Intervention de Stéphane Travert

Réunion du 16 février 2016 à 16h15
Mission d'information commune sur l'application de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Travert :

Madame la ministre, je souhaite aborder avec vous diverses questions relatives travail du dimanche.

Les textes nécessaires à la mise en oeuvre du volet « travail dominical et de nuit » de la loi sont tous parus à ce jour. Pensez-vous que l'information à la disposition des employeurs et des salariés sur le droit applicable, tel qu'il résulte de la loi, a été suffisante ? Que peut mettre en oeuvre le Gouvernement pour la renforcer, notamment à destination des petites entreprises – je pense aux commerces de moins de onze salariés qui peuvent rencontrer des difficultés pour conclure des accords – et des maires ?

S'agissant des contrôles, les auditions et les remontées du terrain ont montré que dans les faits, les cas d'ouvertures dominicales « illégales » n'ont pas cessé avec l'entrée en vigueur de la loi. Dans ce cas, les salariés concernés sont la plupart du temps privés des compensations devant être négociées et des garanties prévues. Que peut faire le Gouvernement pour que les contrôles de l'inspection du travail soient plus effectifs et qu'ils soient ciblés sur la question de l'ouverture dominicale ? Les sanctions prévues par la loi et celles prononcées par les juges vous paraissent-elles dissuasives et efficaces ?

La définition de nouvelles zones autorisant l'ouverture dominicale des commerces fait-elle courir des risques en matière de concurrence et de relocalisation de certains magasins non directement concernés, notamment dans le secteur de la grande distribution ? Doit-on craindre les « effets de bord » qui se traduiraient par le transfert de commerces ?

De manière plus ponctuelle, il a été signalé que certains commerces implantés dans des centres commerciaux, en particulier en ZTI, avaient été menacés de pénalités financières s'ils n'ouvraient pas le dimanche. Les baux commerciaux signés avec les gestionnaires les obligeraient en effet à respecter les horaires d'ouverture des centres. Pouvez-vous confirmer que ces clauses contractuelles ne sauraient être applicables pour obliger un commerce à ouvrir le dimanche sans qu'il dispose de l'accord collectif prévu par la loi, sauf à être considérées comme des clauses abusives ?

J'en viens à l'extension de l'obligation de conclure un accord collectif prévoyant les compensations au travail dominical pour les salariés des commerces situés dans les nouvelles zones d'autorisation. Que pensez-vous des accords signés ou des projets d'accords, au niveau de certaines branches, comme le bricolage ou la bijouterie-joaillerie orfèvrerie ; dans certaines enseignes, comme Darty ou Zara, et s'agissant spécifiquement du travail du dimanche et du travail du soir, par exemple pour les parfumeries ?

D'une manière générale, le niveau des compensations négociées ou proposées à la négociation semble très hétérogène, les majorations salariales allant de 10 % à 200 %. Cependant, il reflète souvent les pratiques précédentes, la situation des salariés dans les commerces ayant l'habitude d'ouvrir le dimanche n'étant pas comparable à celle que connaissent ceux qui expérimentent une nouvelle organisation du temps de travail.

Que pensez-vous des accords signés pour lesquels les syndicats majoritaires ont fait valoir leur droit d'opposition ? La réforme annoncée, visant à permettre un référendum auprès des salariés concernés, cherche-t-elle spécifiquement à éviter ce genre de situation ?

Au sein des grands magasins parisiens, la présence de démonstrateurs, qui sont mis à disposition par les marques et ne sont pas employés par les établissements, pose une difficulté supplémentaire dans l'organisation de la négociation collective. Estimez-vous que ces démonstrateurs devraient se voir appliquer un accord géographique, ou leurs employeurs devraient-ils négocier des accords séparés avec des compensations différentes ?

Quels contrôles ont-ils pu être organisés pour vérifier la bonne application des dispositions organisant l'ouverture dominicale des commerces alimentaires de détail ?

La mise en oeuvre de l'extension des dispositions relatives aux « dimanches du maire », notamment s'agissant des dates décidées par les maires et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) pour 2016, vous semble-t-elle satisfaisante ? Avez-vous connaissance de divergences entre les maires et les organes délibérants des EPCI ? L'obligation de fixer avant le 31 décembre les dimanches de l'année suivante risque-t-elle de provoquer des difficultés ? La déduction des jours fériés ouvrés a-t-elle bien été comprise et anticipée par les élus ? Avez-vous renforcé l'information des élus sur l'application de ce régime ou prévoyez-vous de le faire, et dans quelles conditions ?

Les commerces de détail ne sont pas tenus de recourir à un accord collectif ou à une « décision unilatérale » ; ils doivent seulement octroyer au salarié privé de repos dominical une rémunération spécifique et un repos compensateur dont les modalités sont fixées dans l'arrêté municipal désignant les dimanches travaillés. Que pensez-vous des arrêtés municipaux qui ne prévoient pas l'organisation du repos compensateur des salariés ? Cette carence fait-elle courir des risques en termes de contentieux ?

Certains arrêtés préfectoraux relatifs aux dérogations semblent cristalliser les affrontements entre les représentants du petit commerce et les représentants des grands groupes de distribution, notamment à Paris et dans le sud de la France. Il y a eu des recours administratifs, et l'on constate des ouvertures que l'on sait illégales, notamment pour des commerces alimentaires qui ouvrent le dimanche matin sans fermer un autre jour de la semaine, par exemple à Paris, ou qui ne ferment pas le dimanche après-midi. Des instructions ont-elles été envoyées aux préfets et aux DIRECCTE afin de préciser l'application de ces dispositions ?

Madame la ministre, que pensez-vous de la récente décision du tribunal administratif de Pau, annulant un arrêté préfectoral qui obligeait les boulangeries des Landes à fermer un jour par semaine ?

De quelles autres difficultés avez-vous connaissance s'agissant de la mise en oeuvre de la loi et des accords qui en découlent ? J'entends souvent nos collègues de l'opposition parler de blocages, et même dire que la loi ne fonctionne pas. Cette dernière est, au contraire, parfaitement claire : il n'y a pas d'ouverture le dimanche sans accord. Devons-nous parler de « blocage » si un accord n'aboutit pas ? Il s'agit peut-être seulement des conséquences du fait que la négociation collective reste le moyen de se mettre d'accord. Quelle est votre position sur ce point ?

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