Intervention de Alain Lacabarats

Réunion du 3 mars 2016 à 9h00
Mission d'information relative au paritarisme

Alain Lacabarats, membre du Conseil supérieur de la magistrature et ancien président de chambre à la Cour de Cassation :

Il sera très difficile d'énumérer dans un texte de loi des critères exhaustifs recouvrant toutes les situations pouvant justifier un licenciement économique. Il y aura toujours place à discussion, à interprétation, à moins de donner un caractère limitatif à ces critères. Autrement dit, élaborer une telle rédaction sera très compliqué.

Laisser au juge la possibilité d'apprécier, c'est bien. Ce qui serait mieux encore, en ces domaines-là en particulier, c'est qu'il ne soit pas isolé pour statuer. Il me semble que l'avenir de la justice française passe par une évolution qui fasse du juge une sorte de chef d'équipe entouré d'un groupe d'assistants spécialisés. Cela se fait déjà en matière pénale pour les affaires financières mais il y a beaucoup d'autres domaines où le juge pourrait ou devrait avoir le concours d'équipes de spécialistes : je pense au droit de la concurrence où nous jugeons de pratiques anti-concurrentielles qui relèvent avant tout de l'économie.

Par ailleurs, limiter l'appréciation de la cause au niveau national, monsieur le rapporteur, n'impliquera pas que les groupes seront à l'abri. La responsabilité des sociétés-mères pourra être recherchée d'une manière ou d'une autre. Restera toujours la possibilité pour les demandeurs d'agir en responsabilité civile contre les sociétés-mères comme cela se fait en matière commerciale, lorsqu'il est constaté qu'une société-mère a mis ses filiales dans l'impossibilité de fonctionner.

Pourquoi la jurisprudence est-elle allée au-delà ? Parce que la notion de groupe telle que la loi la définit ne se limite pas en l'état actuel des choses au niveau national. Nous sommes très souvent confrontés à des affaires dans lesquelles les filiales ont été mises dans l'impossibilité de poursuivre leur activité par décision d'une société se trouvant dans un autre pays. Il sera probablement difficile de comprendre que l'on ne puisse plus rechercher la responsabilité des sociétés-mères dans ce type de situation.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion