Intervention de Henri Thébault

Réunion du 4 mai 2016 à 18h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Henri Thébault, membre du conseil d'administration de la Fédération nationale de l'industrie et du commerce en gros des viandes, FNICGV :

La Fédération nationale de l'industrie et du commerce en gros des viandes oeuvre au service des entreprises depuis 1925. C'est une organisation française représentative des entreprises de la viande et des produits dérivés. Elle défend les activités de l'industrie – abattoirs, industrie de découpe, ateliers de transformation et entreprises de préparation –, du commerce en gros et du commerce international.

Les produits commercialisés par les adhérents de la FNICGV portent sur les viandes bovine, porcine, caprine, ovine et chevaline. Notre fédération regroupe 300 membres environ et représente 25 000 salariés.

Il existe diverses commissions au sein de notre fédération, dont une commission « abattoirs ». Gilles Gauthier, le président de notre fédération, a souhaité que ce soit un détenteur d'un outil d'abattage qui vienne s'exprimer devant votre commission d'enquête. D'où ma présence aujourd'hui. Je possède en effet en Bretagne, dans le petit bourg de Quintin cher à l'un de vos collègues, un outil d'abattage de petite dimension, multi-espèces, qui traite 1 800 tonnes par an. Il m'a semblé normal que je vienne devant vous en tant que dirigeant mais aussi acteur dans cet outil où je suis en permanence, afin que vous sachiez comment nous y travaillons et comment nous y prenons en considération le bien-être animal.

En regardant les auditions que vous avez déjà effectuées, nous avons entendu des choses que nous n'acceptons pas. Voilà pourquoi je veux d'ores et déjà vous donner mon sentiment.

Il a été dit que le volet relatif à la protection animale avait pris du retard dans les abattoirs. Ce n'est pas vrai : la plupart des abattoirs ont pris des mesures bien avant que la réglementation ne l'impose. Le bien-être animal est une préoccupation majeure dans nos outils depuis de nombreuses années. Les professionnels ont diffusé, avant 2013, des guides de bonnes pratiques pour nos opérateurs, afin de permettre une meilleure appropriation du règlement. Autrement dit, nous avons anticipé la préoccupation du bien-être animal.

Le règlement européen a introduit des modes opératoires normalisés qui consistent à anticiper tout ce qui peut se passer dans un outil d'abattage. L'opérateur connaît ainsi la conduite à tenir dans chaque situation. Notre commission « abattoirs » organise une réunion téléphonique tous les mois au cours de laquelle les détenteurs d'un outil d'abattage peuvent exposer leurs soucis et leurs attentes.

La formation au certificat de compétence est une formation interne qui dure quarante-huit heures. Une première session théorique a lieu au cours de laquelle différentes situations sont exposées dans des vidéos. Puis on en vient à la session pratique.

Pour ma part, je suis issu du monde rural. J'ai été négociant en bestiaux et éleveur – nous l'étions de père en fils. Lorsque j'ai acheté cet outil d'abattage, il m'a été très facile d'apporter mon expérience et de la transmettre à tout mon personnel. Cela nous a énormément aidés.

Notre fédération fait appel à un organisme extérieur de formation dirigé par un docteur vétérinaire qui apporte son savoir en matière sanitaire en plus de l'aspect bien-être animal.

Je me réjouis que M. Le Foll ait décidé qu'un responsable de la protection animale (RPA) devra être présent dans tous les abattoirs, quels qu'ils soient. On se doit de connaître le respect du bien-être animal dès lors que l'on met une bête en abattage. Il est inadmissible que certains outils n'aient pas de RPA.

Je trouve également normal que le RPA soit un responsable. Il ne s'agit pas de fliquer les opérateurs pendant leur travail, mais de faire le lien entre l'opérateur, son directeur ou tous les services de l'outil d'abattage, au même titre que le responsable qualité qui lève le pouce sitôt que quelque chose ne va pas sur la chaîne d'abattage. Je ne vois donc pas d'inconvénient à ce que l'on donne davantage de force au RPA.

Je veux revenir sur les signes de perte de conscience. Lors de la précédente audition, les intervenants ont bien expliqué les choses. Les représentants de l'association L214 montrent des animaux qui se débattent au bout d'une chaîne. Certes, ils se débattent, mais les représentants de l'association ne savent pas apprécier s'ils sont encore vivants, comme ils le soutiennent, ou morts. Il faut savoir que ces animaux sont morts. Mais ils ont encore certains réflexes qui font qu'ils peuvent continuer à se débattre au bout d'une chaîne.

Un animal étourdi s'effondre. Il ferme les yeux. Il rouvre les yeux quatre secondes plus tard environ. Il arrête de respirer, il tremble, il étend ses pattes avant et pédale avec ses pattes arrière. Mais ce n'est pas parce que l'animal pédale au bout d'une chaîne qu'il n'est pas mort ; encore faut-il le savoir. Il est écrit dans le guide des bonnes pratiques que l'indicateur de chute au premier tir est de 95 %. Autrement dit, c'est le chiffre demandé pour une bonne exécution de l'assommage des animaux. Dans mon abattoir, il peut arriver – une fois tous les quinze jours – qu'un opérateur loupe un animal du premier coup et qu'il doive pratiquer une nouvelle percussion. Si nous avons un si faible taux d'échec, c'est parce que le piège à contentieux est bien adapté, ce qui participe au bien-être animal. Dans l'affaire de l'abattoir d'Alès, on a parlé de l'abattage rituel, ce qui fait que les animaux qui se débattent ; mais ce qui m'a choqué le plus, c'était le piège à contention, qui ne convenait pas du tout. C'est donc un point qu'il conviendra d'éclaircir.

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