Intervention de Yannick Favennec

Séance en hémicycle du 24 janvier 2013 à 21h30
Débat sur la fiscalité écologique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Favennec :

Pour autant, nous sommes fortement inquiets et déçus de constater le coup d'arrêt porté par la nouvelle majorité aux mesures courageuses du Grenelle de 1'environnement.

C'est particulièrement vrai pour les grands projets d'infrastructures, remis en cause les uns après les autres sans justification. Pourtant, le schéma national des infrastructures de transports, la poursuite du programme de lignes ferroviaires à grande vitesse, le développement des voies ferrées dédiées au fret grande distance ou encore la réalisation du canal Seine-Nord sont autant de projets d'avenir qu'il est absolument indispensable de maintenir.

Le débat sur la fiscalité écologique a une actualité d'autant plus grande dans le contexte présent, et nous n'avons cessé de le dire, que la compétitivité française a un besoin urgent d'être relancée.

Louis Gallois l'a souligné dans son rapport sur le pacte pour la compétitivité de l'industrie française : la transition énergétique, les économies d'énergie, les industries vertes, l'industrie circulaire et le recyclage constituent l'un des principaux relais de croissance pour les prochaines années. S'appuyant sur le rapport Gallois, le Gouvernement a présenté son pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi dans lequel il affirme sa volonté de mettre en place une nouvelle fiscalité écologique à hauteur de trois milliards d'euros d'ici à 2016.

Le groupe UDI ne peut que saluer une telle déclaration. Cependant, cette annonce du Gouvernement nous pose plusieurs problèmes.

Tout d'abord, nous mettons en doute votre réelle volonté en matière de fiscalité écologique. Ainsi est-il particulièrement étonnant de constater que vous ne comptez pas prendre de mesures avant l'année 2016, soit quatre ans après la présentation du pacte de compétitivité. Si nous saluons votre volonté d'organiser une concertation sur ces sujets importants, nous sommes convaincus qu'il est tout à fait possible et nécessaire de mettre en place des mesures de fiscalité écologique avant 2016, comme le rappelait notre collègue Martial Saddier.

De plus, nous nous interrogeons sur l'affectation des recettes de la fiscalité écologique. En effet, une des mesures phares de ce pacte est le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi. Lors de sa présentation, le Gouvernement a annoncé qu'un tiers de son financement proviendrait de fiscalité écologique, soit 3 milliards d'euros. L'intégralité des recettes liées aux nouvelles mesures de fiscalité écologique serait donc destinée à financer le crédit d'impôt. Cela pose question.

Enfin, et c'est là notre principale inquiétude, nous constatons que, malgré les déclarations d'intention, vous n'avez esquissé aucune piste, même floue, quant aux nouvelles mesures qui seront proposées.

Cela ne peut que nous conduire à douter, madame la ministre, de vos ambitions en matière de fiscalité écologique, notamment lorsque vous présentez au Parlement des projets de loi tels que le récent texte sur la tarification de l'énergie. En effet, plutôt que de créer des injustices flagrantes et d'installer nos concitoyens dans la précarité énergétique, un gouvernement engagé en faveur de la transition écologique aurait choisi de poursuivre et d'amplifier les engagements du Grenelle de l'environnement relatifs à l'isolation thermique des bâtiments. C'est la véritable solution, car de telles mesures apportent un soutien immédiat à l'activité et à l'emploi. Les aides fiscales à la rénovation thermique des logements soutiennent le secteur du bâtiment et favorisent le pouvoir d'achat des ménages en réduisant leur facture énergétique. À plus long terme, cela contribue à élargir notre potentiel de croissance en incitant les entreprises à développer des produits et des procédés sobres en carbone et en énergie.

Nous serons particulièrement vigilants quant aux mesures de fiscalité que vous proposerez, car elles ne devront être ni injustes ni trop complexes. Si nous voulons réussir dans ce domaine, les réformes se doivent d'être à la fois simples, lisibles et bénéficier d'une grande stabilité juridique.

En outre, nous voulons insister sur le fait que ces mesures nouvelles ne doivent en aucun cas nécessiter des efforts supplémentaires des ménages et des entreprises, déjà fortement touchés par la crise. La fiscalité écologique doit en effet encourager les comportements vertueux sans infliger de pénalités financières injustifiées.

Il s'agit de prendre en compte, de façon irréversible, les enjeux du développement durable dans notre système de prélèvements obligatoires. Le verdissement de notre système fiscal constitue l'un des axes majeurs de sa modernisation.

Si la France n'occupe pas la première place du classement européen en matière de fiscalité écologique, elle est bien la première en matière de prélèvements obligatoires sur les entreprises. La hausse d'impôt, ou plutôt les hausses d'impôts que vous avez décidées depuis votre arrivée au pouvoir s'élèvent à 27 milliards d'euros pour la seule année 2013. Il serait donc irresponsable que la mise en oeuvre des mesures de fiscalité écologique conduise à une nouvelle aggravation des hausses d'impôts. Nous serons particulièrement vigilants sur ce point.

Au contraire, et à l'instar de ce qui a été fait dans le cadre des réformes du Grenelle de l'environnement, l'accroissement des recettes fiscales doit être exactement compensé par l'augmentation des aides fiscales afin de permettre la préservation du pouvoir d'achat des ménages. De même, les prélèvements sur les entreprises doivent être limités afin d'épargner leur compétitivité.

Pour conclure, je tiens à vous assurer, madame la ministre, du soutien que le groupe UDI apportera à des réformes à la fois justes socialement, efficaces écologiquement et responsables économiquement, qui feront de la fiscalité l'un des instruments au service de la protection de l'environnement.

Le développement durable et la lutte contre le changement climatique sont les conditions de l'émergence d'une nouvelle croissance à court et moyen terme, une croissance robuste, pérenne, responsable et solidaire, qui, seule, est à même de préserver nos emplois.

Nous désirons également aller plus loin : après la taxe sur les transactions financières, pour laquelle Bruxelles a donné son accord à onze pays de la zone euro, nous devons maintenant instaurer une taxe carbone aux frontières de l'Europe dans le cadre d'un nouveau pacte social et écologique. En inscrivant une telle réforme dans le cadre européen, nous pourrons entraîner le reste du monde dans cette logique vertueuse.

Telles sont, madame la ministre, les remarques et propositions des députés du groupe UDI que je souhaitais vous livrer à l'occasion de ce débat. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

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