Intervention de Alain Vidalies

Séance en hémicycle du 2 février 2016 à 15h00
Économie bleue — Discussion générale

Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Quand les pêcheurs apprenaient en se levant le matin que les Espagnols avaient dévalué la peseta, ils savaient qu’il allait se passer la même chose que dans un certain nombre d’industries. Il faut toujours le rappeler pour se souvenir que l’un des grands acquis de l’Europe, c’est que nous ne sommes plus aujourd’hui soumis à la dévaluation compétitive. Il faut en tenir compte dans notre débat pour ne pas envisager des solutions dont l’histoire a montré qu’elles n’étaient pas si positives.

Monsieur Priou, vous avez évoqué la nécessité d’établir une cohérence dans la politique suivie car nous ne serions pas capables de choisir entre le bleu et le vert, et notre organisation institutionnelle nous mettrait de fait dans la difficulté. C’est méconnaître les exigences d’aujourd’hui, y compris par rapport à l’Europe. Comme l’a dit le rapporteur, nous sommes sur la ligne de crête, mais je pense que l’on peut traiter de la politique commune de la pêche et du développement du report modal. J’ajoute que quelques semaines après le succès de la COP et compte tenu des orientations choisies de par le monde, je ne vois pas comment on pourrait entrer dans un débat sur l’économie maritime en oubliant que la mer ne nous appartient pas et qu’il y a à cet égard une exigence partagée.

Vous avez cité plusieurs exemples pour illustrer votre propos. Je vais vous en donner un autre et j’espère que vous serez à nos côtés le moment venu : Mme Troallic a rappelé l’importance de Serqueux-Gisors en raison de la nécessité absolue à laquelle il répond. Je note au passage que nous avons tous deux les mêmes lectures puisque quand j’ai écrit dans mon rapport que la déficience des ports venait de leur situation en cul-de-sac, j’avais pioché dans le même ouvrage que vous. J’en reviens au dossier Serqueux-Gisors : ce sera une ligne de chemin de fer pour obtenir justement la massification des flux. Le Gouvernement l’a décidé, c’est une priorité et le dossier est financé. Mais, alors que je lance l’enquête publique, certains élus franciliens se mobilisent contre cette ligne en raison des difficultés de cohabitation entre les habitants et le passage du train, mais pour ramener vers Paris la marchandise transitant par les ports, il faut bien à un moment donné se rapprocher de la capitale. J’espère que vous serez à mes côtés dans ce débat lancé par un certain nombre d’élus qui siègent sur vos bancs. Il ne s’agit pas de grands principes : on est bien dans la salle des machines, il s’agit de savoir comment faire et le Gouvernement est au rendez-vous. Cette question est majeure, de même que celle du canal Seine-Nord Europe.

Il ne faut pas avoir peur de ce canal contrairement à ce que prétendent certains, notamment du côté du Havre. C’est une vraie chance et nous allons le mener à bien. J’entends dire que le Gouvernement serait quelque peu hésitant, mais les financements européens obtenus pour ce canal, à savoir 40 % du total – d’autres ont négocié avant moi, mais la concrétisation est due à l’action du Premier ministre –, permettront de finaliser ce projet, avec la publication d’une ordonnance sur le mode de fonctionnement de la société à constituer.

Tous ces dossiers avancent donc vite, conformément à la volonté du Gouvernement.

Certains intervenants sont passés rapidement sur ce que nous avons fait, notamment dans le cadre du CIMER – comité interministériel à la mer. Il s’agit parfois d’éléments très techniques – je pense à l’exonération sur les plus-values de cession que nous avons fait voter l’année dernière, très technique certes, mais essentielle. Nous reparlerons par ailleurs de l’autoliquidation de la TVA. Voilà des mesures très concrètes. Ce n’est peut-être pas de la poésie maritime, mais il s’agit de mettre en place très concrètement ce que doit être l’économie maritime, ce que dit le Gouvernement et, surtout, ce qu’il fait.

Je tiens aussi à rappeler les résultats obtenus s’agissant du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche – FEAMP : le volume de financement a pratiquement augmenté de 58 %, et j’espère que nous pourrons rapidement concrétiser les postes de dépense avec les régions. C’est une réalité porteuse, mais qui nécessite des adaptations législatives dont nous allons débattre.

L’ambition est bien aujourd’hui au rendez-vous. Il y a déjà un acquis, et des expérimentations qui sont parfois difficiles. Ainsi, la situation de la plate-forme multimodale du Havre est tout à fait inacceptable. C’est la première fois que je m’exprime publiquement sur cette question : je n’accepte pas l’idée que cette plate-forme, financée avec beaucoup d’argent public, ne fonctionne pas parce que son économie ne permettrait pas de donner satisfaction à ses utilisateurs. Une mission de concertation est engagée, mais je dis très clairement aux acteurs concernés, que ce soit le grand port maritime, la CMA CGM – dont je salue l’engagement dans cette affaire – ou encore la SNCF avec qui je m’en suis entretenu directement, qu’il est inenvisageable de constater dans quelques semaines un échec définitif. Le Gouvernement veut que la plate-forme mutimodale fonctionne car cela n’aurait pas de sens de débattre de l’économie maritime, d’évoquer la massification et les liens entre les territoires et les ports tout en constatant qu’on ne serait pas capables d’aboutir parce qu’il y aurait des résistances ici ou là, ou encore une absence de vision à long terme. Le discours du Gouvernement est, je le répète, extrêmement clair sur cette question.

J’en termine en évoquant à nouveau les missions temporaires que le Premier ministre vient de confier à plusieurs parlementaires de l’opposition et de la majorité. La députée Valérie Fourneyron et le sénateur Charles Revet vont s’occuper de la mission sur le devenir des ports du Havre et de Rouen en lien avec l’axe Seine, une question centrale. Les sénateurs Jérôme Bignon et René Vandierendonck vont, quant à eux, traiter du devenir du port de Dunkerque en lien avec les territoires du nord de la France, notamment avec l’émergence du canal Seine-Nord Europe. Le député François-Michel Lambert et de la sénatrice Élisabeth Lamure travailleront sur le devenir du port de Marseille-Fos en lien avec l’axe Rhône-Saône.

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