Intervention de Grégoire Loiseau

Réunion du 22 juin 2016 à 18h15
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Grégoire Loiseau, professeur à l'Université Paris I :

En ce qui concerne la négociation collective, le législateur a déjà posé des obligations de résultat en imposant aux entreprises de parvenir à un accord, assorties d'une sanction non négligeable de 1 % de la masse salariale pour celles qui n'auraient pas négocié et, à défaut de parvenir à un accord, élaboré un plan de l'employeur de façon unilatérale. Cela n'existe pas au niveau de la branche mais je ne vois pas d'impossibilité juridique à l'imposer à ce niveau. Il existe une seule obligation de négocier au niveau des branches, depuis la loi du 14 juin 2013, qui a fixé un minimum de seize heures hebdomadaires pour les salariés au temps partiel ; les entreprises des branches où sont employés beaucoup de salariés à temps partiel ont eu l'obligation de négocier sur cette question. Mais le résultat n'est pas très probant, il faut le dire : de nombreuses branches n'ont toujours pas négocié alors que la négociation aurait dû aboutir il y a un an et demi. Mais il peut être de l'intérêt bien senti des syndicats d'employeurs comme des salariés de négocier un accord plutôt que de se voir imposer une obligation par le bâton de la loi…

À ce propos, plus cette discussion se prolonge, plus je pressens qu'il faudra un texte législatif plutôt que réglementaire, ne serait-ce que pour surmonter l'obstacle lié au respect du droit de propriété. Ce droit, aussi absolu soit-il, est aménageable ; on admet depuis toujours que l'intérêt général puisse justifier des limites.

Ces limites, j'en vois deux, liées aux finalités et des modalités de consultation de ces enregistrements. La première est la sécurité des personnes, autrement dit tout ce qui relève des prérogatives du CHSCT. Il est à noter qu'une loi de 2013 a élargi les compétences de celui-ci aux matières environnementales. De ce fait, les préoccupations de sécurité et d'environnement pourraient faire office de leviers pour exciper du principe d'intérêt général. On pourrait par ailleurs imaginer un accès des représentants du personnel, et notamment du CHSCT, aux images pour vérifier que les pratiques supposées être l'exécution des ordres de l'employeur sont conformes aux textes.

Seule la loi, me semble-t-il, pourrait permettre un visionnage par l'administration. Dans ce cas également, je crois que l'on pourrait utiliser le biais de l'intérêt général, lié à la sécurité – entendue au sens large, dans la mesure où, si le sort de l'animal est scellé, encore doit-il disparaître dans les conditions les plus acceptables ou les moins inacceptables possibles. Je rappelle à cet égard que, dans le code pénal, l'animal n'est ni dans le titre relatif aux personnes ni dans celui relatif aux biens, mais dans celui des « autres infractions ». Cela montre la préoccupation du législateur pour les questions de santé et de sécurité des animaux, même sur leur dernier chemin.

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