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Henri Emmanuelli
Question N° 24076 au Ministère de l'enseignement supérieur


Question soumise le 16 avril 2013

M. Henri Emmanuelli appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les problèmes de financement que rencontrent actuellement les universités. En effet, une dizaine d'universités sont actuellement en déficit pour la deuxième année consécutive, et des restrictions supplémentaires ont été annoncées par le Gouvernement. Ces difficultés ont un impact plus dur pour les petites universités de proximité, comme celle de Pau, qui remplissent un rôle fondamental pour permettre à de nombreux jeunes de poursuivre leurs études. Sans ces universités de proximité, la démocratisation de l'enseignement supérieur restera un vain mot. Il partage les objectifs du rapport Déaut du 14 janvier 2013 de réaffirmer le rôle de l'État dans le pilotage de l'enseignement supérieur. Aussi, il lui demande si des moyens supplémentaires seront débloqués pour les universités afin de pallier les déficits de financement des dernières années.

Réponse émise le 5 novembre 2013

Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR) souhaite apporter deux éléments d'information indispensables à la compréhension de sa stratégie sur l'allocation des moyens qui concerne d'une part les moyens alloués aux universités jusqu'en 2013 et d'autre part le dispositif de suivi, d'accompagnement et d'alerte qu'il a mis en place. 1 - Jusqu'en 2013 (y compris) les moyens ont globalement augmenté. En 2013, 1000 emplois ont été créés. Le ministère a mené une politique active et différenciée en matière d'allocation des moyens, visant à soutenir les universités sous-dotées au sens du modèle d'allocation des moyens (système de répartition des moyens à la performance et à l'activité, dit SYMPA). Les moyens des universités ont ainsi largement augmenté depuis 2007, en moyenne de +16 % entre 2009 et 2012. Cette progression n'a donc pas été uniforme, mais largement différenciée, allant de +6 % à +49 %. S'agissant de l'université de Pau, l'augmentation des moyens entre 2009 et 2012 a été de 15 %, traduisant un soutien très fort du ministère. Pour 2013, pour les universités, les dotations allouées par le ministère se caractérisent par trois éléments : d'une part, le Gouvernement s'est engagé dans la voie d'un retour à l'équilibre des finances publiques. A ce titre, tous les opérateurs de l'Etat ont été mis à contribution pour le redressement des comptes publics, de manière équitable et en fonction de leur assise financière. Il est incontestable que cet effort demandé aux établissements représente pour eux une contrainte. Toutefois, le socle de leur dotation récurrente globale augmente entre 1,5 et 3 % entre 2012 et 2013, compte tenu notamment de l'augmentation du compte d'affectations spéciales (CAS) pensions dont elles bénéficient, de la moindre réserve de précaution dont bénéficient les universités par rapport aux autres opérateurs de l'Etat et des créations d'emplois. La dotation de l'université de Pau a ainsi augmenté de 2 % entre 2012 et 2013. Le MESR bénéficie d'un schéma d'emplois pluriannuel prévoyant la création de 1.000 postes par an entre 2013 et 2017 prioritairement dédiés à la réussite des étudiants dans les premiers cycles universitaires. En ces temps de nécessaire maîtrise des finances publiques, la priorité budgétaire ainsi accordée à la réussite des étudiants et à la réforme des premiers cycles est un signe très fort, qui doit permettre de mieux accompagner les étudiants et de porter des innovations pédagogiques ambitieuses. La majeure partie de cette dotation (812 emplois soit 83%) a été répartie en fonction du sous-encadrement relatif des établissements tandis que les autres postes ont permis de soutenir la politique de site, la démocratisation de l'accès à l'enseignement supérieur ou des leviers stratégiques. Au titre de la sous-dotation relative, l'université de Pau a bénéficié en 2013 de 5 créations de postes. Enfin, il convient d'insister sur le fait que cette politique s'inscrit dans la durée avec la création de 5000 emplois sur le quinquennat et que cet effort d'accompagnement des sites, mais également de soutien à des universités sous-dotées, telles que l'université de Pau, est donc appelé à perdurer. 