Intervention de Maud Olivier

Séance en hémicycle du 3 février 2016 à 15h00
Renforcement de la lutte contre le système prostitutionnel — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMaud Olivier, rapporteure de la commission spéciale :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission spéciale, mes chers collègues, nous voici donc, pour la troisième fois, rassemblés dans cet hémicycle pour examiner la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

Le 15 décembre, notre commission spéciale examinait, en nouvelle lecture, la proposition de loi. Elle rétablissait dans le même temps les quatre piliers qui font le sens de ce texte : le renforcement de la lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains ; la dépénalisation des personnes prostituées, le renforcement de leurs droits et l’accompagnement de celles qui souhaitent sortir de la prostitution ; la prévention de la prostitution par l’éducation à l’égalité ; l’interdiction d’achat d’actes sexuels et la responsabilisation des clients.

J’avais fait état, lors de l’examen en commission, des points d’accord toujours plus nombreux auxquels l’Assemblée nationale et le Sénat étaient parvenus depuis le début de la navette parlementaire. Je veux redire ici que je me félicite que l’examen du texte en deuxième lecture ait conduit à l’adoption, dans des termes identiques, de nombreux articles porteurs d’avancées concrètes pour les victimes de la prostitution.

L’article 1er bis vise à améliorer la formation des professionnels engagés dans la prévention et l’identification des situations de prostitution, de proxénétisme et de traite des êtres humains. L’article 8 étend le bénéfice de l’allocation de logement temporaire aux associations agréées pour l’accompagnement des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution. L’article 9 ouvre aux victimes de la prostitution et du proxénétisme l’accueil – déjà ouvert aux victimes de la traite – en centre d’hébergement et de réinsertion sociale dans des conditions sécurisantes.

L’article 13 supprime de notre corpus pénal le délit de racolage public. J’aimerais m’attarder un instant sur cette disposition essentielle grâce à laquelle, pour la première fois dans notre pays, les personnes prostituées cessent d’être pénalisées dans le cadre de leur activité. Ainsi, nous mettons enfin notre droit en cohérence avec les principes défendus de longue date par la France : la prostitution est une violence ; les personnes prostituées sont victimes de cette violence, et non coupables. Avec l’inversion de la charge pénale et la responsabilisation des clients, nous affirmons enfin que la prostitution existe parce que les hommes choisissent en conscience d’acheter un acte sexuel. C’est fondamental.

Les articles 15 et 15 bis enrichissent le contenu de l’information et de l’éducation à la sexualité dispensées aux élèves et font une place à l’information aux « réalités de la prostitution » et aux « dangers de la marchandisation du corps ».

L’Assemblée nationale et le Sénat ont aussi adopté conforme l’article 4, qui met en place un fonds pour la prévention de la prostitution et l’accompagnement social et professionnel des personnes prostituées, dont les recettes annuelles devraient s’élever, conformément à l’engagement du Gouvernement, à 20 millions d’euros.

Malgré ces avancées et notre travail, avec le président Guy Geoffroy, pour parvenir à un accord en commission mixte paritaire, il n’a pas été possible d’aboutir à un texte commun. Certes, les points qui nous séparaient étaient moins nombreux que ceux qui nous rapprochaient. Toutefois, nos positions sur la question fondamentale du statut que la loi doit reconnaître aux personnes prostituées, d’une part, et aux clients de la prostitution, d’autre part, divergeaient trop pour que nous puissions trouver une solution acceptable par tous. Je veux rappeler, à cet égard, que toute incrimination des personnes prostituées – quelle qu’en soit la forme – m’apparaît à la fois inacceptable et incompatible avec l’idée selon laquelle celles-ci sont avant tout les victimes d’un système d’une grande violence.

En nouvelle lecture, d’un commun accord avec le président Guy Geoffroy, notre commission spéciale a rétabli les articles 9 bis, 16 et 17, que le Sénat avait supprimés en deuxième lecture.

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