Intervention de Marie-Françoise Bechtel

Réunion du 9 décembre 2015 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Françoise Bechtel :

Il est légitime que nous nous concentrions, par le biais d'un appareil législatif constitué d'un texte organique et d'un texte ordinaire, sur l'élection présidentielle, car le dépoussiérage a beaucoup tardé et le Conseil constitutionnel a avancé des propositions précises depuis longtemps. En outre, l'élection présidentielle au suffrage universel direct s'avère radicalement différente des autres scrutins nationaux et se distingue également des autres systèmes démocratiques, à l'exception de celui des États-Unis, même si le régime américain diverge fortement du nôtre. Cette élection ordonne toute la vie politique française, l'instauration du quinquennat et d'un nouveau calendrier électoral dans lequel les législatives suivent immédiatement la présidentielle ayant renforcé cette prépondérance. Cela a favorisé le retour du régime des partis, le développement actuel d'un tripartisme renforçant les paradoxes de cette situation, la Cinquième République ayant été conçue pour mettre un terme à la prépondérance des partis. Nous devons nous montrer prudents dans notre action, même dans des matières qui ne semblent que formelles et procédurales.

J'approuve les propos de notre collègue Marc Dolez sur la publicité des parrainages. Cette réforme n'avantagera pas les petits partis, car, si la transparence peut paraître souhaitable, elle favorisera en l'espèce les pressions des appareils des grands partis.

Le passage à une équité assumée du temps de parole dans la période intermédiaire pose la question de l'aura véritable du CSA qui devra la faire respecter. Il s'agit d'un décentrement des pouvoirs, puisque l'on ôte à la loi la fonction d'organisatrice de la très délicate garantie de l'égalité et de l'équité, pour la conférer au CSA. Cette autorité administrative indépendante a-t-elle les moyens législatifs et jouit-elle de suffisamment de légitimité pour assurer ce contrôle ?

À la lumière du débat qui vient d'avoir lieu, je m'interroge encore davantage sur l'opportunité de réduire à six mois le délai de computation des dépenses de campagne. Cette nouvelle règle empêcherait certes le président en titre et candidat à l'élection présidentielle d'utiliser les moyens de l'État les plus tapageurs, mais le délai d'un an l'entrave dans la mobilisation des moyens les plus invisibles. Il y a donc des éléments qui plaident pour l'adoption de cette mesure et d'autres qui engagent à la retenue. L'intérêt de cette réforme réside dans l'arrêt du « fignolage » – ce que le doyen Vedel dénonçait comme l'agrandissement permanent de la boîte à outils –, mais mon avis n'est pas encore arrêté. En la matière comme en tant d'autres, écouter les arguments des uns et des autres avant de se forger une opinion me paraît une bonne politique.

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