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Émilienne Poumirol
Question N° 31701 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 9 juillet 2013

Mme Émilienne Poumirol attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la situation des ressortissants non européens vivant dans des pays limitrophes et qui voyagent en traversant la France. Lors de ces trajets, tel que celui partant d'Espagne pour aller en Italie, ces personnes disposent d'un titre de transport pour aller et revenir mais n'ont pas besoin d'un titre de séjour pour la France puisque ce n'est pas leur destination finale. En dépit de ce constat, certaines associations ont pu déplorer des arrestations ainsi que des mises en détention contre ces personnes. Ces associations remettent ainsi en cause l'interprétation faite par les forces de l'ordre du CESEDA lorsqu'elles sont confrontées à ce type de situation. Elle lui demande en conséquence de bien vouloir lui préciser quelles sont les mesures que le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour remédier à cette situation.

Réponse émise le 10 juin 2014

I- Les conditions de circulation dans l'espace Schengen Les ressortissants de pays tiers résidant dans un des pays appartenant à l'espace Schengen doivent détenir un titre de séjour pour être en situation régulière dans ces États. Conformément à l'article 21 de la convention d'application des accords de Schengen « les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par un des États membres peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pour une durée n'excédant 90 jours sur toute période de 180 jours sur le territoire des autres États membres, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 (code frontières Schengen) et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de l'État membre concerné ». Il en résulte qu'un ressortissant de pays tiers, titulaire d'un titre de séjour délivré par un État Schengen et d'un document de voyage en cours de validité peut circuler moins de 90 jours par période de 180 jours sur le territoire français. Cependant, lors de son séjour ou de son passage sur le territoire d'un État membre de l'espace Schengen et en particulier sur le territoire français, le ressortissant de pays tiers peut être amené à prouver son identité et la régularité de son séjour. II- Contrôle des ressortissants de pays tiers circulant dans l'espace Schengen L'article 78-1 alinéa 2 du code de procédure pénale dispose que « toute personne se trouvant sur le territoire national doit accepter de se prêter à un contrôle d'identité effectué dans les conditions et par les autorités de police visées aux articles suivants ». Toute personne peut donc être contrôlée sur l'ensemble du territoire français. Elle doit alors présenter un document attestant de son identité, qu'elle soit française ou étrangère. En l'absence de présentation de document d'identité, la personne contrôlée peut être amenée au poste de police afin de procéder aux vérifications nécessaires et peut être, dans ce cas, retenue pour une durée n'excédant pas 4 h (article 78-3 du code de procédure pénale). L'article 21 du Code frontières Schengen prévoit que la suppression des contrôles aux frontières intérieures ne porte pas atteinte à l'exercice des pouvoirs de police par les autorités compétentes de l'État membre en vertu du droit national, dans la mesure où l'exercice de ces compétences n'a pas d'effet équivalent à celui d'une vérification aux frontières. De même, l'article 21 prévoit que la suppression des contrôles aux frontières intérieures ne fait pas obstacle à la possibilité pour un État membre de prévoir dans son droit national l'obligation de détention et de port de titres et documents. Ainsi, toute personne peut être contrôlée et, dans l'éventualité où peuvent être réunis des éléments d'extranéité, elle peut faire l'objet, sur le fondement de l'article L. 611-1 du CESEDA d'une demande de présentation des documents sous couvert desquelles elle est autorisée à séjourner et à circuler dans l'espace Schengen. Si elle ne peut en justifier, la personne pourra faire l'objet d'une retenue, qui ne peut excéder 16 h, sur le fondement de l'article L. 611-1-1 du CESEDA. Les articles L. 611-8 et L. 611-9 du CESEDA permettent aux officiers de police judiciaire de rechercher et de contrôler les infractions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers en France, en procédant à une visite sommaire des véhicules circulant sur la voie publique, à l'exclusion des voitures particulières, avec l'accord des conducteurs, ou à défaut, sur instruction du procureur de la République, dans une zone comprise entre la frontière terrestre de la France avec les autres États membres de l'espace Schengen et une ligne tracée à 20 km en deçà. Par ailleurs, l'article 78-2 du Code de procédure pénale (CPP) étend à la même zone et aux mêmes lieux les possibilités de contrôles d'identité par les officiers de police judiciaire, motivées par la vérification des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) s'est prononcée le 22 juin 2010 sur la conformité de l'article 78.2 huitième alinéa du code de procédure pénale avec le droit de l'Union européenne (arrêt Melki et Abdeli). La Cour a jugé que les vérifications effectuées sur la base de cet article étaient dans leur principe compatibles avec le principe de libre franchissement des frontières dans la mesure où elles avaient un objectif distinct, même si elle a toutefois considéré que la rédaction de l'article 78.2 alinéa 8 du CPP ne comportait pas toutes les limitations et précisions nécessaires. C'est pourquoi, la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPSI) du 14 mars 2011 a modifié par son article 69 la rédaction de l'article 78.2 du CPP, ainsi que celle de l'article 67 quater du Code des douanes, en apportant des précisions répondant aux exigences formulées par la CJUE pour assurer la conformité de la loi nationale avec le Code frontières Schengen : le contrôle de l'obligation de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi ne peut être pratiqué que pour une durée maximale de six heures consécutives dans un même lieu et ne peut consister en un contrôle systématique des personnes présentes ou circulant dans les zones ou lieux mentionnés au premier alinéa de l'article 78.2 du CPP. A noter que parmi les lieux cités à l'article 78.2 du CPP figurent non seulement ceux qui relèvent de la bande dite des 20 km, mais aussi les zones accessibles au public dans les ports, aéroports, gares ferroviaires et routières ouverts au trafic international, désignés par arrêté, ainsi que certaines sections autoroutières et les trains effectuant une liaison internationale. C'est à ce titre et dans les conditions décrites ci-dessus que toute personne voyageant entre l'Espagne et l'Italie en passant par le territoire français peut être amenée à justifier de son identité et, s'agissant des ressortissants de pays tiers, à justifier de sa situation au regard de la circulation dans l'espace Schengen.

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