Intervention de Joël Mergui

Réunion du 23 juin 2016 à 9h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Joël Mergui, président du Consistoire central israélite de France :

Mettre de l'ordre dans l'abattage rituel ? Il serait plus juste de dire, après la diffusion de ces vidéos qui ont entraîné la création de cette commission, que c'est dans l'abattage en général qu'il faudrait mettre de l'ordre ! Je n'exclus donc pas de cette exigence l'abattage rituel. Nous avons, M. Kbibech et moi-même, une mission de responsabilité – comme vous – et, au fur et à mesure de nos réflexions, nous nous rendons compte qu'il y a toujours matière à perfectionner un système. Je reste donc à l'écoute de toutes les suggestions dès lors qu'elles restent compatibles avec la règle religieuse et qu'elles ne nous empêchent pas de répondre aux besoins de consommation de nos communautés, tout en respectant, bien sûr, les règles de notre pays. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons été immédiatement favorables aux modifications réglementaires imposant la délivrance d'un certificat d'hygiène, d'un certificat d'aptitude, et tous nos opérateurs, nos chokhatim s'y sont conformés.

Je reviens tout de même sur un point : notre pays s'honorerait de décider que l'abattage rituel n'est plus une dérogation. Peut-être vous aurai-je convaincus… Peut-être, au fur et à mesure de la lecture des textes, finira-t-on par admettre qu'il s'agit d'un mode d'abattage acceptable. Il est difficile d'avoir l'impression, après des siècles d'organisation de la communauté juive, que, pour pouvoir pratiquer notre culte, il faille bénéficier d'une mesure dérogatoire. Et si la France décidait, après réflexion et quitte à imposer davantage de règles encore pour la chekhita, qu'il y a plusieurs possibilités d'abattre dont la saignée rituelle, encadrée de telle ou telle façon ? Peut-être un jour serai-je entendu ; ce serait une bonne chose alors que nous voulons donner l'exemple à l'Europe de ce qu'est le vivre-ensemble et de permettre l'exercice de la liberté de conscience sans entraver le bien-être animal ni choquer le reste de la société, qui sait bien les efforts qui sont faits pour le respecter. De la même façon que nous étions, sur la question de l'écologie, tous d'accord pour défendre une certaine vision du monde, nous sommes tous ici des défenseurs du bien-être animal.

Pour ce qui est de votre question concernant le nerf sciatique, il s'agit d'un problème religieux sur lequel je ne m'étendrai pas, n'étant pas rabbin moi-même. Les juifs ont interdiction de consommer le nerf sciatique qui se trouve dans la partie postérieure de la bête. Dans certains pays, comme en Israël, où la production est très importante, des experts savent décortiquer la partie arrière de l'animal pour extirper le nerf sciatique et la rendre propre à la consommation. Cette question revient souvent pour nous et pas seulement de votre fait, dans la mesure où nous-mêmes sommes lésés : nous envoyons un chokhet, nous le finançons et nous ne pouvons prendre que la moitié de la bête… Si nous pouvions utiliser la totalité, ce serait tant mieux pour notre communauté. Malheureusement, c'est une opération complexe et les spécialistes qui savent le faire sont très peu nombreux. Nous en avons encore discuté entre nous il y a quelques années et peut-être y viendrons-nous pour des raisons économiques.

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