Intervention de Maurice-Pierre Planel

Réunion du 22 juin 2016 à 9h00
Commission des affaires sociales

Maurice-Pierre Planel, président du Comité économique des produits de santé, CEPS :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je commencerai par exposer le rôle du Comité économique des produits de santé (CEPS) au sein du système de gouvernance du médicament.

Nous sommes compétents en matière de produits remboursables en ville, c'est-à-dire des produits qui sont disponibles dans les officines, ainsi qu'en matière de médicaments inscrits sur la « liste en sus », qui rassemble les médicaments facturés en sus des tarifs hospitaliers. A contrario, nous ne sommes pas compétents en matière de médicaments dispensés lors de séjours à l'hôpital et qui sont facturés à l'intérieur des groupes homogènes de séjour prévus par la tarification à l'activité (T2A). Quant aux médicaments non remboursables, leur prix est libre.

Nous intervenons dans une chaîne de décision qui comporte trois acteurs.

Le premier, c'est l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), établissement public de l'État qui délivre les autorisations de mise sur le marché (AMM) ; elle ne prend ses décisions que sur la base d'informations de sécurité sanitaire, c'est-à-dire d'une évaluation du bénéfice et du risque : elle ne se prononce pas sur le prix du médicament.

Elle délivre également des autorisations temporaires d'utilisation (ATU), c'est-à-dire qu'elle autorise que soient mis à disposition des patients des médicaments qui ne disposent pas encore d'une autorisation de mise sur le marché, c'est-à-dire qui n'ont pas encore été examinés par la Haute Autorité de santé (HAS) et le CEPS, et pour lesquels le processus de fixation du prix n'a pas encore été déclenché.

Le deuxième acteur, c'est donc la HAS, et plus particulièrement sa commission de la transparence. Elle fixe le service médical rendu (SMR) d'un produit : majeur ou important, modéré, faible ; elle décide donc si le produit doit être, ou pas, remboursé. Quand nous examinons le dossier, le principe du remboursement du produit est donc déjà acquis.

La HAS fixe également l'amélioration du service médical rendu des produits (ASMR), dont le code de la sécurité sociale fait l'un des principaux critères de fixation du prix. Il y a cinq niveaux d'ASMR – de I, niveau le plus innovant, à V, le moins innovant. Nous regroupons en pratique les trois premiers niveaux, et nous traitons trois blocs : I à III, IV et V.

La HAS procède enfin pour les produits innovants à une analyse médico-économique des produits qu'elle nous transmet avec les avis de la commission de la transparence fixant l'ASMR.

Le troisième acteur, c'est le CEPS, organisme interministériel, placé sous l'autorité des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et de l'économie, c'est-à-dire de Mme Touraine, de MM. Sapin et Eckert, et de M. Macron.

Dans sa formation actuelle, il existe depuis 1997. Il a été créé pour mettre fin aux accusations d'opacité du processus de fixation du prix : jusque-là, l'administration centrale fixait un prix « technique », validé ensuite par le cabinet du ou de la ministre.

Le CEPS est composé de dix personnes.

Il comprend d'abord six représentants de l'État, à commencer par le président et le vice-président concerné – il y en a deux, l'un, le docteur Jean-Patrick Sales, pour la section des médicaments et l'autre, André Tanti, pour la section des dispositifs médicaux. Tout ce que je dis sur les médicaments peut d'ailleurs être peu ou prou transposé aux dispositifs médicaux : dans le débat qui nous intéresse aujourd'hui, les différences sont marginales.

Quatre administrations centrales sont également représentées : direction de la sécurité sociale – qui est sous la double tutelle du ministère des affaires sociales et du ministère des comptes publics –, direction générale de la santé (DGS), direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), direction générale des entreprises (DGE).

Le CEPS comprend ensuite trois représentants des caisses d'assurance maladie : deux représentants du régime général, un du Régime social des indépendants (RSI) ou de la Mutualité sociale agricole (MSA). En pratique, le RSI siège dans la section des médicaments, la MSA dans celle des dispositifs médicaux.

