Intervention de Colette Capdevielle

Séance en hémicycle du 1er mars 2016 à 15h00
Lutte contre le crime organisé le terrorisme et leur financement — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaColette Capdevielle, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, chers collègues, nos compatriotes nous demandent à la fois de très bien les protéger mais aussi de défendre leurs droits et leurs libertés. Les attentats récents ont sérieusement ébranlé notre vivre ensemble, construit autour des valeurs démocratiques que nous partageons tous – je l’espère – ici.

Or nous ne pouvons espérer vivre ensemble sans compromis. C’est même le coeur de notre mission, à nous, les parlementaires, qui sommes chargés de réguler dans le consensus, par des processus démocratiques, nos divergences et nos conflits d’intérêts.

C’est tout l’enjeu de ce projet de loi, qui repose sur cet équilibre entre nécessité de sécurité et nécessité de préserver nos libertés.

Ce texte est le fruit d’un long travail de Mme Taubira et de ses équipes, et je tiens à leur rendre hommage. Il est fondé sur les rapports Nadal, Robert et Beaume.

C’est un texte qui est très attendu par la plupart des professionnels et il répond aux exigences posées par le Conseil constitutionnel, la Cour européenne des droits de l’homme et les directives européennes. Avec mon collègue, Pascal Popelin, avec lequel j’ai beaucoup travaillé, nous nous sommes employés à enrichir, simplifier le texte, tout en conservant son esprit et son essence initiale.

J’insisterai particulièrement sur les dispositions que la commission des lois m’a confié le soin de rapporter, qui ont trait à la lutte contre le financement du terrorisme et des activités criminelles, les articles 12 à 16, et la modernisation de notre procédure pénale, c’est-à-dire les titres II et III.

Concernant la partie relative au blanchiment, la commission a peu modifié le texte initial. L’incrimination créée à l’article 12 permettra de poursuivre les trafiquants de biens culturels. C’est une grande avancée.

Les apports de la commission se sont principalement concentrés sur la seconde partie du texte, qui est relative aux garanties offertes par la procédure pénale et à sa simplification.

Seul l’article 24, relatif à l’introduction du contradictoire, évoqué par M. le garde des sceaux, dans l’enquête préliminaire, a été profondément revisité, modifié, dans un sens réellement beaucoup plus ambitieux.

Nous avons déjà bien travaillé avec le Gouvernement et je sais qu’il nous proposera une autre version de compromis dans le même esprit.

Les travaux de la commission ont abouti à l’adoption d’un grand nombre d’articles additionnels : trente nouvelles dispositions ont été retenues.

Je développerai rapidement trois points essentiels.

Premièrement nous avons profité de ce texte pour réintroduire dans notre droit toutes les dispositions qui ont malheureusement et injustement été censurées pour des raisons de forme par le Conseil constitutionnel à l’été 2015. Nous restons guidés, monsieur le garde des sceaux, par le principe de l’individualisation des peines en donnant aux juridictions la plus grande latitude dans les décisions qu’elles prononcent. Il en va du droit des personnes autant que des prérogatives de l’autorité judiciaire.

Deuxièmement, nous avons souhaité réduire autant que possible le périmètre des ordonnances prévues à l’article 33 du projet de loi initial : il comportait 21 habilitations et nous avons réduit ce total de moitié en introduisant dans le projet de loi de nouvelles dispositions, afin que le Parlement puisse en connaître.

Je vous remercie, monsieur le garde des sceaux, d’avoir accepté de nous soumettre ces dispositions.

Troisièmement, nous avons apporté une multitude de corrections ponctuelles à la procédure pénale en intégrant les recommandations formulées de longue date par les juridictions.

Les mécanismes de l’appel, de la saisine de la chambre de l’instruction, du pourvoi en cassation, sont ainsi considérablement simplifiés.

L’arrivée de ce texte dans l’hémicycle marque une nouvelle étape. Compte tenu du grand nombre d’amendements déposés par tous les groupes, je souhaite qu’ensemble nous améliorions encore ce texte, pour faire avancer le droit mais aussi les droits des justiciables.

Avec Mme Marie-Anne Chapdelaine, nous vous proposerons d’incorporer les dispositions relatives à la protection des sources des journalistes, qui concernent le code de procédure pénale et que notre commission des lois a votées il y a des années.

Mes chers collègues, grâce au travail collaboratif avec l’ensemble des ministres concernés – trois ministres au banc, ce n’est pas rien –, je peux dire que ce texte est aujourd’hui équilibré.

Aux moyens supplémentaires que nous donnons à l’investigation judiciaire répondent des garanties nouvelles que nous octroyons aux justiciables. C’est donc un texte à la fois urgent et attendu que je vous invite à venir enrichir durant ces quatre jours et trois nuits de débats qui s’annoncent.

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