Intervention de Patrick Dehaumont

Réunion du 4 mai 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Patrick Dehaumont, Directeur général de l'alimentation :

Au titre du programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », la Direction générale de l'alimentation est chargée d'une mission de sécurité sanitaire assez large, qui englobe la santé végétale, la santé animale et la protection animale, ainsi que la sécurité sanitaire des aliments. Conformément à cette mission régalienne de sécurité, présentée régulièrement comme une priorité gouvernementale, il nous revient d'établir la règle en matière sanitaire et de protection animale et de nous assurer, par notre action sur le terrain, qu'elle est bien appliquée.

Notre action en matière de sécurité sanitaire et de protection animale est encadrée par un corpus réglementaire harmonisé à l'échelle européenne. Notre travail d'inspection revêt un caractère très technique, ce qui suppose de disposer d'agents formés à certaines techniques et d'être présents sur le terrain au quotidien, dans le cadre d'une chaîne de commande qui part de l'autorité ministérielle et descend, via les préfets de région et de département, jusqu'aux services vétérinaires d'inspection amenés à intervenir dans les abattoirs. Pour mener ces inspections, notre préoccupation constante est de nous inscrire dans une approche intégrée de l'ensemble de la chaîne – alimentation et animaux vivants.

Dans tous les domaines de sécurité sanitaire et de protection animale, le premier responsable des actes, qu'ils soient réalisés dans un établissement, dans un élevage ou pendant le transport, est de manière constante le professionnel – en l'occurrence, dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, le responsable de l'établissement d'abattage.

Concernant les abattoirs, donc, les inspections reposent sur deux grands principes généraux. Premièrement les professionnels ont la charge d'autocontrôle, en mettant en place un certain nombre de procédures. Deuxièmement, les services officiels réalisent des contrôles de différentes natures, proportionnés aux risques et aux moyens disponibles.

Les conditions des inspections en abattoirs peuvent être classées en deux grandes catégories. Il y a d'abord ce qui relève de l'inspection systématique, réalisée ante mortem, puis tout au long de la préparation de la carcasse et des viandes, au travers d'une série de gestes codifiés qui aboutissent soit à l'apposition d'une estampille sur la carcasse signifiant qu'elle est apte à la consommation humaine, soit au retrait de tout ou partie de la carcasse ou des abats en cas de risque pour la santé humaine. Ce à quoi vient s'ajouter une inspection continue, autrement dit des opérations de contrôle régulières au niveau de l'établissement et qui portent sur un certain nombre d'éléments, notamment, en matière de protection animale, le poste d'abattage, l'hygiène de l'établissement, les protocoles de nettoyage et de désinfection, les protocoles d'autocontrôle, la compétence des agents des abattoirs.

Il existe en France 263 abattoirs d'animaux de boucherie – 96 publics et 167 privés –, qui procèdent chaque année à l'abattage d'environ 32 millions d'animaux.

Au titre du programme 206, la DGAL dispose de 200 équivalents temps plein travaillé (ETPT) au niveau central et de 4 700 ETPT au niveau national pour l'ensemble des inspections sur le terrain. Sur ces effectifs, 30 % sont dédiés aux inspections en abattoirs, dans le cadre d'une règle d'allocation de moyens qui évalue la proportion du risque. En matière d'abattage des animaux de boucherie, l'inspection étant systématique, nous prenons en compte plusieurs paramètres pour allouer ces moyens, dont le nombre de chaînes en exercice, la cadence sur ces chaînes, l'amplitude horaire, etc. Ainsi, l'allocation de moyens humains dans les abattoirs prend en compte l'inspection systématique réalisée dans la phase ante mortem et la phase post mortem sur les carcasses, et l'inspection régulière réalisée en fonction des paramètres que j'ai cités plus haut – protection animale au poste d'abattage, traçabilité, nettoyage et désinfection, etc.

Nos effectifs dédiés aux inspections en abattoir sont donc importants : ces 30 % représentent 1 200 ETPT, soit à peu près 2 000 agents. Ces agents sont des vétérinaires officiels ou des « auxiliaires officiels » – c'est le terme européen –, autrement dit des techniciens. Nous faisons bénéficier nos agents d'une formation initiale et d'une formation continue, et nous procédons à des vérifications de compétences. Cette année, et au vu des événements récents, nous prévoyons de renforcer la formation ainsi que le maintien de la compétence de nos agents, notamment en matière de protection animale.

Je suis extrêmement attentif à ce que cette mission régalienne s'exerce avec la compétence et l'impartialité nécessaires, et que, en cas d'anomalies constatées dans le cadre de nos inspections, des suites proportionnées soient systématiquement données, qu'elles soient administratives ou judiciaires ; l'année 2015 a du reste été pour nous l'occasion de réviser un certain nombre de procédures en la matière.

Dans le domaine de la protection animale comme dans le domaine sanitaire, le premier responsable, je le répète, est le professionnel amené à manipuler des animaux vivants puis à mettre des produits sur le marché. Il est de ce fait soumis à plusieurs obligations, notamment pour les opérations d'abattage. En la matière, les dispositifs relèvent d'une réglementation communautaire qui prévoit que ces professionnels doivent disposer des compétences nécessaires et assurer les autocontrôles des opérations d'abattage.

La protection animale en abattoir ne doit pas être le seul sujet à retenir notre intérêt. Nous travaillons en effet, depuis 2014, à la demande du ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll, à une stratégie globale française pour le bien-être des animaux en France. Le plan d'actions prioritaires présentées à l'occasion du Conseil national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale (CNOPSAV) de mars, permettra à la France de se doter d'une stratégie globale ambitieuse en matière de bien-être animal, en déclinant plusieurs axes : recherche et développement, formation, accompagnement des acteurs, lutte contre les mauvais traitements et la cruauté, information des citoyens. Parmi les leviers prioritaires de ce plan d'actions, figure la mise en place dès cette année d'un centre national de référence sur le bien-être animal, ainsi que des efforts en matière de recherche sur la protection animale, en particulier sur le sexage des embryons dans l'oeuf pour éviter le broyage des poussins – sujet qui avait lui aussi, à juste titre, défrayé la chronique.

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