Enfin, le CEPS comprend un représentant de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (UNOCAM).

À ces dix personnes disposant d'une voix délibérative s'ajoutent deux personnes disposant d'une voix consultative : un représentant de la direction générale de l'offre de soins (DGOS) – qui nous éclaire sur les dossiers relatifs aux médicaments à l'hôpital – et un représentant de la direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI), cette dimension étant essentielle dans le domaine du médicament.

Le CEPS a pour mission de contribuer à l'élaboration de la politique du médicament, mais sa mission principale est bien de fixer les prix de certains médicaments dont je vous ai indiqué le détail au début de ma présentation. Cette mission est encadrée par différents textes législatifs et réglementaires.

L'article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale détermine les règles de fixation des prix des médicaments remboursables par la sécurité sociale : il dispose que le prix est fixé par convention entre le CEPS et le laboratoire ; à défaut, le CEPS peut prendre une décision unilatérale, les ministres conservant un droit de regard sur le prix en cas de désaccord avec la proposition du CEPS.

Ce même article dispose également que « la fixation de ce prix tient compte principalement de l'amélioration du service médical rendu apportée par le médicament, le cas échéant des résultats de l'évaluation médico-économique, des prix des médicaments à même visée thérapeutique, des volumes de vente prévus ou constatés ainsi que des conditions prévisibles et réelles d'utilisation du médicament ». Tous ces points figurent ordinairement dans l'avis de la commission de la transparence transmis par la HAS : ASMR, évaluation médico-économique lorsqu'elle existe, points de comparaison éventuels, population concernée.

Une lettre d'orientation des ministres, datée du 2 avril 2013, rappelle au CEPS les objectifs de la politique économique des produits de santé menée par le Gouvernement : garantie d'un accès effectif de tous à des soins de qualité, promotion du bon usage du médicament et de l'efficience de la dépense, valorisation des innovations, sources de progrès thérapeutique, transparence sur le processus de fixation des prix et cohérence des décisions, respect des objectifs annuels d'évolution des dépenses annuelles d'assurance maladie, soutien du dynamisme des industries de santé et développement de l'emploi.

Un accord-cadre a été signé entre le CEPS, avec l'accord et sa tutelle, et le syndicat des entreprises du médicament, le LEEM. Celui-ci prévoit notamment une « garantie de prix européen » pour tout médicament innovant, c'est-à-dire disposant d'une ASMR de I à III. Nous regardons donc les prix pratiqués en Espagne, en Italie, en Allemagne et au Royaume-Uni, et nous demandons aux laboratoires que leur prix soit compatible avec les prix dans ces pays. Nous essayons toujours d'avoir le prix le plus bas.

J'insiste sur le fait que cette garantie de prix européen ne vaut que pour le prix public.

Enfin, nous signons une convention avec chaque laboratoire pour chaque produit, les décisions de prix étant prises produit par produit et non globalement par laboratoire.

Si nous fixons du prix initial d'un médicament lors de son entrée sur le marché, notre activité principale est de faire baisser régulièrement les prix des produits qui sont déjà commercialisés : nous révisons environ cinq mille prix chaque année. Ces baisses de prix peuvent être prévues par une clause contractuelle, provoquées par l'arrivée d'un comparateur, d'un nouveau produit, d'un générique ou par la réévaluation d'une classe thérapeutique par la HAS…

Vous savez enfin, en tant que législateurs, que le prix n'est pas le seul mécanisme de régulation de la dépense de médicament : il existe également des mécanismes législatifs. Le taux L permet de récupérer une partie du chiffre d'affaires des laboratoires, au-delà d'un certain seuil ; quant au taux W, il s'applique spécifiquement, pour les années 2014, 2015 et 2016, aux médicaments destinés à traiter l'hépatite C.

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