Intervention de Jean-Yves Le Bouillonnec

Réunion du 17 février 2016 à 16h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Bouillonnec :

Nous sommes face à un problème de fond : il n'est pas possible de priver un individu de liberté sans garanties extrêmement strictes. C'est ce qui explique l'évolution historique de ce processus qui amène à priver quelqu'un de sa liberté : nous n'avons cessé d'année en année de faire en sorte que la garde à vue soit assortie de toutes sortes de garanties, jusqu'au principe du contradictoire. Or le dispositif législatif que nous examinons va encore ouvrir des champs nouveaux.

Nous sommes dans une volonté permanente de ne jamais priver quelqu'un de sa liberté en prenant le risque d'une décision arbitraire. Le risque d'arbitraire est couvert par le processus judiciaire : la rétention administrative d'un étranger sans titre de séjour, par exemple, est accompagnée juridiquement de manière extrêmement forte.

La loi de 2006 a instauré la rétention dans les locaux de police aux fins de vérification d'identité. J'avais déjà contesté ce dispositif au motif qu'il ne saurait y avoir de rétention administrative « sèche ». Je suis troublé de voir à nouveau recourir à cette procédure qui, en la circonstance, n'est plus justifiée par aucun élément concret, mais seulement motivée par la nécessité de vérifier une hypothèse… Qui plus est, ceux qui vérifient sont les mêmes que ceux qui prennent la décision de placer l'individu en rétention. L'intervention du judiciaire, à l'inverse, a le mérite de détacher le fait générateur de la rétention de la décision du placement en rétention.

Ajoutons que la rédaction de l'article 18 est extrêmement complexe. Elle renvoie à des « activités à caractère terroriste » ou à une « relation directe et non fortuite avec une personne ayant un tel comportement ». Les motifs de la rétention sont donc considérablement élargis : il peut s'agir de liens familiaux, voire de simples liens de voisinage. J'estime qu'ils ne sont pas assez précis pour échapper au soupçon d'arbitraire.

Je suis extrêmement gêné par cet article 18. La garde à vue est un dispositif suffisamment « bétonné » pour servir de matière de droit commun pour toute privation de la liberté.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion