Intervention de Michel Tubiana

Réunion du 15 mars 2016 à 18h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Michel Tubiana, président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme, LDH :

Nous avons considéré que la première prorogation était injustifiée et qu'elle allait entraîner ce qui s'est produit. Ce point-là peut être discuté, je le concède. En revanche, beaucoup de choses sont indiscutables.

Lorsque les mesures ont été mises en oeuvre, on a enlevé un arbre – les dispositions sur la presse qui figuraient initialement dans la loi de 1955 – mais on a laissé le reste de la forêt, c'est-à-dire l'élimination de l'intervention judiciaire. Souvenez-vous des premières décisions des tribunaux administratifs. Le jour où l'on en fera une anthologie, ce ne sera pas à l'honneur de la juridiction administrative ! Nous avons ainsi eu droit à : « il n'y a pas d'urgence », « vous ne justifiez pas de l'urgence » et « si vous ne pouvez plus aller faire vos courses pendant trois mois, ce n'est pas vraiment gênant. » Avec l'aval du Conseil d'État, ces mesures ont été appliquées à des militants qui n'avaient rien à voir avec les motifs de l'état d'urgence.

Tout cela nous a démontré que le système ne permettait pas un contrôle. Si nous avons pris position contre la prorogation de l'état d'urgence, ce n'est pas par principe ; nous l'avons fait parce que nous estimions qu'il n'y avait pas de contrôle pour tout ce qui touchait aux libertés individuelles, qu'il n'y avait pas de contre-pouvoir suffisant sur ce terrain-là.

Quant à la deuxième prorogation… Permettez-moi de regretter que l'Assemblée nationale se soit laissée aller à renouveler une deuxième fois un état d'urgence qui n'a plus la moindre justification si ce n'est le confort politique du Gouvernement pour faire adopter le projet de loi de réforme de la procédure pénale. J'espère d'ailleurs que, cette fois-ci, vous nous auditionnerez sur ce projet de loi, ce qui n'a pas été le cas la première fois.

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