Intervention de Patrice Carvalho

Réunion du 1er juin 2016 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrice Carvalho :

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le rapport de nos collègues, Jean-Louis Roumégas et Martial Saddier, sur l'évaluation des politiques publiques de lutte contre la pollution de l'air.

Il donne tout d'abord la mesure de ce que représente cette pollution en termes de santé publique et de coûts. Par là même, il établit l'urgence d'agir. Ainsi le coût annuel de la mortalité et de la morbidité associées à la pollution de l'air extérieur s'évalue à 30 milliards d'euros selon la Cour des comptes ou entre 68 et 97 milliards d'euros pour la commission d'enquête du Sénat sur le coût économique et financier de la pollution.

Le coût estimé de la prise en charge de quatre maladies respiratoires représente un à deux milliards d'euros pour le système de soins, soit 15 % à 30 % du déficit de la branche maladie. J'ajoute que, dans nos villes, 60 % de la population respire un air pollué et qu'on enregistre, chaque année, une augmentation des maladies respiratoires et cardio-vasculaires dues notamment aux particules fines.

Le rapport contient toute une série de préconisations, avec parfois des avis différents entre les deux rapporteurs. Je m'en tiendrai à quelques points. Tout d'abord, la gestion des pics de pollution : ceux intervenus en mars 2014, puis en mars 2015, en Île-de-France et sur le nord du pays, ont montré que nous avions un problème dans l'anticipation et dans la réactivité.

Au final, les mesures prises l'ont été alors que le pic de pollution s'achevait. Il en est ainsi parce que la chaîne de décision est d'une complexité et d'une lourdeur, qui paralysent l'action. Elle fait, en effet, intervenir le préfet de police, le préfet de région, la région, la ville de Paris, le ministère de l'écologie, les uns et les autres étant tiraillés entre la nécessité d'intervenir et la crainte de mécontenter l'opinion publique. Il faut simplifier tout cela.

En janvier 2016, nous avions examiné une proposition de loi de nos collègues écologistes visant à l'automaticité du déclenchement de mesures d'urgence en cas de pic de pollution. J'avais soutenu cette idée. J'ajoute que la décision doit relever d'une seule autorité. Celle du préfet semble la mieux adaptée, comme le proposent les rapporteurs.

Nous étions, avec ce point, sur l'action contre les effets de la pollution. Venons-en à l'action sur les causes et, en particulier, sur un sujet qui fâche, à savoir la fiscalité. Les rapporteurs ont des avis divergents en ce qui concerne la fiscalité sur les carburants. Jean-Louis Roumégas est partisan de supprimer le différentiel de taxation entre le gazole et l'essence. Durant des années, les automobilistes ont été incités à s'équiper en diesel.

Je suis député d'une circonscription à la fois rurale et semi-urbaine. Les populations ont besoin d'un véhicule pour leur déplacement et, comme ils sont conduits à faire des trajets de plusieurs kilomètres, ils se sont équipés en véhicules diesel. Et à présent, il faudrait les pénaliser ? Je suis plus proche de ce que préconise Martial Saddier. D'abord, les moteurs diesel d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'hier. Les technologies ont considérablement évolué. Ce à quoi il faut aider, c'est au renouvellement du parc diesel d'ancienne génération et des aides incitatives sont nécessaires.

Second point relatif à la fiscalité : la taxation poids lourds. En l'occurrence, je me sens plus proche de Jean-Louis Roumégas. Je ne reviens pas sur le fiasco de l'écotaxe. (Sourires) Nous en avons beaucoup parlé ici. Il reste que le transport de marchandises par la route est le moins taxé de tous les modes de transports, alors qu'il est le plus polluant et le moins sûr.

Un rééquilibrage est nécessaire, si nous voulons que s'opère un transfert vers des modes de transports écologiquement plus vertueux, à savoir le rail et la voie d'eau. Pour y parvenir, il faut actionner, pas exclusivement mais notamment, le levier de la fiscalité. Dans le cas contraire, nous pourrons nous fixer les plus ambitieux objectifs, nous n'aurons aucune chance de les atteindre.

Aujourd'hui, le diesel ne pollue pas davantage que l'essence. Mais Paris souffre d'être traversé tous les jours par des voitures et des camions qui font des trajets longue distance, par exemple pour aller jusqu'à Bordeaux. L'Île-de-France devient un poumon de pollution (Sourires), car rien n'est fait pour détourner ces véhicules, rien n'est prévu dans le projet du Grand Paris.

Quant aux particules fines, le loess qui a été apporté par effet éolien et qui rend les terres fertiles n'est rien d'autre que cela à l'origine… Il serait possible d'y voir une richesse minérale qui se dépose au cours du temps. Les pneus et les plaquettes de frein seront toujours nécessaires pour conduire une voiture, c'est une question de mécanique pure. Comment voulez-vous les supprimer ?

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