Intervention de Yves Daniel

Réunion du 8 juin 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Daniel :

Je ne suis pas un expert, ni un scientifique, ni un philosophe, ni non plus un anthropologue, mais seulement un député, paysan, éleveur et tueur – je n'entends pas vous faire peur en vous disant cela ; c'est qu'à la ferme, j'ai commencé à tuer des animaux à l'âge de quatorze ans ; je n'en tire pas de fierté particulière mais c'est simplement une réalité de mon parcours et cela ne m'autorise aucune vérité. La vérité ne peut être que collective et le sujet dont nous discutons est très complexe, un peu à l'image de notre débat sur le projet de loi sur la fin de vie, question sur laquelle il y a autant d'avis que d'individus.

De quoi parlons-nous ? De la lutte contre la maltraitance, contre la souffrance des animaux au moment de leur mise à mort. Nous parlons d'êtres sensibles au regard du droit mais ce qui est aussi une réalité. Mais nous, les humains, sommes aussi des êtres sensibles mais également dotés de sentiments, donc des êtres sentimentaux.

Nous parlons d'« abattage » des animaux. Or il y a sur cette terre des êtres vivants, animaux et végétaux, et je fais le lien entre l'abattage des animaux et l'abattage des arbres. Il y a donc peut-être des raisons pour qu'on ait employé ce mot-là. Je n'ai pas d'explication, mais je me pose la question.

Notre réflexion porte sur notre rapport aux animaux. Or je constate une importante dérive : comme nous sommes des êtres sensibles et sentimentaux, nous sommes parfois dans la confusion en entretenant avec l'animal un rapport sentimental. Est-ce possible ? Je pense que non : il ne doit pas y avoir de confusion. Lorsque nous parlons de sensibilité, de violence, de souffrance… nous les percevons en tant qu'êtres, encore une fois, sensibles et sentimentaux. Or nous ne pouvons pas nous mettre à la place des animaux.

Ce qui importe est de préserver l'existence humaine : elle doit prendre en compte l'existence des autres vivants, animaux comme végétaux, en veillant à préserver les nécessaires équilibres entre eux pour que la vie soit possible.

Aussi, puisque nous, les humains, allons traiter de cette question, je vous alerte afin que nous ne tombions pas dans la confusion. Il faut respecter les objectifs que nous nous sommes fixés, et si, certes, nous devons réfléchir en termes de droit, nous devons nous appuyer sur des expertises scientifiques, mais également pratiques, sans y mêler de sentiments. L'exercice est difficile, la question étant de savoir si nous sommes d'accord pour considérer que, pour nous, la priorité est la vie de l'humanité.

J'écoute avec intérêt vos propos éclairants qui peut-être contribuent à me rendre plus objectif dans la mesure où, comme je l'ai indiqué, mon rapport à l'animal est celui d'un éleveur tueur.

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