Intervention de Denys Robiliard

Réunion du 4 février 2016 à 9h00
Mission d'information relative au paritarisme

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenys Robiliard :

Vous nous avez dit que votre organisation n'exigeait pas de ses adhérents d'être des salariés. Sauf erreur de ma part, c'est un cas unique. Je trouve cela très intéressant. Vous avez par ailleurs évoqué la question du lien de subordination, sur laquelle il faudra peut-être revenir, et celle du CPA.

Je rappelle qu'à l'article 38 de la loi relative au dialogue social, nous avons défini le CPA comme une institution ayant vocation à bénéficier à toutes les personnes, quel que soit leur statut. Le CPA est attaché non pas au salariat, mais à la personne. Pourront donc en bénéficier les auto-entrepreneurs et les personnes en situation de dépendance économique – sans qu'il y ait nécessairement de subordination juridique. C'est l'un de ses intérêts.

Après, se pose la question du champ du droit du travail et de ses limites, puisque, aujourd'hui, on en vient à distinguer le droit du travail du droit de l'activité, notamment à propos du CPA – selon une note de France Stratégie.

D'un côté, on assiste à des phénomènes relativement nouveaux, que l'on n'a pas forcément envie de « geler » en les faisant entrer dans des catégories prédéfinies, répondant à des logiques antérieures. Mais de l'autre, on peut se demander s'il ne conviendrait pas d'encadrer des pratiques où l'on est très proche du lien de subordination juridique, en définissant un contrat de travail « allégé ». Ne risque-t-on pas alors d'aboutir à un contrat de travail « dégradé » ?

Aux États-Unis, où le travail non salarié est en proportion plus faible qu'en France, une class action vise à faire reconnaître les travailleurs d'Uber comme étant des salariés relevant donc du droit du travail, et pas simplement d'un droit de l'activité.

Quel positionnement conduirait, à la CFDT, à admettre qu'on pourrait ne pas rechercher la protection du code du travail, et donc la protection du salariat ? C'est tout de même une protection claire, bien instituée et extrêmement structurée.

Je n'ai pas la réponse quant à moi sur la façon de se positionner face à des situations de ce type. Actuellement, quand un travailleur est propriétaire de ses moyens de production, on exclut le salariat. Pour le chauffeur Uber propriétaire de sa voiture, il n'y a donc pas de salariat possible. Cela m'amène à évoquer devant vous une revendication portée par les Travailleurs paysans, mouvement syndical de Bernard Lambert qui s'était développé dans les années soixante-dix et qui n'avait cependant pas abouti en termes de droit du travail. L'idée était que l'agriculteur, propriétaire de sa ferme, était dans un lien de dépendance économique tel que l'on pouvait pratiquement considérer qu'il y avait un lien de subordination. L'analyse du rapport entre la coopérative ou le donneur d'ordre, et le fermier avait ainsi conduit à revendiquer l'application du droit du travail.

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