Intervention de Bernadette Laclais

Séance en hémicycle du 31 janvier 2013 à 15h00
Indépendance de l'expertise en matière de santé et d'environnement et protection des lanceurs d'alerte — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernadette Laclais :

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui nous offre la possibilité de renforcer nos procédures de sécurité sanitaire et environnementale et, souhaitons-le, d'aider la société civile à faire confiance à notre système de veille sanitaire et à se réconcilier avec lui.

En effet notre système s'est structuré sous l'effet de crises sanitaires qui, depuis plus de vingt ans, ont conduit à créer des agences d'expertise scientifique.

Pourtant, en dépit de l'important travail de qualité que ces agences réalisent, de nouveaux risques, de nouvelles crises émergent. Les commissions d'enquête et les missions d'information constituées après chaque crise sanitaire ont permis de mettre en lumière des problèmes à propos desquels souvent, en amont, des citoyens, des salariés, des chercheurs, des praticiens avaient tiré la sonnette d'alarme bien avant que les pouvoirs publics n'aient seulement envisagé d'agir.

Parfois, ces lanceurs d'alerte ont été confrontés au doute, au déni, pire à l'intimidation voire à la calomnie, ou aux menaces, directes ou indirectes sur leur emploi. Le texte que nous examinons aujourd'hui présente donc un double intérêt.

Tout d'abord, il définit les conditions de l'indépendance de l'expertise et de la déontologie. Ensuite, il protège tous ceux qui auraient connaissance d'un danger pour la santé ou pour l'environnement afin de leur permettre d'en informer les autorités compétentes, en garantissant la reconnaissance et la protection des lanceurs d'alerte, en assurant le suivi des alertes une fois celles-ci lancées.

Le texte initial a été profondément modifié et amendé en commission. De notre point de vue, il va dans le bon sens.

Le rôle de la commission de déontologie a été reprécisé : c'est un rôle consultatif et non plus normatif, un rôle de transmission et non d'instruction des alertes, la saisine de la commission est plus restreinte, il est prévu un rapport annuel au Parlement dans lequel la commission émet des recommandations sur toutes les questions d'expertise. Cela nous semble satisfaisant au regard de l'exigence de transparence constitutive de l'indépendance

S'agissant des lanceurs d'alerte et de leur protection, ce projet de loi témoigne de la volonté de renforcer la démocratie sanitaire et environnementale en protégeant le citoyen « contributif » dès lors qu'il y a bonne foi et non diffamation. Celui qui dépose doit pouvoir le faire sans crainte et en étant protégé. C'est à l'État qu'il appartient d'assurer la protection. À ceux qui craindraient d'éventuels abus, il faut dire tout de suite que la notion d'alerte est précisément définie : celui qui lance une alerte doit agir de bonne foi sous peine de sanctions prévues par le code pénal pour dénonciation calomnieuse. Il s'agit d'entendre les alertes, de les répertorier et de les transmettre aux personnes compétentes afin que les problèmes soulevés soient traités et, si nécessaire, résolus.

Il ne s'agit pas d'assurer la primauté de l'alerte sur l'expertise scientifique. C'est un système complémentaire et important qui permet l'indépendance de l'expertise et la protection des lanceurs d'alerte d'une manière complémentaire. Il ne s'agit pas d'opposer experts et profanes – là n'est pas la question –, encore moins de remettre en cause la parole des experts, mais de renforcer l'indépendance et la transparence de l'expertise et de la compléter utilement par un système pertinent de gestion des alertes. Chacun doit pouvoir trouver sa place, sa juste place.

Le groupe socialiste souhaite donc l'adoption de cette proposition de loi qui pourra encore être enrichie dans le débat par des amendements du rapporteur. Notre groupe proposera pour sa part la suppression de l'article 16, nous y reviendrons. Ce texte est le fruit d'une longue réflexion, engagée de longue date, sur l'expertise scientifique et technique : non seulement sur ces principes mêmes, mais aussi sur les règles déontologiques qui doivent s'y appliquer et sur la nécessaire participation de la société civile pour les valider.

Je tiens à saluer tous ceux qui se sont engagés de longue date pour faire avancer cette réflexion, en particulier mon collègue Gérard Bapt dont beaucoup connaissent la persévérance sur ce sujet, que nous pourrons encore constater dans quelques instants...

Je tiens aussi à saluer la collaboration de nos différents groupes de la majorité pour parvenir à un texte qui, je le crois, marquera une étape importante : enrichi entre sa première version et celle que nous examinons aujourd'hui, il sanctionne les dérives, préserve des excès, mais crée incontestablement les conditions d'une meilleure sécurité sanitaire et environnementale.

Je veux remercier les rapporteurs, Jean-Louis Roumegas et Marie-Line Reynaud, pour le travail constructif qu'ils ont fait, ainsi que ma collègue Fanny Dombre-Coste.

Je voudrais également souligner qu'une meilleure démocratie sanitaire et environnementale est nécessaire pour aller – pourquoi pas, demain, nous l'espérons en tout cas, grâce à ce texte et à d'autres – vers une réconciliation de nos concitoyens avec leur système de veille sanitaire, si souvent mis à l'épreuve. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

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