Intervention de Michel Miné

Réunion du 8 mars 2016 à 16h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Michel Miné :

Ce type d'accords est le résultat de compromis discutés entre les acteurs sociaux. En l'espèce, il s'agit de la moitié de 35 heures ; à cet égard, la lecture de la convention pour la branche de la propreté, qui emploie beaucoup de salariés à temps partiel et recourt massivement aux dérogations, est riche d'enseignements.

La loi du 17 août 2015 a intégré dans la BDES les informations auparavant contenues dans le rapport de situation comparée (RSC). Cependant, le décret d'application d'un article de la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, qui devait notamment prévoir des indicateurs de santé et de sécurité au travail ainsi que de déroulement des carrières, n'a toujours pas été publié. La situation est pour le moins singulière, puisque des textes viennent modifier des disposions législatives pour lesquelles les décrets d'application sont encore attendus ! Dans ces conditions, il est impossible d'établir des bilans de l'application des dispositions concernées.

Il s'agit là d'une question technique, à laquelle on peut penser que le Gouvernement apportera prochainement une solution, mais les acteurs sociaux, organisations syndicales ou DRH, travaillent aujourd'hui à partir de textes incomplets. Cette situation est cause d'insécurité juridique pour l'ensemble des acteurs.

La loi du 17 août 2015 a remis en cause un nombre non négligeable de règles organisant le processus de négociation. C'est là un sujet d'actualité, qui concerne le futur projet de loi que vous allez examiner prochainement.

Un droit des accords collectifs a vu le jour en France, des dispositions déterminent ce sur quoi peuvent porter ces accords, ou comment deux accords peuvent s'articuler ensemble – accord d'entreprise et accord de branche, par exemple. En revanche, le droit n'a pas précisé le processus de négociation, alors que certains de nos voisins l'ont fait ; or, le contenu de l'accord qui sera signé in fine dépend évidemment des modalités de la négociation collective. Les rares dispositions existant dans ce domaine proviennent des lois dites « Auroux », ou plus précisément de la loi du 13 novembre 1982 relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail, et concernent le lieu de négociation, le nombre de réunions devant être tenues ainsi que les informations à communiquer. Au fil du temps, ce droit a été construit par la jurisprudence, les acteurs sociaux ayant, au cours de certaines négociations, saisi le juge afin d'obtenir des précisions.

Ce qui n'est pas satisfaisant, c'est que la loi du 17 août 2015 est revenue sur un certain nombre de progrès du droit réalisés dans le domaine du processus de négociation ; j'en donnerai deux exemples. La jurisprudence avait établi que, lorsqu'une négociation a lieu entre l'employeur et les organisations syndicales, les élus du personnel – le comité d'entreprise (CE) notamment – devaient être consultés afin de pouvoir participer à la discussion. Il avait également été décidé que le CE devait être consulté en cas de dénonciation d'un accord précédemment conclu. Dans ces deux cas, la loi a supprimé sa consultation. Le processus de la négociation d'entreprise s'en trouve amoindri, et les parties les plus faibles fragilisées ; cela va à l'encontre de la loyauté de la négociation.

De son côté, la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes comportait des dispositions permettant aux négociateurs de demander et d'obtenir des informations complémentaires portant sur l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. La loi du 17 août 2015 a supprimé cette mesure.

En 1981, l'Organisation internationale du travail (OIT) a adopté la convention n° 154 concernant la promotion de la négociation collective, dont l'une des recommandations prévoit que les négociateurs ont accès aux informations leur permettant de négocier en toute connaissance de cause. Il serait bon que la France ratifie ce document.

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