Intervention de Annie Le Houerou

Séance en hémicycle du 27 janvier 2016 à 15h00
Protection de l'enfant — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnie Le Houerou, rapporteure de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, à la suite de l’échec, le 12 janvier dernier, de la commission mixte paritaire chargée de dégager un texte commun aux deux assemblées parlementaires sur la proposition de loi relative à la protection de l’enfant, notre assemblée est saisie, en nouvelle lecture, du texte qu’elle a adopté le 18 novembre 2015 en deuxième lecture.

Lors de cette lecture, vingt-trois articles ont fait l’objet d’une adoption ou d’une suppression conforme, de sorte qu’il reste vingt et un articles en navette à examiner. Deux mesures importantes continuent de faire l’objet de profonds désaccords entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Il s’agit tout d’abord des dispositions de l’article 1er qui prévoient la création d’un Conseil national de la protection de l’enfance. Supprimées par le Sénat en deuxième lecture, elles ont été rétablies par l’Assemblée nationale. En effet, la question majeure de la gouvernance de la protection de l’enfance ne fait pas consensus entre nos assemblées. Nous estimons pour notre part que la création de cette instance consultative permettrait d’améliorer la cohérence et la coordination des politiques de la protection de l’enfance, celles-ci restant à l’heure actuelle caractérisées par une trop forte hétérogénéité entre les départements et, au sein d’un même territoire, par un cloisonnement de l’action des différents acteurs. Ce constat est partagé par l’ensemble des professionnels et des acteurs et par tous ceux qui s’intéressent à cette question.

Il s’agit ensuite du dispositif de l’article 5 ED relatif au versement de l’allocation de rentrée scolaire – ARS – lorsqu’un enfant est confié au service d’aide sociale à l’enfance – ASE. Le Sénat souhaiterait que cette allocation soit versée à ce service. L’Assemblée nationale estime, de son côté, que l’allocation de rentrée scolaire ou la part d’allocation différentielle due à l’enfant confié à l’ASE doit être versée à la Caisse des dépôts et consignations de façon à ce qu’elle en assure la gestion jusqu’à la majorité de l’enfant ou, le cas échéant, jusqu’à son émancipation. À cette date, le pécule devra être versé à l’enfant. Il nous semble qu’il s’agit là d’une mesure de justice sociale particulièrement innovante, de nature à faciliter l’entrée de ces adolescents dans la vie d’adulte et à donner à notre jeunesse une marque de confiance. Vous avez porté cette mesure, madame la secrétaire d’État : c’est un excellent outil pour mieux armer les jeunes majeurs au début de leur vie d’adulte.

Outre ces deux principaux points de désaccord, un certain nombre de sujets importants suscitent toujours une divergence de vue entre les deux assemblées.

Parmi ceux-ci, je citerai : l’accompagnement des jeunes majeurs au-delà du terme de la mesure de protection dont ils font l’objet ; le suivi des mesures prises pour lutter contre l’absentéisme scolaire et le décrochage ; l’obligation faite au président du conseil départemental de mettre en place une commission pluridisciplinaire pour examiner les situations d’enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance depuis plus d’un an lorsqu’il existe un risque de délaissement parental ou lorsque le statut juridique de l’enfant paraît inadapté à ses besoins – cet examen devant avoir lieu tous les six mois lorsqu’il s’agit d’enfants de moins de deux ans.

De même, l’encadrement strict du recours aux tests osseux dans la rédaction que nous avons adoptée en première lecture apporte les garanties nécessaires aux mineurs sans qu’il soit nécessaire de créer dans chaque département, comme le souhaiterait le Sénat, un comité d’éthique chargé de statuer sur la minorité ou la majorité des personnes à partir des éléments d’évaluation.

Enfin, ne saurait être retenue la rédaction adoptée par le Sénat en deuxième lecture à l’article 22 quater qui prévoit l’obligation pour les départements de transmettre au ministère de la justice les informations dont ils disposent sur le nombre de mineurs isolés étrangers présents sur leur territoire. Cette transmission d’informations permet au ministère de la justice de fixer des objectifs de répartition proportionnés aux capacités d’accueil des mineurs dans les différents départements. Il s’agit donc d’un dispositif de solidarité nationale entre les départements. L’article 22 quater ne peut donc prévoir une simple « évaluation » des capacités d’accueil des départements, il doit fixer des objectifs de répartition entre les différents départements.

Mes chers collègues, dans la mesure où notre assemblée est appelée à se prononcer sur un texte qu’elle a adopté en novembre dernier, j’ai fait le choix de ne pas vous proposer d’amendements. La commission n’y a apporté la semaine dernière aucune modification : elle a, en nouvelle lecture, adopté la proposition de loi dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale en deuxième lecture. Je vous invite donc à confirmer le vote de la commission et à adopter la présente proposition de loi dont la rédaction a été enrichie par l’excellent travail accompli par le Sénat et l’Assemblée nationale.

J’espère que ce texte, très attendu sur le terrain, fera l’objet d’un consensus et sera voté à une large majorité. Il a bien pour objectif de prévenir les risques de mise en danger des enfants et de leur assurer une protection sans faille, en plaçant l’intérêt de l’enfant au coeur des décisions prises.

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