2 - Le MESR a mis en place un dispositif de suivi, d'accompagnement et d'alerte auprès des établissements. Tout d'abord, il convient d'être prudent sur l'affirmation que les universités connaissent des difficultés financières. Chaque établissement RCE est un cas particulier en soi qui renvoie à une situation financière spécifique et à un contexte local. L'hétérogénéité du paysage universitaire est suffisamment grande (gouvernance, nombre de composantes, volume d'étudiants, offre de formation, localisation, thématiques scientifiques, capacité de répondre à des appels à projet de recherche, etc.) pour qu'il soit très difficile de généraliser. En outre, si plusieurs établissements accusent des déficits de leur section de fonctionnement, certains déficits ne révèlent pas nécessairement une situation financière structurellement détériorée puisque souvent liés, au moment du passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE), à des régularisations comptables demandées par les commissaires aux comptes dans le cadre d'un premier exercice de certification. Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre d'établissements d'enseignement supérieur et de recherche, bénéficiant des responsabilités et compétences élargies, rencontrent effectivement des difficultés financières depuis plusieurs années. L'identification des difficultés financières liées à la gestion a été réalisée sur la base de la capacité des établissements à clôturer l'exercice de manière pérenne avec un résultat excédentaire et à dégager en gestion des crédits pour financer les investissements. Dans les établissements d'enseignement supérieur, plusieurs facteurs de nature diverse se conjuguent qui peuvent parfois aboutir à des situations financières très tendues : la saturation des emplois avant le passage à l'autonomie qui pèse aujourd'hui dans le pilotage de la masse salariale ; la qualité de la prévision budgétaire, et plus globalement, la maturité des établissements sur les enjeux de contrôle de gestion et/ou de contrôle interne ; le grand nombre de microdécisions prises au niveau des composantes dans les établissements sans capacité, faute d'outils, d'en mesurer l'impact à moyen terme au niveau global de l'établissement, ce qui souligne aussi parfois le défaut de dialogue de gestion interne qui devrait normalement être systématiquement institué ; le financement partiel par l'Etat de certaines dépenses (glissement vieillesse technicité - GVT-) ou le financement différé (remboursement des dépenses au titre de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat dite loi TEPA) ; enfin, la difficulté pour certains de susciter des ressources propres et surtout un besoin de professionnalisation des équipes et de renouvellement des compétences. Pour dépasser cette situation de tensions, un « comité des pairs », constitué de deux anciens présidents aux compétences reconnues en gestion, a été institué fin 2011 pour assurer une mission de remédiation et pour expertiser la situation financière de ces établissements et la nature des difficultés, structurelles ou conjoncturelles, que ceux-ci rencontraient. Le comité a été amené à faire des préconisations visant à court et moyen termes le retour à l'équilibre des établissements, dans l'esprit du décret de 2008, c'est-à-dire non pas l'abandon de l'autonomie de l'université, mais un dispositif d'accompagnement via un plan de retour à l'équilibre, permettant à l'établissement d'assurer un pilotage efficace de sa gestion. Ce dispositif d'accompagnement a été repris et étendu dans le cadre du « dispositif de suivi, d'alerte et d'accompagnement » mis en place par le MESR mi 2012. Largement présenté à la communauté universitaire et au Parlement, ce dispositif vise à développer le suivi financier des établissements afin d'engager des actions préventives et à accompagner les établissements par le biais d'audits (diagnostics flash et audits approfondis) et par le déploiement d'actions-formations sur la soutenabilité économique des projets d'établissements. En effet le sujet n'est pas que financier et touche à l'activité. La bonne articulation entre activités et mobilisation des ressources disponibles est nécessaire pour mettre en perspective la soutenabilité financière du projet de l'établissement. Cette démarche doit permettre d'éclairer les choix de l'établissement, tout particulièrement dans le contexte actuel extrêmement tendu des finances publiques. La maîtrise de l'équilibre financier et la soutenabilité du projet de l'établissement passent par le développement de méthodes d'analyse des coûts de l'offre de formation et de la recherche. Au final, ces actions, que ce soit une politique active en matière d'équilibrage des moyens nouveaux alloués ou bien un suivi et un accompagnement des établissements, participent du pilotage de l'enseignement supérieur par le ministère. En effet, ce dernier entend clairement jouer son rôle, dans le respect de l'autonomie des opérateurs et dans un contexte budgétaire difficile, avec les leviers dont il dispose. Ces politiques feront bientôt l'objet, conformément à l'article 4 de la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, d'une partie de la stratégie nationale de l'enseignement supérieur.

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