Intervention de Michel Combes

Réunion du 29 juin 2016 à 9h30
Commission des affaires économiques

Michel Combes, président-directeur général du groupe SFR :

Je vais tout d'abord répondre à la question de Madame Corinne Erhel concernant les propos de M. Patrick Drahi de la semaine dernière sur la situation de SFR. Je pense que ses propos ne surprennent pas les collaborateurs de l'entreprise et s'inscrivent dans l'environnement dans lequel intervient SFR. L'adaptation de SFR est une nécessité absolue dans un monde qui évolue très vite et dans lequel l'ensemble de nos concurrents se sont adaptés au cours des cinq dernières années, à l'image de Bouygues Telecom. D'autres n'ont même pas eu besoin de s'adapter car ils sont apparus récemment. Pour diverses raisons, cette adaptation n'a pas été faite par SFR en temps et en heure. Il est donc assez évident que des adaptations seront nécessaires pour que SFR reste compétitif sur un marché très exigeant – le législateur ayant voulu qu'il y ait quatre opérateurs.

Nous avons pris des engagements sur l'emploi, à la demande du Gouvernement et des partenaires sociaux, ce que beaucoup d'entre vous ont rappelé. Nous nous sommes en effet engagés à ne procéder à aucun plan de départ jusqu'à mi-2017 et nous respecterons évidemment ces engagements. Je souligne néanmoins qu'il s'agit d'une situation inédite – avec un engagement de trois ans–, frustrante pour les salariés, qui comprennent que des adaptations seront nécessaires, et pénalisante pour l'entreprise, qui ne peut pas être aussi compétitive que ses concurrentes. Nous travaillons déjà, dans la concertation avec les organisations syndicales, pour trouver une solution et nous privilégions le dialogue avec les partenaires sociaux. M. Michel Paulin a d'ailleurs passé la journée hier avec ces derniers pour accélérer la transformation de notre entreprise.

Il y a chez SFR des équipes absolument formidables mais également de très nombreuses rigidités. Il faut garder à l'esprit que SFR est la résultante de multiples rapprochements d'entreprises ; nous avons encore aujourd'hui de multiples systèmes d'information, l'entreprise est organisée en silos et il y a des redondances sur l'ensemble de nos fonctions, notamment s'agissant des fonctions support. Cela pénalise l'entreprise pour répondre rapidement aux attentes de nos clients et pour proposer des évolutions à nos collaborateurs. Les salariés ont ainsi des statuts différents, ce qui crée de grandes rigidités, à un moment où nous faisons face à la concurrence à la fois des opérateurs français et des grands acteurs du numérique, qui ne souffrent pas des mêmes rigidités. Pour nous, l'adaptation de l'entreprise est une nécessité absolue pour garantir son développement et notre capacité à continuer à augmenter nos investissements dans les réseaux et dans les contenus. Je pense donc qu'il est urgent que SFR dispose d'une structure plus efficace.

S'agissant des fournisseurs de SFR, je pense que, pour se développer, une entreprise a besoin que ses collaborateurs aient envie de travailler et de développer un projet. C'est pour cette raison que nous devons nous transformer pour leur donner des perspectives de développement. Mais nous avons également besoin de partenaires et de fournisseurs qui nous accompagnent sur la durée. Nous avions dans le passé une multitude de fournisseurs et nous avons fait le choix, difficile, de réduire leur nombre. Ce choix s'accompagne de notre engagement d'accompagner des fournisseurs moins nombreux dans leur développement en France et à l'international. Par exemple, nous avons décidé d'associer Sagemcom, qui nous fournit les box installées chez les clients, à notre développement sur le marché américain, ce qui lui ouvre des perspectives considérables étant donné que nous sommes désormais le quatrième câblo-opérateur aux États-Unis.

Nous avions également été critiqués, vous l'avez rappelé, sur les modalités de paiement de nos fournisseurs. Il est vrai que durant la période où nous avons intégré plusieurs entreprises dans le groupe SFR, nous avons eu quelques difficultés, ce qui est plutôt logique. Depuis désormais plusieurs mois, nous sommes revenus à une situation normale. Sur ce point, il me semble que nous avons été un peu trop injustement critiqués et je m'étonne du nombre de procédures qui ont été engagées à l'encontre de l'entreprise au cours des mois qui viennent de s'écouler.

Sur l'investissement, cela reste la priorité absolue de l'entreprise. Nous avons une volonté viscérale de développer l'investissement, dans le fixe et le mobile, d'être à l'avant-garde des nouvelles technologies, dans tous les domaines, en travaillant avec l'ensemble des acteurs qui peuvent nous proposer l'innovation adéquate. Je souhaite d'ailleurs que l'Europe se dote d'une force de frappe technologique, notamment sur la 5G. Nous avons un rôle à jouer en la matière pour être sûrs que nous accompagnerons les champions européens dans ce domaine. J'y serai vigilant.

Madame Laure de la Raudière m'a demandé de faire un panorama des opérateurs français et de préciser le positionnement de chacun d'entre eux. Je vais être prudent sur ce point puisqu'il appartient plutôt à chacun des opérateurs de se positionner lui-même. Je pense que l'on peut établir une classification en deux groupes. D'un côté, certains opérateurs investissent dans des infrastructures et en ont fait la priorité de leur stratégie. Cette catégorie regroupe Orange et SFR, qui investissent très lourdement dans ce domaine chaque année, dans des proportions redevenues comparables. D'un autre côté, d'autres opérateurs ont un modèle de fonctionnement fondé sur l'utilisation des infrastructures de leurs concurrents.

Au sein de la première catégorie, Orange et SFR disposent de fondamentaux similaires. Ils souhaitent offrir un réseau et disposer d'une offre commerciale de la meilleure qualité possible. Il existe toutefois des stratégies de différenciation : SFR a fait le pari de se différencier par les contenus car nous pensons qu'il s'agit d'un élément d'attractivité très fort pour les clients. Nous souhaitons qu'un client qui souhaite la meilleure offre télévisuelle possible sache que SFR lui offrira le meilleur contenu, quel que soit le moment où il s'abonne. D'où la nécessité pour nous de faire des investissements dans le contenu. Orange est davantage positionné sur l'offre de services transactionnels, notamment dans le domaine financier, ce qui constitue également une perspective de développement intéressante. À terme, les positionnements respectifs d'Orange et de SFR évolueront peut-être. Orange regarde ce que nous faisons, et vice-versa. Quant aux opérateurs qui investissent moins dans les infrastructures, ils ont un positionnement plus classique par les prix, qui est assez différent du nôtre, qui se fonde sur la qualité fournie au client.

Concernant la numérotation alternative, nous n'avons pas encore finalisé nos réflexions en la matière. Nous essayons de trouver une numérotation qui corresponde à la fois aux attentes de nos clients, qui payent pour un service de télévision et souhaitent qu'on leur propose des chaînes de qualité qu'ils puissent retrouver dans une numérotation simple, tout en garantissant que les chaînes importantes, en particulier celles que vous avez citées –LCP, Public Sénat ou Arte –, trouvent leur place dans la numérotation qui est la nôtre. Nous travaillons actuellement sur plusieurs possibilités et nous aurons des propositions définitives après l'été.

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