Intervention de François Hochereau

Réunion du 9 juin 2016 à 10h15
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

François Hochereau, sociologue à l'Institut national de la recherche agronomique, INRA :

Aujourd'hui, un vétérinaire ne se prononce plus en amont sur les modifications techniques qu'envisage un abattoir : c'est seulement après qu'il dira si cela va ou pas. Cela s'explique notamment par le fait qu'il n'existe plus de référentiel national, chaque abattoir mettant en place sa propre démarche qualité. C'est d'ailleurs en partie pour en savoir plus sur les procédures d'évaluation des vétérinaires et la position de l'ANSES que les grands abattoirs industriels ont consenti à nous recevoir, alors qu'il s'agissait davantage pour les petits abattoirs et les abattoirs de taille moyenne de s'informer ou de glaner des renseignements sur la concurrence.

Il faut dire ici un mot de la gestion des incidents, qui peuvent affecter l'évaluation du bien-être animal. On s'est beaucoup focalisé, dans l'usage qui a été fait des guides de bonnes pratiques, sur les fiches KOOK, qui sont des fiches de procédure, dont la mise en oeuvre n'a guère posé de problème. En cas d'incident en revanche – et cela arrive fréquemment car un animal est un être vivant qui peut se blesser ou mal réagir –, c'est la panique et tout le monde souffre : les animaux, les hommes, l'organisation. Ce qui intéressait le plus les RPA dans la formation, c'était d'échanger avec les autres RPA pour savoir comment ils géraient ces situations-là. Si des abattoirs se sont modernisés pour minimiser les risques d'accidents, ce n'est pas le cas de bon nombre d'entre eux, dans lesquels le rapport quotidien entre l'homme et l'animal reste dangereux et susceptible de mal tourner. Les dérives surviennent alors moins parce que les opérateurs sont fatigués que parce qu'ils sont dépassés par la situation. La question de la gestion des incidents se pose notamment dans le rapport d'évaluation des éléments de bien-être animal.

Se pose notamment le problème des animaux qui sont déchargés la nuit, sur décision du transporteur qui a planifié ainsi la rotation de ses camions, en l'absence du vétérinaire ou du RPA : il n'y a plus de passage de relais. D'où, dans certains abattoirs, l'installation de caméras sur les quais de débarquement, qui permettent de vérifier, dans le cas d'un animal blessé, s'il l'était déjà lorsque le transporteur l'a déchargé.

Face à un animal en souffrance, il est compliqué pour le RPA de prendre la bonne décision : ne pas l'abattre peut lui valoir un procès-verbal de la part du vétérinaire qui l'accusera de l'avoir laissé souffrir ; l'abattre l'expose à une mise en accusation de la part du propriétaire de l'animal, qui lui reprochera d'avoir tué sans raison un animal en bonne santé. C'est toute la question de l'imputation de la responsabilité.

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