Intervention de Jérôme Languille

Réunion du 4 mai 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Jérôme Languille, chef du bureau de la protection animale :

Je n'ai pas d'éléments précis sur les contrats qui lient les responsables d'établissement aux sacrificateurs permanents ou occasionnels dans les abattoirs. Par contre, au titre de la protection animale et du règlement CE 10992009, le responsable de l'établissement, dont relève le plan de maîtrise du bien-être animal, doit s'assurer de la compétence du salarié ou du prestataire qui intervient dans son établissement. Il y a donc une erreur manifeste au regard du respect de cette obligation quand un intérimaire sacrifie des animaux sans en avoir la compétence, notamment en cisaillant plutôt qu'en saignant nettement l'animal. Mais finalement, peu importe le contrat ou le statut de l'intervenant : la responsabilité incombe au responsable de l'établissement qui doit s'assurer que la personne chargée de mettre à mort les animaux sur la chaîne dispose de la compétence nécessaire. Telle est la préoccupation de nos services au titre de la protection animale.

Le recours au vidéo-contrôle est parfois présenté comme une solution de nature à pallier une défaillance de nos services. Deux points me paraissent devoir être rappelés à cet égard.

Premièrement, dans son rapport d'avril dernier, l'OAV a jugé globalement satisfaisant le niveau de protection des animaux dans les abattoirs en France – je ne parle pas du niveau de bien-être animal. Certes, il est normal d'être choqué par les mauvais traitements infligés aux animaux, comme on le voit dans les vidéos en question. Mais de là à faire un amalgame entre le niveau de protection des animaux en France et les pratiques observées dans ces vidéos, il y a un pas qu'on ne saurait franchir.

Deuxièmement, juger de telles images suppose que l'on ait les compétences pour ce faire. C'est notamment le cas sur un point précis, jugé déterminant pour qui se préoccupe du bien-être des animaux : la perte de conscience et à l'appréciation de la perte de conscience des animaux étourdis avant d'entamer les opérations d'habillage. Tous les scientifiques vous diront que les animaux inconscients – l'inconscience étant une absence d'activité du cerveau prouvée scientifiquement par la technique de l'électroencéphalogramme – ont des mouvements réflexes, c'est-à-dire ne faisant pas intervenir le cortex. Or un mouvement réflexe observé sur une vidéo, notamment lors du mouvement du couteau au moment de la saignée, peut être troublant pour un citoyen lambda qui croira que l'animal est encore conscient, alors qu'il est bel et bien inconscient. Par conséquent, ce genre d'image ne devrait pas être diffusé au grand public qui n'a pas forcément les connaissances scientifiques pour les interpréter. Bien évidemment, cela n'enlève rien à la nécessité de détecter, et de condamner, les mauvais traitements et les actes de cruauté évidents : ils relèvent, je le redis, de la responsabilité du responsable d'établissement qui doit faire respecter la procédure de maîtrise du bien-être animal par son personnel.

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