Intervention de Sergio Coronado

Séance en hémicycle du 19 janvier 2016 à 15h00
République numérique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

…je veux néanmoins saluer la méthode de travail ouverte et collaborative qui a présidé à l’élaboration du texte. De nombreuses consultations et de précieux avis des autorités administratives ont largement nourri un débat riche et constructif. Les participants ont pu débattre lors de la consultation citoyenne, voter et proposer des amendements concernant trente articles sur les quarante-huit du texte initial ; quatre-vingt-dix modifications et cinq articles ont été ajoutés au projet initial à la suite de cette consultation publique. Je veux aussi saluer le travail du rapporteur et la disponibilité de Mme la secrétaire d’État.

Votre projet de loi, madame la secrétaire d’État, arrive à la suite de textes qui ont affecté le monde numérique et dont le moins que l’on puisse dire est qu’ils ne s’inspiraient pas des principes que vous souhaitez promouvoir. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’estime qu’il ne fallait pas voter la motion de Lionel Tardy. Dans un contexte où le numérique charrie nombre de fantasmes, où il constitue même, dans certains cas, une circonstance aggravante, il me semble que c’est un texte non seulement attendu mais aussi bienvenu.

Le projet de loi introduit des notions importantes. Je me réjouis de l’adoption en commission de nombreux amendements, et notamment de ceux que j’ai déposés avec ma collègue Isabelle Attard. Je rappellerai rapidement leur objet : le droit à la publication des informations communiquées ; l’auto-saisine de la CADA aux fins de poursuite des réutilisations frauduleuses des données publiques ; l’accès à des formats ouverts pour la mise à disposition des articles de recherche ; l’open data des relevés du Conseil supérieur de l’audiovisuel sur les temps de comptage politique ; l’open data sur les traitements de données de la CNIL ; la publicité systématique des avis législatifs de la CNIL, qui me paraît très importante ; l’avis de la CNIL sur tous les décrets ; la possibilité pour la CNIL d’échanger avec des homologues de pays non européens ; la modification de l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique sur l’illicéité ; la portabilité de tout ou partie des données ; enfin, la possibilité offerte aux associations oeuvrant pour les libertés numériques d’ester en justice sur les questions de données personnelles et les délits associés.

Je veux aussi me féliciter de l’adoption à l’unanimité de l’amendement que nous avions déposé qui permet de condamner toute diffusion d’une photo ou vidéo sexuellement explicite d’une personne sans son consentement. Cet amendement vise à lutter contre ce que l’on appelle le « porno vengeur » et à le pénaliser.

Je crois que la commission, qui a travaillé plus de dix-sept heures, n’a pas démérité. Des points cruciaux ont été clarifiés. Il en est ainsi du droit à la libre disposition de ses données, c’est-à-dire du droit pour l’individu de contrôler l’usage qui est fait de ses données à caractère personnel. Un droit à l’oubli a également été reconnu aux mineurs, qui pourront faire effacer des données personnelles. Par ailleurs, la reconnaissance de la mort numérique permettra à toute personne, de son vivant, d’organiser les conditions de conservation et de communication de ses données à caractère personnel après son décès. Ce sont là des éléments utiles et précieux.

Je salue également l’accès de tous au numérique. Pour sûr, le maintien de la connexion internet des personnes les plus démunies en cas d’impayé, jusqu’à ce que le Fonds de solidarité pour le logement ait statué sur la demande d’aide financière, constitue un progrès, de même que l’amélioration de l’accès au numérique des personnes en situation de handicap et l’usage de la lettre recommandée électronique et des dons par SMS. Je reste également favorable à la circulation des données et du savoir, et à l’introduction de la notion de données d’intérêt général, en accroissant l’ouverture des données publiques.

Cela étant, pour ce qui concerne l’open data, on demeure loin du droit communautaire, qui pose le principe d’une libre réutilisation gratuite de toutes les données publiques, sauf exception. En droit français, l’administration dispose toujours de la faculté de ne pas communiquer ses données et conserve un pouvoir discrétionnaire quant à la communication de ses données publiques, alors même que la communication des données publiques d’une administration à l’autre sera obligatoire. Le Conseil d’État, qui a rendu un avis assez sévère sur l’ensemble du texte, n’a d’ailleurs pas manqué de souligner les risques liés à cette idée en termes de libertés publiques.

Je suis persuadé que les débats vont être riches, malgré la procédure accélérée, et même si le volet économique sera traité dans un autre texte. C’est donc dans un esprit constructif, madame la secrétaire d’État, que les écologistes, je crois assez unis sur ce texte – ce qui est à souligner (Sourires) – entendent participer à la discussion qui commence ce soir. Je souhaite que le Gouvernement soit plus volontaire sur la promotion du logiciel libre et que nous avancions sur la liberté de panorama et sur les biens communs, qui figuraient d’ailleurs dans la première version de votre texte et qui ont en partie disparu dans celui qui nous a été présenté en commission.

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