Intervention de Antoine Comiti

Réunion du 27 avril 2016 à 16h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Antoine Comiti, président de l'association L214 éthique et animaux :

Nous vous remercions d'avoir organisé cette commission d'enquête, et de nous avoir invités à vous présenter notre travail.

Avant de revenir sur les faits révélés par les vidéos de l'association, et d'avancer quelques propositions, je présenterai brièvement notre association et les principes qui nous guident.

L'association L214 a été créée en 2008 par quelques-uns d'entre nous, choqués, déjà, par des vidéos montrant les conditions de vie, mais aussi d'abattage, d'animaux d'élevage. Nous avons eu envie d'en savoir plus et engagé une démarche personnelle : petit à petit, nous avons commencé à militer pour l'intérêt des animaux d'élevage, dont le nombre est considérable – plus d'un milliard d'entre eux, animaux de boucherie mais aussi oiseaux, sans parler des poissons, sont envoyés chaque année à l'abattoir. C'est à ces animaux destinés à être consommés que notre association se consacre.

Notre objectif est de susciter un débat sur les abattoirs, la viande, les pratiques d'élevage, en témoignant des pratiques constatées soit par des vidéos, des images ou des rapports.

Nos concitoyens comme nous-mêmes sont très peu informés sur ce qui se passe dans les abattoirs, probablement parce que nous n'avons pas très envie de le savoir : il s'agit de mettre à mort un nombre énorme d'animaux, ce qui est déjà difficile à regarder ; de plus, dès lors qu'on se doute qu'il n'y a pas toujours de solution simple, on préfère souvent ne pas savoir.

Le travail de l'association consiste donc pour une large part à révéler des pratiques qui ne sont pas toujours, loin s'en faut, le fait d'employés déficients qui ne suivraient pas la réglementation et se livreraient dans le dos de leur employeur à des pratiques condamnables. Les abattoirs par eux-mêmes posent un problème structurel ; on ne le résoudra pas en blâmant des employés et en faisant simplement respecter la réglementation.

Notre association compte 14 000 adhérents ; 230 000 personnes sont abonnées à notre lettre d'information et, dans quelques jours, 500 000 personnes suivront nos actualités sur Facebook. Notre budget s'élevait l'an dernier à environ 1 million d'euros. Ces chiffres doublent chaque année depuis plusieurs années, ce qui nous semble révélateur d'un intérêt croissant de nos concitoyens pour la question animale en général, et pour la question des animaux d'élevage en particulier.

Le nom de l'association, L214, fait référence à l'article L. 214-1 du code rural et de la pêche maritime, qui reconnaît que les animaux sont des « êtres sensibles ». Si nous sommes réunis aujourd'hui pour parler des conditions d'abattage des animaux de boucherie, c'est bien parce que nous pensons que les animaux ressentent ce qui leur arrive – si ce n'est peut-être pas le cas de tous les animaux, c'est très certainement vrai pour les animaux de boucherie. Chiens et chats peuvent souffrir, ressentir de la tristesse ou de la joie – comme celle du chien qui retrouve son maître ; il n'y a aucune raison de penser qu'il n'en va pas de même des vaches ou des cochons.

Une idée nous semble fausse : celle qui tend à considérer que dès lors que ce sont des animaux destinés à être mangés, leur souffrance ou leur bonne vie compterait moins que celle d'un animal familier. Ce « spécisme » semble profondément erroné, et injuste.

Or, notre société établit des différences absolument criantes entre la façon dont elle traite les animaux qui nous sont proches, qui lorsqu'ils approchent de la mort sont souvent euthanasiés aussi doucement que possible, et celle dont elle traite des animaux qui ont seulement la malchance d'appartenir à une autre espèce. Il ne nous semble pas juste d'avoir infiniment moins d'égards pour un cochon que pour un chien.

Ces considérations éthiques posent un problème juridique qui n'a jamais, nous semble-t-il, été traité jusqu'à maintenant. La loi établit en effet des différences de nature entre les animaux que l'on chasse, les animaux que l'on mange et les animaux familiers.

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