Intervention de Brigitte Gothière

Réunion du 27 avril 2016 à 16h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Brigitte Gothière, porte-parole de l'association L :

Je suis désolée, mais les publications scientifiques disent le contraire !

Les connaissances dans le domaine de la nutrition humaine ont également fait d'énormes progrès, et l'on sait maintenant qu'il n'est absolument pas nécessaire de consommer des produits d'origine animale pour être en bonne santé. Cela pose vraiment la question de la légitimité de continuer de mettre à mort un milliard d'animaux chaque année dans les abattoirs français. Ce doit être l'affaire de chacun – mais c'est aussi un problème collectif, puisque la préservation de notre environnement doit nous amener à réduire au moins notre consommation de viande.

Nous aimerions donc provoquer un débat.

Monsieur Bouillon, nous avons eu un contact avec le directeur de l'abattoir de Mauléon juste avant de diffuser nos images. Il nous a appelés en disant qu'il tombait des nues : cela nous semble difficile à croire… S'il va dans son abattoir, il voit forcément des animaux qui reprennent conscience sur la chaîne : leur système d'étourdissement n'est pas au point – il était parfois placé sur les épaules des animaux et non sur la tête… Il s'y pose à l'évidence un problème structurel.

Madame Alaux a posé la question de la sélection, de la formation, de l'encadrement, et Mme Abeille demandait si l'on pouvait en faire le métier d'une vie. Ce sont vraiment des questions essentielles. Les conditions de travail sont de toute façon dures – froid, humidité, sans oublier l'odeur… Psychologiquement, donner la mort, ce n'est pas rien. Pour ces raisons, le turnover dans les abattoirs est important : c'est un travail insupportable, au fond.

Je reviens à la question des causes et des cadences. L'abattoir du Vigan est tout petit, et les cadences n'y sont pas particulièrement élevées. Celles-ci ne sont pas nécessairement au coeur du problème. Je ne dirais pas pour autant que les dysfonctionnements sont principalement le fait des petits abattoirs. Les premières images que nous avons montrées venaient plutôt d'abattoirs importants, et l'on y voit les mêmes problèmes qu'ailleurs : des étourdissements inefficaces, mal faits, etc. Quant au fait que les animaux soient mal maintenus, il s'agit d'un problème économique : il ne faut pas perdre de temps. Ils sont égorgés, et immédiatement relâchés du piège, alors qu'ils devraient y rester jusqu'à ce qu'ils aient perdu conscience ; or le contrôle de l'inconscience n'est jamais fait. La taille de l'abattoir n'est pas en cause.

Il n'y a en effet pas d'abattoirs bio, mais des abattoirs certifiés bio. Les animaux issus de l'agriculture biologique sont encore moins standardisés que les autres, mais les animaux sont de toute façon très différents les uns des autres : on a affaire à des individus, pas à des briques Lego.

Madame Abeille, les premières enquêtes que j'avais réalisées portaient sur les animaux non ambulatoires : ceux qui arrivent blessés, qui ne peuvent plus se déplacer seuls, et qui étaient pourtant encore emmenés dans les abattoirs où ils n'étaient pas traités immédiatement. Non seulement ils étaient transportés alors qu'ils n'auraient pas dû l'être ; mais souvent, les animaux mis de côté ne sont pas traités en premier, conformément à la réglementation, mais en dernier, pour ne pas infecter la chaîne d'abattage, semble-t-il. Le problème que vous soulevez est tout à fait réel. Le rapport de l'OAV, de ce que j'en ai lu, l'évoque également.

S'agissant du représentant de la protection animale dans les abattoirs, c'est une obligation réglementaire européenne pour les établissements les plus grands. Mais ce représentant se heurte à un problème de loyauté vis-à-vis de ses collègues : doit-il rapporter les abus et les problèmes aux services vétérinaires, à son directeur ? Que fait ce dernier de ce qui lui est raconté ?

Pierre Hinard, ancien directeur qualité chez Castel Viandes, a fait des révélations qui lui ont du reste valu d'être viré… Son témoignage, qui ne se limite pas forcément à la protection des animaux et aux mesures visant à réduire leur souffrance, est intéressant. Il a justement voulu dénoncer à sa direction des pratiques illégales qu'ils avaient découvertes : c'est lui qui a été licencié.

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