

C’est le principe de ce compte d’affectation spéciale, qui sécurise le financement des énergies renouvelables. Espérons qu’à l’avenir, la fiscalité sur les comportements polluants puisse être étendue de manière cohérente au trafic aérien et routier, et que puissent être financés, au-delà des seules énergies renouvelables, les économies d’énergie et les transports collectifs.

Ce projet de loi de finances rectificative acte également des avancées importantes issues du débat parlementaire, comme la neutralisation de l’avantage au diesel pour les véhicules de société, les sociétés pouvant désormais récupérer également la TVA sur l’essence, et surtout la publicité du reporting pays par pays des grandes entreprises qui seront, à partir de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires, conduites à rendre publiques, selon une répartition par pays – y compris donc dans les paradis fiscaux – des informations telles que le chiffre d’affaires, les effectifs, les bénéfices et les impôts payés. C’est une avancée majeure pour la lutte contre l’évasion fiscale et l’optimisation fiscale agressive de certaines entreprises, qui font tout aujourd’hui pour échapper à l’impôt et refusent ainsi de contribuer à l’effort public.

Ce sont des avancées, mais elles apparaissent bien fragiles et incertaines à l’heure où nous devons, comme le disait notre collègue Jean-Noël Carpentier, faire mieux et plus vite contre les fractures sociales qui gangrènent notre société. Force est de constater que ce collectif budgétaire n’est à la hauteur ni des enjeux sociaux, ni des enjeux écologiques qui sont devant nous. Le groupe écolo partagera donc aujourd’hui son vote, sur ce projet de loi de finances rectificative, entre le pour et l’abstention.

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