Intervention de Michel Field

Réunion du 25 avril 2016 à 14h30
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Michel Field, directeur exécutif chargé de l'information du groupe France Télévisions :

Je ne reviendrai pas sur bon nombre de remarques formulées par nos confrères de TF1, car nous avons tous vécu le même type de situations. Je précise qu'Alexandre Kara et moi-même n'étions pas en fonctions au moment des attentats de janvier 2015. J'étais en revanche membre du comité exécutif – mais pas encore directeur de l'information – de France Télévisions au mois de novembre 2015 et nous nous trouvions chacun à notre poste actuel, M. Kara et moi-même, lors des attentats de Bruxelles en mars 2016.

J'observe, dans un premier temps, une grande maturation des médias d'un événement à l'autre. Si les plus récents n'ont pas été traités de la même manière que ceux de l'année dernière, c'est notamment dû à l'expérience, à l'analyse des effets pervers de telle ou telle attitude. Le curseur s'est déplacé : lors des premiers attentats, le réflexe journalistique du droit à l'information, quel qu'en soit le prix, a prévalu sur la prudence. Le dialogue avec les autorités et le « retour d'expérience » de situations totalement inédites ont permis une maturation à grande vitesse. Nous avons tous, désormais, pleine conscience de notre rôle en tant que citoyens. Restent bien sûr des points à améliorer : nous avons besoin, par exemple, de référents au sein de la préfecture de police ou du ministère de l'intérieur pour entendre les demandes des autorités. Libre à nous ensuite, en conscience, de les suivre ou non.

Ma seconde réflexion porte sur les réseaux sociaux. La décision de ne pas diffuser telle ou telle image, telle ou telle déclaration serait assez aisée si nous n'étions qu'entre nous ; seulement, ces images et ces déclarations, les réseaux sociaux peuvent, eux, les divulguer. Qu'en est-il donc de leur usage sauvage ? Quelles images devons-nous, pour notre part, sélectionner dès lors qu'elles constitueront une source d'information fiable et qu'elles n'auront donc pas le même statut ? Quid de la diffusion de l'image ou de la voix des preneurs d'otages ? Que faire quand un preneur d'otages menace de s'en prendre à eux s'il n'obtient pas de pouvoir s'exprimer à la télévision ? Nous avons organisé plusieurs séminaires au cours desquels nous avons examiné tous ces sujets – reste que nous nous posons plus de questions que nous ne pouvons apporter de réponses. Dans de telles situations de crise, les journalistes sont confrontés à des choix de conscience sans qu'il existe de réponses a priori ou une sorte de cahier des charges fixe qui permette de prendre la bonne décision – elle ne peut se prendre que dans des circonstances particulières et mouvantes.

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