Intervention de Pascal Popelin

Séance en hémicycle du 1er mars 2016 à 15h00
Lutte contre le crime organisé le terrorisme et leur financement — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Popelin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, je voudrais utiliser les cinq petites minutes qui me sont concédées, en ouverture de notre discussion générale, pour exprimer mon approche de ce projet de loi, s’agissant de la partie qui me concerne plus spécialement, puisque nous nous sommes partagé, avec Colette Capdevielle, la responsabilité de rapporter ses articles de manière thématique.

Tout d’abord ce texte, pour sa partie antiterrorisme et lutte contre le crime organisé, n’est en rien une transposition dans le droit commun des procédures spécifiques de l’état d’urgence. Par les dispositions qu’il contient, il a vocation à apporter des réponses de droit aux angles morts identifiés depuis plusieurs années et dramatiquement mis en lumière lors des événements qui ont récemment frappé notre pays. C’est en ce sens qu’il crée les conditions d’une sortie possible de l’état d’urgence, sans affaiblir nos moyens juridiques de lutte contre le terrorisme.

Ce texte ne constitue pas davantage un quelconque contournement de l’autorité judiciaire. En effet il renforce au contraire les outils mis à sa disposition pour lutter contre les atteintes graves portées à l’ordre public et les prérogatives nouvelles qu’il confie à l’autorité administrative se situent sans ambiguïté en amont de toute procédure judiciaire, de manière strictement encadrée, avec le souci scrupuleux du respect en toutes circonstances des libertés fondamentales.

Puisque la critique a été formulée, je ne considère pas non plus que ce projet de loi marque un affaiblissement du juge d’instruction au profit du parquet. Il donne simplement de l’homogénéité aux outils mis à la disposition de l’ensemble des magistrats qui interviennent chacun à des stades différents du processus judiciaire, sur des enquêtes d’une gravité et d’une complexité variables, mais dont je rappelle que 97 % sont aujourd’hui conduites sous l’autorité du procureur de la République.

Je veux aussi redire ici que le Gouvernement, la commission des lois, tout comme votre serviteur dans la perspective de nos débats en séance publique, ont été très attentifs à l’équilibre entre réalisme et efficience des moyens de protection de la société d’une part, et respect des libertés et des principes généraux de notre droit français et international d’autre part. Ce débat est récurrent dès lors qu’il s’agit de questions de sécurité. Il doit toujours être tranché sans faiblesse, mais sans excès, de manière juste et proportionnée. C’est l’honneur de ce gouvernement et de ceux qui le soutiennent de ne jamais vouloir s’abstraire de cette double préoccupation.

Ainsi, en commission, avons-nous davantage encadré le recours aux moyens spéciaux d’enquête, qu’il s’agisse des perquisitions domiciliaires nocturnes, de la sonorisation, de la fixation d’images ou de la captation de données informatiques. S’agissant de l’IMSI catcher, qui soulève toujours autant de débats, je vous proposerai demain plusieurs amendements de nature à renforcer encore le cadre juridique régissant son utilisation.

La commission des lois a aussi bien voulu me suivre dans ma volonté de renforcer les garanties applicables aux mesures administratives proposées.

Ainsi avons-nous adopté un amendement visant à préciser l’objet de la nouvelle retenue administrative, qui paraissait flou dans la rédaction initiale. Je proposerai de compléter encore sa définition, en précisant qu’elle ne peut en aucune manière donner lieu à audition. J’ai entendu tout à l’heure le ministre de l’intérieur indiquer par avance que le Gouvernement donnerait un avis favorable à cette proposition. Je vous inviterai aussi à renforcer les garanties offertes aux mineurs qui feraient l’objet de cette procédure, sur lesquelles nous avions quelque peu buté il y a deux semaines en commission.

Avec le même souci de rigueur et de précision, la commission a adopté un amendement éclairant les conditions réelles et objectives pouvant conduire à justifier l’usage des armes dans le cadre du nouvel état de nécessité. Deux amendements, visant à mieux coordonner les procédures administratives et judiciaires applicables aux personnes qui reviennent sur le territoire national après s’être rendues sur un théâtre d’opérations terroriste ou qui ont tenté de le faire, ont été votés. Nous avons ainsi très clairement indiqué que l’ouverture d’une procédure judiciaire primait sur toute mesure de police administrative quand il était possible de la mettre en oeuvre immédiatement. Je vous proposerai d’être encore plus nets, au moyen d’un amendement permettant de mieux distinguer encore les procédures administratives et judiciaires.

Un travail d’amendement conséquent a donc été mené par la commission des lois. Il s’est effectué avec sérieux, dans un esprit d’écoute, qui a permis l’adoption d’amendements d’origines fort diverses, au-delà de ceux du rapporteur.

C’est dans cet esprit, je crois, qui nous faut poursuivre nos travaux. J’ai confiance, compte tenu des enjeux, dans notre capacité collective à y parvenir. Soyez assurés que je m’y emploierai avec conviction.

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