Intervention de Gérard Atlan

Réunion du 18 mai 2016 à 9h30
Commission des affaires économiques

Gérard Atlan, président du Conseil du commerce de France, CdCF :

J'ai dit, dès le départ, que l'avenir des commerçants appartenait aux commerçants eux-mêmes. Je suis tout à fait d'accord avec certains députés-maires, qui se rendent compte qu'il est très difficile de susciter l'intérêt des principaux acteurs concernés.

Dans les villes, les commerçants ne s'intéressent pas souvent à ces problèmes. J'ai été commerçant dans ma ville pendant quarante-cinq ans. Quand les choses marchaient bien, tout le monde se trouvait génial. Mais quand elles se sont mises à marcher moins bien, on n'a pas pour autant modifié les horaires, on n'a pas fait de nocturnes, on n'est pas restés ouverts entre midi et treize heures. Il est très difficile de changer les habitudes de mes confrères.

Ils sont indépendants, et donc, isolés. Il faut les regrouper et essayer, avec les managers de centre-ville et les pouvoirs publics, d'intéresser les parties prenantes. Il est vrai que les CCI ne sont pas toujours l'acteur essentiel pour les commerçants, parce que le commerce, c'est compliqué. Voilà pourquoi j'ai dit que le commerce reposait sur trois piliers, voire quatre. Il faut plusieurs acteurs.

D'abord, il faut que les commerçants se prennent en main.

Ensuite, on disait, à une certaine époque, que le commerce, c'était l'emplacement. Je pense que l'avenir des commerçants passe désormais par la formation. Si le commerçant indépendant qui veut évoluer ne l'a pas compris, il lui sera très difficile de faire face à ses frais.

Il ne faut pas oublier que nous subissons tous la crise économique et qu'elle retentit forcément sur le commerce et sur le centre-ville. On a aussi trop tendance à taxer le commerce physique, dans la mesure où on l'a sous la main, par rapport au commerce en ligne.

Auparavant, 100 % des ressources collectées par la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA) venaient abonder le FISAC. Aujourd'hui, malgré l'augmentation de la TASCOM, sur 200 millions d'euros, 42 millions seulement abondent le FISAC.

Vous avez posé une question sur l'instauration de zones franches en centre-ville, ouvertes à tous les secteurs. C'est compliqué. Il faut savoir qu'il y a des commerçants heureux dans des rues difficiles. Ils ont fait en sorte que le client fasse l'effort de venir les voir, parce qu'il sait que, chez eux, il n'aura peut-être pas le meilleur prix, mais il aura le meilleur conseil et le meilleur accueil.

Quant au commerce en ligne, c'est une chance pour les commerçants. Jusqu'à présent, il était pratiqué par des pure players, mais les grandes enseignes s'y mettent de plus en plus. C'est le moment, pour le commerçant indépendant, d'en faire autant. Certaines villes mènent des actions de qualité, comme la création du site « achetezaupuy.com » au Puy-en-Velay. Si l'on parvient à regrouper les commerçants sur cette démarche innovante, je pense qu'on arrivera à les faire bouger.

Pour faire revenir le commerce là où il existait auparavant, ce n'est pas simple, mais les boutiques éphémères, par exemple, permettent d'éviter les zones de désertification commerciale au milieu d'une rue commerçante.

Commerce et culture, commerce et loisirs, commerce et tourisme fonctionnent bien ensemble. Mais quand on dit aux touristes étrangers, qui ont l'habitude de payer en espèces, que c'est interdit en France au-delà de 1 000 euros, ils vont dans d'autres pays, comme la Suisse ou l'Allemagne. Ma fille vit en Belgique et, toutes les fins de semaine, sa mère va retirer de l'argent à la banque, parce qu'elle veut payer tous ses achats en espèces. C'est la culture dans laquelle baignent certains consommateurs européens et extra-européens. Il ne faut pas y voir je ne sais quelle volonté de maintenir une part d'opacité.

Nous attendons aussi une plus grande stabilité fiscale. Laissez-nous souffler un peu, que nous soyons simples citoyens ou commerçants ! Aujourd'hui, il est difficile de se dire qu'on va investir dans le commerce, parce qu'on ne sait pas quelles seront les lois dans quelques années.

Pour ma part, je vais vous faire une confidence… Je vais arrêter mon activité de président du Conseil du commerce de France pour monter une entreprise qui pourra employer trois ou quatre salariés dans les années à venir. Je crois au commerce indépendant, mais de grâce, Mesdames et Messieurs les députés, donnez aux commerçants indépendants une stabilité fiscale et la possibilité de gagner un peu plus que le SMIC, alors qu'ils font deux fois trente-cinq heures par semaine !

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