Intervention de Sébastien Denaja

Réunion du 9 mars 2016 à 16h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Denaja, député, membre du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, HCEfh :

Il aurait été tout à fait inélégant de ma part de suggérer cela ! (Sourires.)

J'en viens aux mesures visant à instaurer la parité.

D'abord, la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes a apporté des éléments de réponse. Sans pécher par excès d'optimisme, je crois pouvoir dire que cette loi constitue un ferment de transformation puissant.

D'autres lois l'ont précédée, notamment la réforme des scrutins locaux qui instaure l'élection dans chaque canton d'un binôme homme-femme. Les conseils départementaux comptent désormais 50 % de femmes, contre 12,5 % dans les anciens conseils généraux, et nous sommes heureux de pouvoir dire que le féminin de « conseiller départemental » n'est plus « suppléante », mais « conseillère départementale ». De la même manière, lors des élections municipales de 2014, des listes paritaires ont été présentées dans les communes de plus de 1 000 habitants, au lieu de 3 500. Ces avancées pour la parité en politique sont à ajouter à celles réalisées quelques années auparavant pour les élections régionales.

Ensuite, les pénalités financières sont une piste à laquelle je crois. Lors de l'examen du projet de loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, le groupe socialiste avait déposé un amendement portant à 200 % l'augmentation de la pénalité financière pour les partis politiques ne proposant pas 50 % de femmes aux élections législatives, mais vu le risque d'inconstitutionnalité, nous avons préféré être prudents en proposant une augmentation de 150 %. Pour un très grand parti qui se voit aujourd'hui amputer de 3,5 millions d'euros par an, l'effort serait ainsi porté à 7 millions d'euros. Nous pouvons donc espérer que tous les grands partis français proposeront des candidatures partiaires en 2017, même si malheureusement cela n'entraînera pas l'élection de 50 % de femmes.

Enfin, le dernier titre de la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes constitue lui-même un puissant ferment de changement, en prévoyant la féminisation des sphères dirigeantes économiques, sociales et professionnelles – chambres de métiers, chambres d'agriculture, chambres de commerce et d'industrie (CCI), instances des fédérations sportives. Le modèle stéréotypé est sidérant : il y a ainsi des fédérations sportives qui comptent 95 % de femmes licenciées, mais sont présidées par des hommes, et il n'est pas venu le temps où une femme présidera la FIFA…

Hier, j'ai été frappé d'entendre Mme Danielle Bousquet, présidente du HCEfh, dire que la question n'est plus de savoir si les femmes accèdent aux responsabilités, mais qu'elle est de savoir si les femmes exercent le pouvoir. Car si les femmes sont désormais 50 % dans les conseils départementaux, très peu sont présidentes à cause de la théorie essentialiste qui fait des ravages dans l'attribution des compétences – les femmes se voient systématiquement attribuer la petite enfance, la jeunesse et le social, les hommes conservant les finances, les routes ou les transports. Je connais même une ministre en poste actuellement à qui une personnalité de son parti politique lui avait dit il y a quelques années : « Nous avons pensé à toi comme ministre de la famille parce que tu as quatre enfants »…

En conclusion, il nous faudra beaucoup d'énergie et de constance dans le combat, car désormais la loi ne pourra plus rien – il sera difficile d'aller au-delà du degré de raffinement atteint dans la loi. La lutte pour la place des femmes en politique est donc un combat de toute la société, comme je le disais, et c'est à cela que servent des tables rondes comme celle-ci ; je vous remercie de l'avoir organisée, madame la présidente. (Applaudissements.)

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