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Jean-Luc Laurent
Question N° 102036 au Ministère de la culture


Question soumise le 24 janvier 2017

M. Jean-Luc Laurent interroge Mme la ministre de la culture et de la communication sur les suites données au rapport de M. David Assouline, sénateur de Paris, concernant la diffusion des grands évènements sportifs. À l'occasion de la discussion en première lecture de la proposition de loi « visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs », l'argument de la candidature olympique de Paris 2024 a été régulièrement utilisé sur différents bancs de l'Assemblée nationale. Cet argument est très étonnant puisque la diffusion en clair des Jeux olympiques est protégée par l'article 20-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et les Jeux olympiques sont le premier évènement « d'importance majeure » de la liste figurant à l'article 3 du décret n° 2004-1392 du 22 décembre 2004. Ainsi, les Jeux olympiques bénéficient d'une retransmission qui, aux termes de la loi, ne peut pas être « exclusive » et « aboutir à priver une partie importante du public de la possibilité de les suivre en direct ou en différé sur un service de télévision à accès libre ». Ces dispositions constituent une barrière essentielle face à la surenchère des droits de diffusion et à l'invisibilité croissante des autres évènements sportifs, y compris ceux organisés en France et par la France comme le récent Euro de football en 2016 ou actuellement le Mondial de handball. L'enjeu est social, mais il s'agit aussi de porter une conception différente du spectacle sportif. Les grands évènements sportifs, pour rester grands, ne doivent pas être déconnectés du véritable grand public et se contenter du public spécialisé qui a les moyens et la volonté de franchir le péage. À juste titre, le sénateur David Assouline propose dans son rapport d'assurer une diffusion prioritairement en clair des grands évènements sportifs. À l'issue des récents débats parlementaires, le doute est permis sur le cadre légal et réglementaire dans lequel pourraient être diffusés les Jeux olympiques de Paris. Au cours de la législature, malgré de nombreuses interpellations, le Gouvernement n'a jamais souhaité protéger la diffusion des évènements sportifs. Il aimerait connaître les évolutions législatives et réglementaires que le Gouvernement envisage dans le cadre de la candidature olympique de Paris.

Réponse émise le 9 mai 2017

Permettre au plus grand nombre de téléspectateurs de suivre les principaux événements sportifs, qu'ils se déroulent en France ou à l'étranger, est une préoccupation déjà appréhendée par la législation européenne et française. En effet, par transposition de l'article 3 bis de la directive 89/552/CEE du Conseil des communautés européennes du 3 octobre 1989, dite directive « télévision sans frontières », modifiée par la directive 97/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1997, devenu l'article 14 de la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010 dite directive « services de médias audiovisuels », l'article 20-2 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dispose notamment que « les événements d'importance majeure ne peuvent être retransmis en exclusivité d'une manière qui aboutit à priver une partie importante du public de la possibilité de les suivre en direct ou en différé sur un service de télévision à accès libre. La liste des événements d'importance majeure est fixée par décret en Conseil d'État. Ce décret détermine les conditions d'application du présent article. » Le décret no 2004-1392 du 22 décembre 2004 pris pour l'application de l'article 20-2 de la loi précitée prévoit ainsi que les événements qualifiés d'importance majeure pour la société française puissent être retransmis par les éditeurs de services de télévision dans des conditions qui garantissent leur accès au plus grand nombre de téléspectateurs. Élaboré par le ministère de la culture et de la communication et le ministère de la jeunesse et des sports en concertation avec les professionnels des secteurs audiovisuel et sportif, ce décret définit une liste de 21 événements d'importance majeure pour la société française, parmi lesquels figurent les Jeux Olympiques d'été et d'hiver, indépendamment du pays organisateur. Ce décret instaure notamment un mécanisme de rétrocession des droits de retransmission au terme duquel les chaînes de télévision à accès restreint ne peuvent exercer les droits exclusifs qu'ils ont acquis sur un événement d'importance majeure qu'à deux conditions : s'ils remplissent les conditions de réception d'une télévision à accès libre, en diffusant l'événement en clair ; si, après avoir publiquement manifesté leur volonté de revendre ces droits, ils n'ont reçu aucune proposition émanant d'une chaîne gratuite. Le décret n'édicte en aucun cas une obligation d'achat ou de rachat des droits de retransmission de ces événements pour les services de télévision à accès libre, qu'ils soient publics ou privés. La réglementation a simplement entendu établir une procédure au terme de laquelle ces services ont la possibilité de racheter ces droits aux radiodiffuseurs payants. Ce dispositif réglementaire a établi un équilibre jusqu'à présent jugé satisfaisant entre l'intérêt du public, celui des organisateurs de manifestations sportives et celui des chaînes de télévision. Toutefois, l'accroissement de la concurrence sur le marché de la télévision payante, qui conduit les chaînes à acquérir des droits exclusifs de diffusion pour se démarquer de leurs concurrents, se fait au détriment de la diffusion de certains événements sportifs populaires sur les chaînes gratuites. Ainsi, si l'exposition du sport à la télévision a augmenté en volume au cours des dix dernières années, la diffusion des compétitions majeures a néanmoins diminué sur la télévision gratuite. Le 19 mai 2016, le Premier ministre a confié au sénateur David Assouline une mission auprès de la ministre de la culture et de la communication, du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports et du secrétaire d'État chargé des sports, afin d'élaborer des préconisations susceptibles d'améliorer l'accès du public à la diffusion d'événements sportifs d'importance majeure et le renforcement médiatique de disciplines sportives ou de pratiques émergentes. Le rapport, remis le 18 novembre 2016, analyse finement les évolutions à l'œuvre dans la diffusion télévisuelle des événements sportifs : en particulier, la captation de plus en plus importante par des chaînes payantes des images sportives les plus attractives, l'insuffisante ouverture à la diversité des disciplines et pratiques sportives, au sport féminin et au handisport de la part des chaînes généralistes en clair et le risque que fait peser la forte croissance des droits de diffusion télévisuels sur l'accès aux programmes en clair. Le sénateur recommande d'harmoniser les dispositions relatives aux principaux sports collectifs (protection des phases à élimination directe pour les championnats mondiaux et européens) et de mettre l'accent sur des manifestations sportives auxquelles participent des équipes ou athlètes français, ainsi que sur les éditions des grands événements sportifs internationaux organisés en France. Une des principales préconisations du rapport est de moderniser le décret du 22 décembre 2004 relatif à la diffusion par les chaînes en clair des événements d'importance majeure. En ce sens, une consultation publique a été lancée le 13 mars dernier afin de recueillir l'avis des acteurs concernés sur une éventuelle modification de ce décret. Cette consultation était ouverte jusqu'au 21 avril.

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