Intervention de Christian le Lann

Réunion du 19 mai 2016 à 10h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Christian le Lann, président de la CFBCT :

Je tiens avant toute chose à me féliciter de la création de cette commission d'enquête que nous avons été les premiers à réclamer, après l'association L214, lorsque nous avons visionné les images d'actes de barbarie – car on ne saurait les appeler autrement – tournées dans les abattoirs, qui ont révolté tous les artisans bouchers français. La CFBCT s'est fait leur porte-parole en plusieurs occasions, y compris sur les chaînes parlementaires où nous avons débattu avec L214 ainsi que la députée Laurence Abeille et la sénatrice Sylvie Goy-Chavent. Devant l'horreur de ces images, nous avons dénoncé le sadisme et la barbarie et souhaité que toute la lumière soit faite sur ce qui se passe dans certains abattoirs.

Gardons-nous toutefois de croire que ces pratiques sont généralisées. Un tiers des artisans bouchers – environ 7 000 sur les quelque 20 000 bouchers qui exercent en France – sont des acheteurs en vif qui utilisent directement les services des abattoirs. Certains d'entre eux nous ont, il est vrai, fait part de dysfonctionnements occasionnels lors d'abattages rituels, les animaux ayant alors été abattus sans étourdissement – parce que les chaînes d'abattage étaient demeurées en mode rituel – en dépit du fait que jamais les artisans en question n'avaient demandé qu'il soit procédé ainsi.

Très sensible au bien-être animal, la CFBCT est également opposée aux modes d'élevage productivistes et aux fermes industrielles. Dans sa publication mensuelle, La Boucherie française, notre confédération préconise régulièrement un élevage traditionnel et en plein air, l'interdiction des organismes génétiquement modifiés et des hormones de croissance. De même, nous prônons une consommation raisonnée de viande, qu'il vaut mieux manger en moindre quantité mais de meilleures qualités. Pour nous, la viande est une matière noble issue du vivant. Le boucher se rend immédiatement compte en travaillant une carcasse si un animal a été stressé : les viandes fiévreuses ou la présence d'hématomes sont la marque d'un problème de stress ou de maltraitance. La qualité d'une bonne viande dépend de nombreux facteurs, parmi lesquels les conditions d'abattage.

Face à ces problèmes, nous avons pris conscience qu'il fallait agir. La CFBCT élabore actuellement une charte des viandes éthiques. Pour ce faire, nous avons réuni plusieurs intervenants : des chercheurs et des philosophes comme Frédéric Lenoir, mais aussi des associations de défense du bien-être animal telles que l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA) et l'organisation Compassion in World Farming (CIWF), ainsi que des entreprises du monde de la viande. Nous travaillons à la création d'un label de viande éthique, qui devrait être créé dans les prochains mois.

Pour information, la CFBCT, fondée il y a 122 ans sous la forme d'un syndicat professionnel, est l'organisation professionnelle des bouchers, bouchers-charcutiers et traiteurs. Au service des artisans, elle s'attache à mener des actions collectives valorisant la profession et à représenter et défendre le métier auprès des pouvoirs publics. Sa mission principale consiste à aider la profession qu'elle représente à s'inscrire durablement dans les habitudes de consommation des Français et dans l'économie du pays. Elle intervient dans le coeur du métier tout en tenant compte de l'évolution constante de la consommation. La confédération propose de nombreux services, dont le conseil et l'information des artisans bouchers, et assure une véritable proximité auprès des professionnels. Elle se décline en structures départementales et en fédérations régionales.

Avec un chiffre d'affaires de plus de 6 milliards d'euros par an, le secteur de la boucherie-charcuterie emploie 80 000 personnes – chefs d'entreprise, conjoints, aides familiaux, salariés, apprentis. On dénombre près de vingt mille boucheries artisanales en France – étant entendu qu'il s'agit de boucheries traditionnelles qui, dans la Nomenclature d'activités françaises (NAF), appartiennent à la sous-classe 47.22Z.

Enfin, nous formons plus de 9 500 apprentis, un nombre que nous sommes parvenus avec fierté – et à force de communication – à faire passer en sept ans de 15 % à 20 % dans les centres de formation d'apprentis (CFA). Nous avons aussi la chance de disposer d'une école nationale professionnelle qui propose des programmes de formation continue et reçoit des délégations étrangères – venues d'Europe et au-delà – pour faire rayonner les techniques françaises de découpe de la viande, preuve que nombreux sont ceux qu'intéressent le travail et le savoir-faire des artisans bouchers français. Cette école forme des personnes issues d'horizons très variés qui souhaitent se reconvertir dans la boucherie, et délivre des certificats de qualification professionnelle (CQP).

La CFBCT est membre de la Confédération internationale de la boucherie et de la charcuterie (CIBC), où nous échangeons principalement avec nos homologues européens sur tous les problèmes liés au secteur de la viande. Nous sommes également membres de l'association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (INTERBEV) et de l'interprofession nationale porcine (INAPORC). Nous siégeons à la Confédération générale de l'alimentation de détail (CGAD) ainsi qu'à l'Union professionnelle artisanale (UPA).

Enfin, la CFBCT emploie douze salariés, dont un secrétaire général, et s'est dotée de commissions thématiques – économie, éducation, formation – et dispose d'un pôle de recherche et d'innovation. Auquel s'ajoute, j'en ai parlé plus haut, ce formidable outil de rayonnement qu'est notre école nationale supérieure, qui permet de faire rayonner la boucherie artisanale en Europe et dans le monde entier.

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