Intervention de Christophe Sirugue

Réunion du 30 mars 2016 à 16h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue, rapporteur :

Merci, messieurs, pour votre présentation et pour les éclairages que vous nous donnez sur ce projet de loi. Pour ma part je m'en tiendrai au texte qui est en discussion à l'Assemblée nationale.

En ce qui concerne l'article 19 et la question de la représentativité, j'étais rapporteur du texte de la loi Rebsamen. À l'époque, on nous avait expressément demandé de laisser le soin aux organisations patronales de s'entendre entre elles, de ne pas inscrire dans la loi une disposition qui serait en contradiction avec leurs propres intérêts. J'entends que des accords ont été passés, mais pas entre toutes les organisations, selon le représentant de l'UPA. Je trouve toujours dommage que le législateur soit obligé de sanctionner un accord qui n'est pas unanime. Néanmoins, nous sommes ouverts pour avancer dans le sens d'une représentativité respectueuse de l'ensemble des organisations patronales.

Pour en revenir au fond, le texte a pour objectif de renforcer le dialogue social afin de trouver une adéquation entre l'accroissement de la compétitivité de nos entreprises et la préservation, voire l'amplification des droits des salariés. C'est à cet équilibre qu'il faut parvenir.

Pour ce faire, le texte propose des mesures qui constituent des avancées significatives. L'accord d'entreprise en fait partie. J'ai entendu la position de l'UPA. Elle ne me semble pas contradictoire avec le projet de loi, qui rappelle l'importance des accords de branche tout en faisant le pari de la confiance dans les partenaires sociaux à négocier au sein de l'entreprise pour trouver des accords majoritaires d'entreprise. Il s'agit d'assurer une forme de protection, au travers du supplétif ou des accords de branche, s'il n'y a pas d'accord d'entreprise. Cependant, il faut, en face, des contreparties. Or je n'ai pas entendu grand-chose sur le compte personnel d'activité, alors qu'il participe des éléments concourant à l'équilibre sans lequel le texte ne peut progresser.

Restent des difficultés, et des points qui méritent d'être précisés, en premier lieu, la clarification des motifs de licenciement. Aujourd'hui, le texte retient comme critère d'appréciation de la situation difficile de l'entreprise la durée : quatre trimestres, deux ou un, selon qu'on est sur l'ordre public, l'accord d'entreprise ou le supplétif.

Faut-il en retenir d'autres ? On peut comprendre que, pour certaines petites entreprises, un trimestre peut malheureusement suffire à les mettre en situation de fragilité, voire de fin d'activité. Je sais ce qui a été dit sur la distinction par la taille de l'entreprise, mais celle-ci vous paraît-elle un élément pertinent à retenir ?

En ce qui concerne l'ampleur de la difficulté économique, étant entendu qu'une baisse de 0,2 % peut être dramatique pour certaines entreprises mais pas forcément fragilisante pour les autres, quels pourraient être des motifs de licenciement qui ne porteraient pas seulement sur la durée ? Quatre mois, cela me paraît très long pour certaines entreprises.

J'en viens à la question du périmètre. J'entends l'argument de M. Saubot, selon lequel il y a, en Europe, des modèles différents du nôtre, et que nous sommes peut-être, de ce point de vue, une exception. Or la question du périmètre n'est pas neutre. J'ai, dans ma circonscription, un exemple qui illustre précisément ce que je crains. Il s'agit d'une entreprise locale, rachetée il y a près de deux ans par un groupe étranger qui avait promis des investissements. Or les investissements n'ont pas eu lieu et plus aucune commande n'a été donnée à l'entreprise locale, qui s'est retrouvée contrainte de licencier le personnel, puis les représentants syndicaux. Les licenciements ont été refusés par l'inspection du travail, qui n'a pas considéré que la situation économique était difficile. C'est là le type de situation que nous risquons d'avoir, c'est-à-dire une entreprise fragilisée, pas forcément volontairement, par un groupe parce qu'il peut y avoir des réalités propres au territoire. Comment anticiper, voire corriger ce type de difficulté ?

Je me demande s'il ne serait pas possible de faire une distinction entre des groupes qui n'ont qu'une même activité et qui peuvent se retrouver fragilisés par un retour de conjoncture, et une holding dont les activités sont diversifiées et qui pourrait être moins légitime à considérer qu'une entreprise, quelque part en France, est en situation fragile alors que l'ensemble du groupe pourrait être appelé à la solidarité. Ces considérations peuvent-elles constituer une piste de réflexion ?

Enfin, s'agissant des TPE-PME, une remarque m'a été faite, au cours des auditions, sur l'impossibilité de provisionner pour anticiper un risque de contestation ou la programmation d'un licenciement. Avez-vous, sur ce point, des éléments qui pourraient nous éclairer ?

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