Intervention de Béatrice Brugère

Réunion du 23 mars 2016 à 19h15
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Béatrice Brugère, secrétaire générale de FO Magistrats :

Nous abordons ce sujet extrêmement important de façon un peu différente. Pour FO Magistrats, en effet, la question des moyens doit s'analyser en fonction des objectifs visés. Tout d'abord, on a annoncé, après chaque attentat, un renfort substantiel de moyens qui n'est pas arrivé. Mais la désignation de 178 référents locaux pouvait laisser penser que nous allions sortir du dogme jacobin de la centralisation du parquet de Paris. Je m'explique.

La centralisation à Paris de la lutte contre le terrorisme est un choix, qui avait sa raison d'être : le terrorisme a toujours eu un aspect politique, les services de renseignement compétents se trouvent à Paris et les menaces étaient, du point de vue quantitatif, relativement restreintes par rapport à ce qu'elles sont aujourd'hui. Or, comme nous avons désormais affaire à ce que nous appelons des nouvelles menaces extrêmement nombreuses, il nous semble intéressant de lier la question des moyens à une réflexion portant sur une nouvelle organisation de la lutte contre le terrorisme. Celle-ci pourrait ainsi, dès lors que le terrorisme est désormais susceptible de se développer sur l'ensemble du territoire, reposer sur un maillage territorial semblable à celui qui existe en Italie. Certes, les parquets italien et français ne sont pas tout à fait comparables puisque le juge d'instruction n'existe pas en Italie, mais, dans ce pays, plus de 150 magistrats connaissent des affaires de terrorisme, contre une dizaine au parquet antiterroriste français.

Notre vision du terrorisme est séparée de la lutte contre la criminalité organisée alors que la frontière entre ces deux types de criminalité est poreuse. Maintenir la centralisation de la lutte antiterroriste à Paris avec aussi peu d'effectifs traduit surtout, selon nous, un défaut de vision : on n'a pas anticipé la réalité de la menace à venir. En décembre dernier, 178 parquetiers de province ont été désignés référents antiterroristes. Ainsi le ministère a annoncé que les effectifs avaient augmenté alors qu'en réalité, ces magistrats n'ont qu'un pin's « Antiterrorisme » : cette mission s'ajoute à toutes leurs autres tâches.

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