Intervention de Corinne Erhel

Séance en hémicycle du 19 janvier 2016 à 15h00
République numérique — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Erhel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques :

Nous ne cessons de le répéter, le numérique est un formidable levier de croissance, de progrès social et d’emploi, dont notre pays a su s’emparer et dont il doit désormais accompagner le développement et le déploiement. Très attendu, le projet de loi pour une République numérique, que nous examinons aujourd’hui, s’inscrit dans la continuité de la réflexion et de la démarche volontaire engagées par le Gouvernement depuis 2012.

Il donne au législateur l’opportunité de s’emparer de sujets clés, alors que le Parlement, et tout particulièrement la commission des affaires économiques, s’implique depuis plusieurs années pour la définition d’une stratégie numérique française audacieuse et l’émergence de propositions innovantes. Dans cette logique, il me paraît essentiel que le travail mené par l’ensemble des commissions, en particulier par celle des affaires économiques, qui s’était saisie pour avis de plus de trente articles et dont je suis rapporteure, soit écouté et pris en compte.

Je souscris pleinement aux objectifs poursuivis par ce texte en matière d’open data et, plus globalement, de circulation des données et du savoir, de renforcement de la confiance dans la société numérique et de possibilité pour le citoyen consommateur de faire un usage pleinement maîtrisé de ses données, ainsi qu’en matière d’accessibilité accrue au numérique, tant dans les territoires que par de nouveaux usages pour les personnes en situation de handicap ou de précarité économique. Il s’agit là de points essentiels.

Il me paraît aussi important de rester vigilants, dans nos débats, sur plusieurs points. Tout d’abord, comme cela a été dit tout à l’heure, des avancées majeures sont en cours à Bruxelles sur les sujets clés de la neutralité du Net, des données personnelles et des plateformes. Aussi la cohérence et l’articulation avec la législation européenne seront-elles centrales tandis que, face à des phénomènes globalisés, l’échelon communautaire est pertinent pour traiter de ces enjeux.

Deuxième point : la nécessité absolue de trouver l’équilibre entre la protection des données personnelles, la confiance des citoyens et des acteurs économiques et la définition d’un cadre attractif encourageant l’innovation sous toutes ses formes. En effet, c’est maintenant qu’il faut accélérer le mouvement. Il est essentiel de nous doter d’une législation permettant à l’innovation de se développer dans toutes ses potentialités, présentes et à venir, mais aussi à l’audace et à l’énergie entrepreneuriales françaises de se réaliser.

Aussi, comme je l’avais rappelé en commission, la confiance des utilisateurs et l’encouragement de l’innovation, loin d’être antagonistes, sont-ils deux objectifs parfaitement et obligatoirement complémentaires, que nous devons poursuivre avec détermination.

À ce titre, l’attention de la commission des affaires économiques s’est plus particulièrement portée sur deux questions traitées dans le texte et sur leur applicabilité. La première concerne la portabilité des données et la nécessité de concilier le droit légitime de l’utilisateur de récupérer les données personnelles qu’il a fournies et la protection de la valeur ajoutée et de l’innovation apportées par le service en ligne, quelle que soit la taille de l’entreprise concernée. La seconde concerne les plateformes et la difficulté posée par ce texte – nous l’avons évoquée en commission – quant au périmètre couvert, dans un contexte où tous les acteurs du numérique sont potentiellement des plateformes en devenir.

Autre point de vigilance : gardons à l’esprit – plusieurs textes examinés ces dernières années doivent nous le rappeler – que le temps du législateur n’est pas celui du numérique, dans un contexte où les cycles d’innovation se raccourcissent et où les révolutions sont rapprochées et très rapides. Il est absolument nécessaire de veiller à l’applicabilité de nos textes et d’anticiper leurs éventuels effets de bord et leur impact dans des écosystèmes de plus en plus complexes. C’est à ce titre que j’ai pu regretter, nous en avons parlé en commission des affaires économiques, que les études d’impact, très satisfaisantes sur le titre Ier relatif à la donnée, présentent des fragilités dans certaines démonstrations sur le titre II.

En septembre dernier, des entrepreneurs représentant des pépites françaises du numérique regroupées au sein de la French Tech sont venus échanger avec les membres de la commission des affaires économiques et nous ont appelés à rester très attentifs à la stabilité du cadre et des textes, et à leur applicabilité réelle dans un monde toujours mouvant. Il nous faut entendre cette demande et poser un cadre clair, attractif et sécurisant, cohérent avec les législations supranationales en cours de définition, un cadre propice au développement d’offres innovantes et disruptives, accessibles à tous et pour tous afin de permettre à la France d’être à la hauteur des enjeux qui se présentent à elle.

C’est toute notre ambition pour les discussions que nous allons avoir à l’occasion de ce texte : concilier ces approches et trouver le bon point d’équilibre assurant attractivité, cohérence et pertinence sur un sujet qui est un enjeu de croissance majeur pour notre pays et d’égalité pour l’ensemble des territoires et des citoyens.

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