Intervention de Noël Mamère

Séance en hémicycle du 16 février 2016 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Si c’est incompréhensible, c’est précisément à l’image de la décision des écologistes qui ont rejoint le Gouvernement.

La motion de renvoi en commission se justifie pour deux raisons. La première est celle avancée par Sergio Coronado : la commission de contrôle créée par la commission des lois s’est fondée sur des statistiques qui ne suffisent sans doute pas à évaluer d’une manière profonde et juste la réalité de l’état d’urgence et de ses conséquences. Tout à l’heure, j’ai évoqué les « lanceurs d’alerte », et plus précisément des organisations comme Amnesty International, qui ont mené des enquêtes qualitatives, démontrant ainsi les dégâts que peut engendrer l’état d’urgence dans le cadre des perquisitions ou des assignations à résidence.

Cela ne signifie pas pour autant, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que les députés écologistes qui soutiennent la présente motion considèrent que l’état d’urgence est contraire à nos libertés ou ne les protège pas. Nous disons seulement que notre droit commun et notre appareil juridique sont suffisants pour lutter efficacement contre les menaces terroristes.

Le Gouvernement est dans une impasse bien embarrassante car il ne sait pas comment sortir de l’état d’urgence, dont le Premier ministre lui-même nous a indiqué qu’il était adossé à la menace terroriste ; or chacun sait que celle-ci ne prendra pas fin le 26 mai prochain. On peut ainsi voir se prolonger indéfiniment un état d’exception qui, dès lors, entrerait dans le droit commun.

Par ailleurs, le texte que vous soumettez à nos suffrages s’inscrit dans une sorte de cycle qui a commencé non pas le 20 novembre dernier mais en 1986, date depuis laquelle une vingtaine de lois dites « antiterroristes » ont été adoptées, dont quatre sous la gauche. Ces lois ont à chaque fois fait reculer le droit commun au profit d’exceptions ou de dérogations. Bref, cela fait un moment que l’on est entré dans une logique d’exception ; et demain, le Gouvernement normalisera l’état d’urgence avec la réforme pénale en faisant entrer, pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, le préfet dans le code de procédure pénale.

Ce que nous n’acceptons pas, c’est que le juge judiciaire, garant de nos libertés individuelles, soit effacé par le procureur, le préfet et la police.

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